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Mi-Kyung Choi (Traducteur)Jean-Noël Juttet (Traducteur)
EAN : 9782264039866
141 pages
10-18 (01/09/2004)
3.61/5   36 notes
Résumé :

Un homme se souvient de son enfance auprès de Taegum, la jeune fille qui s'occupait de lui. Les herbes folles ont poussé sur les ruines de son quartier, dévasté par la guerre, où erre Taegum devenue folle, elle aussi. Blessures et failles de l'existence trahissent de même un soldat coréen envoyé au Vietnam, un champion de lutte un peu naïf et gigolo, ou deux journaliers en route pour Sampo en compagnie d'une prostituée. A travers ces quatre récits, Hwang... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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Après la lecture de trois romans de Hwang Sok-yong, j'aborde avec La route de Sampo son travail en tant que nouvelliste. Ce petit recueil contient quatre récits datant des années soixante-dix, soit juste au moment où sa carrière décolle avec le très fort Monsieur Han.

J'ai retrouvé ici son style si net, sans fioriture ni pathos. Les quatre histoires diffusent un parfum amer ou nostalgique. Ils sont empreints d'éléments autobiographiques.

"Herbes folles" parle de la guerre civile entre les deux Corées. le récit est vu au travers des yeux d'un garçonnet qui s'apparente à l'écrivain. Des altercations entre ouvriers aux bombardements et aux fuites des populations, la nouvelle donne à voir ces réalités en restant à hauteur d'enfant.

"Oeils-de-biche" traite de celle du Vietnam, dans laquelle des contingents sud-coréens furent enrôlés. Ici on assiste au retour de ces militaires, désillusionnés ou rendus fous par la guerre et qui ressentent une terrible amertume en touchant au pays natal; plus rien n'est pareil... à commencer par eux.

"Les ambitions d'un champion de ssireum" (lutte traditionnelle coréenne) narre le quotidien d'un jeune Hercule qui doit quitter son village natal et tous ses us et coutumes pour gagner la capitale et tâcher de s'en sortir. D'emblée, le jeune homme reconnaît que, si la ville a dégourdi le paysan qu'il était, il a beaucoup perdu au change. Ce récit très nostalgique évoque les changements sociaux et économiques dans la Corée des années 1970.

Une même ambiance règne dans la dernière nouvelle, qui porte le titre du recueil. Les paysans, ne pouvant plus vivre de leurs terres, vont là où ils trouvent à s'employer comme journalier. Quant aux femmes, les conditions sont tout particulièrement rudes et elles finissent souvent par devoir se vendre pour vivre.

Hwang Sok-yong se fait le peintre littéraire d'un pays en plein bouleversement. Son écriture, ses personnages attachants et si vivants nous rapproche de la Corée. Un auteur absolument formidable dans son naturalisme.
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L'auteur a choisi lui-même les nouvelles de ce recueil, écrites dans les années 1970. Elles sont en partie autobiographiques et donc parfaites pour découvrir Hwang Sok-yong si vous ne connaissez pas encore cet immense auteur coréen, ce qui était mon cas avant de le trouver sur le blog USVA dans une de ses superbes chroniques sans frontières.

La première histoire « Herbes folles » parle de souvenirs d'enfance dans les années 1950 (l'auteur avait sept ans) lors de la guerre fratricide qui a ravagé la Corée et conforté la partition du pays. J'ai aimé vivre, à travers le regard du petit garçon, la touchante complicité s'instaurant avec Taegeum, la jeune fille employée de maison. Comme souvent chez cet auteur, on sent une forte empathie pour ses personnages féminins dont il excelle à décrire la difficile condition, à partir de leur quotidien, dans son écriture réaliste mais prenant en compte les points de vues de chaque personnage.

La nouvelle « Oeils-de-biche » aborde le malaise du retour au pays de soldats coréens qui se sont engagés au côté de l'armée américaine au Vietnam, ce que l'auteur a réellement vécu en 1966-1967.

Le bateau vient de les ramener en Corée, l'art de l'écrivain est de capter ce temps suspendu lors de la première virée en ville, dans l'attente du train qui va les ramener chez eux. La sexualité, à travers les contacts avec les prostituées, est abordée comme une violence supplémentaire dans un pays divisé et hostile, où la prostitution est dopée par la guerre et l'afflux des étrangers.

