C'est bientôt Noël à Reykjavik et le commissaire Erlundur, éternel déprimé et solitaire, vit mal ces moments de fête.
Se réjouit-il d'avoir du boulot, lui qui passera probablement le réveillon au commissariat, devant une barquette de surgelés ? Peut-être après tout, d'autant plus que le meurtre et la victime, un ancien portier d'hôtel poignardé dans sa chambre en sous-sol, son pantalon de Père Noël sur les pieds, ont tout pour lui plaire: une situation plutôt glauque, des indices qui peuvent s'interpréter de bien des façons, des suspects potentiels nombreux et fuyants, des faux braves types et des pas si méchants que cela et surtout des secrets de famille. Plus sombres, tristes et figés que ses relations avec sa fille Eva Lind, perpétuellement entre deux cures de désintoxication et deux disputes avec son paternel qui l'énerve et lui manque.
Le lieu du crime, un hôtel, abrite évidemment des clients étrangers et des clients étranges dont les explications concernant leur présence ne satisfont pas notre enquêteur. Pour mieux comprendre, Erlundur s'installe dans une chambre et observe de l'intérieur clients et personnel. La victime surtout l'intrigue. Pourquoi, alors qu'il n'y travaillait plus pouvait-il encore résider dans l'hôtel ? Pourquoi jouait-il les Père Noël et avec qui faisait-il l'amour lorsqu'il fut assassiné, pourquoi son seul bien semble-t-il être une caisse de 33 tours de chant choral enregistrés bien des années auparavant ?
Appliquant sa méthode très personnelle que les enquêtes précédentes nous ont appris à connaître, Erlundur suit surtout son intuition sans chercher à la justifier. de rencontres fortuites en interrogatoires informels, comme en parallèle avec ses collègues, les "vrais" policiers qui récoltent les preuves, il progresse peu à peu dans la reconstruction du passé de la victime, avec l'aide inattendue et chaotique de sa fille dont la vie Underground présente parfois des avantages.
Erlundur, un peu antihéros, a quelque chose à voir avec le Wallander du regretté Mankell, par son mal être, sa solitude, ses mauvaises habitudes qui n'entretiennent pas sa forme mais aussi par ses interrogations existentielles, sur la vie en général et son pays en particulier, où le jour qui tombe si tôt écrase le moral et où le froid quasi permanent gèle les sentiments.
L'art d'
Indridason est probablement qu'avec toutes ses données plutôt tristounettes, il crée des suspens dont il est difficile de s'extraire, dessine un personnage finalement attachant et éveille une réelle curiosité pour ce bout de terre tellement rude et loin de tout. Si on aime l'auteur et son commissaire, on pourra se réjouir de savoir qu'il l'a mis en scène dans 7 volumes déjà et ce n'est sûrement pas fini !