Citations sur L'épopée de Gengis Khan, tome 1 : Le loup des plaines (22)
Son corps était à bout mais il se rappela ce que Yesugei lui disait : la volonté d’un homme peut le faire continuer bien après que sa chair trop faible a renoncé.
(Presses de la Cité, p.191)
- Un serment fait à un mort ne lie personne.
Il tombait une neige aveuglante tandis que les archers mongols encerclaient la petite bande de pillards tatars. Chaque guerrier, guidant son cheval de ses genoux, se dressait sur ses étriers pour décocher flèche après flèche avec une précision foudroyante.
Ils étaient sombres et silencieux, le bruit des sabots de leurs montures lancées au galop couvrait seul les cris des blessés et le vent hurlant.
Impossible pour les Tatars d'échapper à la mort qui s'abattait en sifflant des flancs de la mêlée. Leurs chevaux s'effondraient en grognant, rejetant par les naseaux un sang rouge vif.
D'un affleurement rocheux gris-jaune, Yesugei observait la bataille, recroquevillé dans ses fourrures.
Tel un démon rugissant sur la plaine, le vent lui glaçait la peau là où elle avait perdu sa protection de graisse de mouton. Il n'avait cependant pas l'air de souffrir du froid.
Il le supportait depuis tant d'années qu'il n'était même plus sûr de le sentir encore. C'était simplement un aspect de sa vie, comme d'avoir des hommes prêts à chevaucher sur son ordre ou des ennemis à tuer.
Force lui était de le reconnaître malgré le mépris qu'il leur vouait, les Tatars ne manquaient pas de courage. Yesugei les vit se regrouper autour d'un jeune guerrier dont il entendait les cris de ralliement emportés par le vent. L'homme portait une cotte de mailles que Yesugei voulait faire sienne.
Par ses ordres brefs, le Tatar empêchait les pillards de se disperser et Yesugei comprit que le moment était venu. Son arban de neuf hommes, les meilleurs de la tribu, frères de sang et féaux, le sentit aussi. Ils avaient gagné le précieux corselet qui les protégeait, cuir bouilli orné de la forme bondissante d'un jeune loup.
- Êtes-vous prêts, mes frères ? leur demanda-t-il en se tournant vers eux.
L'une des juments poussa un hennissement excité et Eeluk, le premier des guerriers de Yesugei, eut un petit rire.
- Nous les tuerons pour toi, dit-il en caressant les oreilles de la bête.
C’était une des grandes vérités de la vie : aussi furieux que soit un homme, il peut être intimidé par une démonstration de force. Personne, en revanche, ne peut intimider une femme en colère.
Sois prudent dans ta vie, Tolui. Je te veux fort et en bonne santé, le jour où je viendrai te chercher.
Temüdjin se rappela ce que son père lui avait dit autrefois : il n'est lien plus fort que celui qui unit les hommes qui ont risqué leur vie ensemble.
Nous sommes le peuple d'argent, les Mongols, répondit Temüdjin. Si les autres vous posent la question dites leur qu'il n'y a pas de tribus. Dites leur que je suis le khan de l'océan d'herbe et qu'ils me connaîtront sous ce nom, Gengis. Oui, dites leur. Je suis Gengis et je commence à peine ma chevauchée.
Chez toute mère, l'amour est une chose étrange et tortueuse, inaccessible à la raison.
- J'ai connu des merdes de mouton ayant plus d'honneur que toi, dit-il [...] à Eeluk.
Je suis la terre, et les os des collines, je suis l’hiver. Quand je serai mort, je viendrai à vous par les nuits les plus froides.