« Les ambitions d'un champion de ssireum » : Llbong est un costaud reconnu dans son village pour ses talents dans cette forme de lutte spécifiquement coréenne, le ssireum. Il doit quitter le village après la mort de sa mère mais les nouvelles rencontres à la ville sont lourdes de désillusions. A travers cette histoire ce sont les mutations culturelles des années 1970 qui sont évoquées, la perte des traditions et la difficulté de trouver un équilibre dans ces nouveaux codes qui se sont imposés. Llong est engagé comme acteur et se rend compte avec retard qu'il doit jouer dans un film porno. Il tombe amoureux de l'actrice et part avec celle-ci vivre un improbable amour.

« La route de Sampo » : Hwang Sok-yong s'est inspiré d'un épisode de sa vie quand, après avoir participé à une manifestation d'étudiants interdite, il s'est retrouvé en prison. Libéré en même temps que son compagnon de cellule, un ouvrier, ils partent tous les deux sur la route. Ici, deux ouvriers, Yongdal et Jong, cherchant du travail, vont faire la route avec une prostituée nommée Baekwha. Un dernier portait touchant juste. le froid, la neige, l'incertitude du lendemain font de cette courte histoire un bijou de réalisme et d'humanité envers les déshérités cherchant un meilleur destin. Je l'ai lue en pensant à Charlie Chaplin et la célèbre image de Charlot avec « la gamine », vus de dos, s'éloignant sur le chemin... J'ai adoré la poésie qui se dégage de l'histoire à travers les descriptions de paysages enneigés.

Ecrivain coréen, Hwang Sok-yong est né en 1943 en Mandchourie. A la Libération (1945), la famille vient s'installer à Pyongyang, capitale de la partie nord de la péninsule coréenne, placée sous contrôle soviétique. En 1948, sa famille passe au sud, sous contrôle américain, où le père a trouvé du travail. Témoin attentif de l'évolution sociale et politique de son pays, il puise dans les turbulences que traverse la Corée dans la seconde partie du XXe siècle, la matière de ses essais, romans et nouvelles. Hwang Sok-yong ne cesse de lutter, aux coté des intellectuels et des étudiants, contre les régimes dictatoriaux qui se sont succédés à Séoul jusqu'à la fin des années 1980. Pour avoir voulu dialoguer avec la Corée du nord dans le cadre d'un congrès d'écrivain, il connaîtra plusieurs années d'exil et même une condamnation à la prison en 1993. Il est maintenant un écrivain reconnu dans le monde entier, ce que je trouve amplement mérité au vu de ce recueil et de Shim Chong, fille vendue, un roman porté par le souffle de l'histoire de toute l'Asie orientale dont je parlerai dans ma prochaine chronique.

Je suis vraiment ravi d'avoir découvert cet écrivain. Je vais poursuivre la découverte, c'est sûr. Je peux même dire qu'il y aura, pour moi, un avant et un après Hwang Sok-yong qui m'a rendu cette partie du monde et son peuple beaucoup plus proches d'une certaine façon.
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Chronique avec illustration sur le blog Bibliofeel. Livre avec photo personnelle de pivoines, magnifiques en ce moment, une plante utilisée dans la médecine traditionnelle chinoise !


Lien : https://clesbibliofeel.blog
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Un excellent recueil venu tout droit de Corée

Après quelques lectures plutôt moyennes, j'ai retrouvé avec bonheur et soulagement l'auteur coréen Hwang Sok-yong dont le roman Monsieur Han m'avait beaucoup plu en janvier. La route de Sampo est un petit recueil qui regroupe 4 récits, initialement publiés entre 1972 et 1974, où se mêlent drame, désillusion, humour et mélancolie.

Le premier récit "Herbes Folles" raconte la guerre civile qui a ravagé et divisé la Corée via le regard d'un enfant. Une nouvelle de qualité avec un style qui sonne juste.
Suit, la nouvelle "Oeils-de-biche" qui raconte le retour désenchanté de militaires sud-coréens, engagés volontaire pour le Vietnam. L'auteur y souligne, entre autres choses, le fossé béant qui sépare les illusions de ces jeunes soldats et la réalité de l'occupation occidentale du Vietnam.
La troisième nouvelle "Les ambitions d'un champion de ssireum" relate les désillusions d'un jeune homme campagnard aussi fort que naïf et qui monte en ville dans l'espoir d'y faire fortune. Là aussi, le rêve matérialiste du garçon se brise face à la réalité... Un bon cru également.
Enfin la route de Sampo s'achève sur la nouvelle éponyme : le narrateur est un ouvrier qui se traine de ville en ville et qui rencontre sur son chemin un autre ouvrier qui rentre chez lui sur l'ile de Sampo. Deux ouvriers se déplaçant de ville en ville croisent sur leur route une prostituée en fuite. Les trois protagonistes décident de faire un bout de chemin ensemble, cela au milieu d'une tempête de neige pour finalement se retrouver à une gare hésitant sur le chemin à prendre, rejoindre une nouvelle ville ou quitter la civilisation galopante au profit de la petite ile de Sampo, île natale d'un des protagonistes. Si j'ai trouvé les trois autres nouvelles très bonnes, celle-ci est tout simplement magistrale. Sans jouer sur un pathos facile, Hwang nous fait partager les émotions de ses personnages : espoirs, craintes, désillusion, mélancolie...

Comme dans Monsieur Han, Hwang utilise le petit bout de la lorgnette pour nous parler des difficultés socio-économiques que traverse alors son pays : déchirement idéologique, précarité économique, détresse sentimentale et sexuelle, difficile condition des femmes, extinction des liens traditionnels qui unissaient la société... Autant de maux qui accablent la Corée du Sud de 1970 (qui vient de vivre une « modernisation » à marche forcée) et que l'on ressent pleinement au travers de ces nouvelles qui expriment si bien le désenchantement et parfois le désespoir de leur auteur.

Difficile également de ne pas trouver dans chacune des nouvelles une part de la biographie de l'auteur, Hwang Sok-yong qui vécut la guerre de Corée comme enfant, et jeune homme s'engagea comme volontaire lors du conflit au Vietnam et en revint profondément dégouté. Quant à la dernière nouvelle, elle s'inspire d'une mésaventure arrivée à l'auteur, qui, après avoir été relâché par la police suite à une manifestation étudiante s'est retrouvé à cheminer sous la pluie en compagnie d'un ouvrier, coupable de tapage nocturne, avec qui il avait partagé sa cellule.

La route de Sampo est un recueil extrêmement prenant et plaisant à lire dont on regrette qu'il ne soit pas plus long. J'ai particulièrement apprécié l'écriture de l'auteur et ses personnages attachants et plus vrais que nature. Hwang Sok-yong est un écrivain qu'il me tarde de connaitre davantage et je vous recommande vivement ce recueil.
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Voici un joli recueil de nouvelles écrites dans les années 1970.
La première "herbes folles", ma préférée, conte l'histoire d'une jeune fille dont la fin sera tragique à l'image des ces herbes qui envahissent son quartier dévasté par la guerre.
"Oeils de biche", accessoires érotiques que rapporte un combattant, du Vietnam ; Alcool, magouilles mais aussi mal de vivre accompagnent ces soldats coréens.
"Les ambitions d'un champion de ssireum", nouvelle que j'ai beaucoup aimée , nous emmènent dans l'univers d'un champion de lutte, masseur, acteur porno, désenchanté, fidèle à un amour perdu.
Enfin, "la route de Sampo", nous fait cheminer vers Sampo, à travers la rencontre de deux paysans qui cherchent du travail et une prostituée. Une amitié nait pendant leur périple.
Hwang nous plonge dans des textes réalistes, empreints d'humanité et d'émotion.
Une belle lecture pour découvrir cet auteur coréen !
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« La route de Sampo », c'est quatre nouvelles écrites entre 1972 et 1974 de Hwang Sok-Yong et compilées par l'auteur lui-même. Quatre nouvelles radicalement différentes et indépendantes qui montrent à la fois l'âme coréenne mais aussi sa douleur et sa nostalgie. J'ai vraiment aimé ces histoires (plus que le précédent roman Monsieur Han) en y découvrant un mélange de poésie et de solitude (avec par moment une petite pointe d'humour, même au milieu de la guerre).

I / IV « Herbes Folles ».

Souvenirs d'enfance au milieu de la guerre fratricide qui a déchiré son pays, et tout un Peuple. Hwang Sok-Yong avait 7 ans au moment de ces évènements et difficile de ne pas y voir une page de sa biographie dans le rôle du petit garçon. Bienvenue chez les fous en Corée, cela pourrait être le sous-titre de cette nouvelle émouvante qui touche par la jeunesse de ses protagonistes. J'ai bien aimé !

II / IV « Oeils-de-biche ».

Retour du Vietnam de soldats coréens. La quille, arrivée au port et désillusion totale. Je m'y suis senti perdu comme un étranger, comme ce coréen rentré du combat sans avoir combattu qui semble avoir perdu sa place au sein de sa société. Un sentiment fort de solitude s'y dégage. Triste et morne, cette histoire de solitude est touchante et pourrait me ressembler ? J'ai bien aimé !

III / IV « Les Ambitions d'un Champion de Ssireum ».

Le ssireum est une forme de lutte coréenne, encore très populaire. La nouvelle, excellente et touchante, manie aussi bien l'humour et la dérision que le désenchantement et la désillusion de ce gars qui ni paysan, ni citadin, ni quoi que ce soit, ne trouve pas forcément sa place dans cette vie coréenne. J'ai adoré !

IV / IV « La route de Sampo ».

Émouvante et nostalgique, le plus beau témoignage, la plus belle nouvelle. Un road-book où deux inconnus partagent un bout de route ensemble, et découvrent l'industrialisation de leur pays, traversent la campagne en évoquant un idéal et une nostalgie d'antan. J'ai adoré !
Lien : http://leranchsansnom.free.f..
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
C’est à cette époque que, en rentrant un jour de l’école, alors que je me trouvais à proximité de la gare, un bombardier m’est passé au dessus de la tête, si bas que j’ai pu voir distinctement le pilote. Pris de court, les passants se sont arrêtés, le nez en l’air. Il y a eu un éclair et toutes les vitres du quartier ont volé en éclats. Puis une colonne de fumée est montée, des bâtiments étaient en flamme. Les gens couraient en rasant les murs. Moi, je suis resté cloué sur place, les yeux fixés sur la gare. Quelqu’un m’a crié : « Fiche le camp d’ici, vite ! Ils bombardent… si tu reste là, tu vas te faire tuer ! » L’avion est revenu. C’était comme si on martelait le sol avec une gigantesque matraque. […]
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Le grand Ilbong a compris, alors, qu’il n’échapperait pas à la fatalité du bain public. C’était son destin de récurer la crasse des gens, le nez sur leurs grosses cuisses. Allez, frotte ! frotte d’une main, et de l’autre range les couilles de côté, frotte en les contournant, en les maintenant, en les protégeant, frotte, frotte, sseussak, sseussak, ssakssakssak. Vois partir la crasse épaisse et puante, vois-la filer par les égouts, couvrir les routes, submerger la ville, entrer dans les bars, les immeubles, les bureaux des fonctionnaires, les salles de rédaction des journaux, les écoles, s’étaler sur les livres, sur les cahiers, couler entre les jambes des femmes, sur les yeux des enfants, couvrir les lits, tuer les premiers sourires des nouveau-nés, s’infiltrer jusque dans les poumons d’Ilbong…
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Le calme a repris ses droits dans la rue, devant le bar ; badauds et clients se sont dispersés et, le silence revenu, je me suis retrouvé seul. Il n’était même pas dix heures, et, si je retournais au port, c’est un wagon vide et obscur que je retrouverais. J’ai pris le parti de traîner en ville. J’ai marché d’un pas lourd et sonore. […] Je me sentais extrêmement seul, comme si la rue entière me rejetait. En réalité, c’est moi qui refusais de toute mon énergie l’image que j’avais de moi.
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On a décidé d'abandonner le cinéma pour garder nos nuits d'amour pour nous seuls, dans la dignité. Ces corps qu'on avait vendus aux regards des autres, on les a repris. Quand je me pinçais, c 'est ma chair à moi désormais qui avait mal, quand je la caressais, c'est sa chair à elle qui frémissait. On était tout entier l'un à l'autre et d'une sincérité totale. Mais les coeurs, ça ne se possède pas...Le destin ne nous a pas laissés tranquilles...
Pages 96.97 "les ambitions d'un champion de ssireum"
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Ils prirent la route du bas. Elle devint plus étroite, permettant juste à un char à bœuf de passer, avec d’un côté un ruisseau, de l’autre des champs de cailloux. Une épaisse couche de neige recouvrait déjà le chemin. Derrière eux, leurs empreintes les poursuivaient obstinément.
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