AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Rois du monde, tome 3 : Chasse royale II, Les grands .. (39)

La robe je l'ai rêvée royale azurée,
Brocatelles bordées de broderies dorées ;
Ivresse de femme aimée, éprise et fêtée,
Ma robe de mariée !

La robe je l'ai taillée tout entretissée
D'orties et de renouées richement filées
De fierté et d'achillées, d'ardeurs avivées,
La robe de mon ainée !

La robe je l'ai cousue couleur de ciguë
Piquée de chansons pointues par pointes aiguës,
Parure tout enherbée de fleurs enchantées,
La robe de la puinée !

La robe je l'ai tramée tendrement miellée
De berceuses gazouillées, d'odes galonnées,
De lainages duvetés en douceur d'été,
La robe du dernier né !

La robe ils me la feront frottée de chardons,
Haire rêche d'abandon, rugueuse d'affronts,
Aux filasses de poussière pétries de misère,
Mon suaire de grand-mère.
Commenter  J’apprécie          80
Trois corbeaux déplumés dansent dans les halliers,
Trois chevaux dételés détalent dans le pré,
Trois puissants sangliers sautent sur le sentier.
[…]
Trois grues cendrées lancent l’air d’une lente transe,
Trois feux manigancent mille ordes médisances,
Trois ours en male errance exercent leur vengeance. (p. 249.)
Commenter  J’apprécie          30
Repousser ses morts , ce n'est pas vivre sa vie...
Commenter  J’apprécie          20
"En cette fin de voyage, j'aborde d'autres confins que ceux du royaume d'Articnos: les marges de la guérison. Ces jours délicieux où le corps respire, où le retour du bien-être alanguit les membres comme la plus légère des griseries. Quand le mal cède, quand la douleur recule, la chair lasse devient un réceptacle de paresse qui s'étourdit d'exister. Sans doute est-ce l'effet de la convalescence: les menaces qui planent sur moi demeurent inconsistantes. Fidèle et obstinée, la vie irrigue à nouveau mon corps, dilue toutes les angoisses, engourdit même la dureté du deuil."
Commenter  J’apprécie          20
Avant la traversée du Locu par le héros. Je cite la description pour le style:
"Devant nous, la berge agréablement arborée vient se baigner dans une onde paisible; saules et aulnes mirent leurs parures au fil du courant. En revanche, par-delà la rivière, l'autre rive offre au regard un territoire largement dévasté. Les bois ont été abattus sur une aire très étendue; le terrain, bouleversé, est grêlé de trous et de fosses; certaines tranchées, fort longues, zigzaguent en suivant le serpentement d'un filon. Partout, la pluie a raviné talus et déblais en ruissellements rougeâtres, a étalé de larges coulées de boue que le pied des hommes comme l'ongle des boeufs ont abondamment repétries. La berge elle même n'est qu'un immense dépotoir, où versent d'énormes glissements de gravats. Au bas de ces éboulis, des hommes et des enfants nus, plongés dans la rivière jusqu'à la taille, débourbent le minerai au fond de récipients grossiers. Ils obscurcissent le courant de gros bouillon argileux, qui se diluent vers l'aval en lavures ocrées. Plus loin, en haute rive, des palissades qu'ensevelissent à demi les ferriers nous dissimulent un village d'artisans et ses fourneaux."
Commenter  J’apprécie          20
Elle hésite, vibrante, semblable au chevreuil qui vient de flairer l’approche du loup.

« Ne t'en fais pas, petite. Je ne te ferai pas de mal. j‘ai des filles qui ont presque ton âge. »

Ces mots n’ont pas l’effet escompté. Certes, la gamine ne décampe pas; mais la voici qui se penche pour ramasser des pierres. Le premier projectile, lancé sans précision, se perd dans le fossé. Le deuxième, mieux ajusté, ricoche contre le poteau un peu au-dessus de ma tête.

« Eh ! Qu'est-ce que tu fais ? Tu vas offenser les Gardiennes ! »

Je me crois astucieux en jouant sur sa piété plutôt qu’en lui reprochant de frapper un prisonnier. En me touchant dans les côtes, un troisième caillou a tôt fait de me détromper. Ce n’est guère qu’une pichenette, mais le coup est cuisant pour mon amour-propre. Me faire caillasser par une morveuse ! J’en oublie toute mesure et je me rue en avant, tirant inutilement sur mes chaînes.

« Putain ! Sale petite teigne je vais te décoller la tête des épaules ! »
Commenter  J’apprécie          20
Dès lors, tu dois te demander pourquoi je te parle, à toi, de ma captivité. Peut-être parce que tu es un étranger : cela me rend les choses moins difficiles. Sans doute parce qu’avec les ans, j’ai fini par acquérir un vernis de sagesse. On n’est pas seulement un héros les armes à la main. Pour forger une bonne lame, il faut la fondre et puis il faut la tremper. Cela la rend deux fois plus solide, parce que cela rajoute la souplesse à la dureté. Après le feu, il me faut donc raconter l’eau. Ma captivité a été une trempe. J’aurais pu m’y noyer ; j’en suis sorti, non pas plus fort, mais plus complet. Je suis resté un homme, dans la défaite comme dans la victoire. J’ai su faire ce que mon père avait refusé d’accomplir.
Dans un certain sens, je finis par l’admettre, c’est l’esclave qui a fait le roi.
Commenter  J’apprécie          20
Avec n’importe qui d’autre que mon frère, j’aurais refusé la reddition. Je me serais fait tuer. Même avec Ségovèse, je n’ai pas vraiment eu conscience de me rendre. J’ai plutôt fait la paix avec lui. Ou disons une trêve, pour partager le poids du deuil. Mais derrières Segillos, il y avait pour le moins trois cents héros hostiles ; et parmi eux, nombreux étaient ceux qui avaient perdu un ami ou un parent dans les combats de la veille. Autant de dire que ceux-là, ils n’ont pas pactisé avec moi. Les plus féroces ont vu dans ma capture l’occasion de me supplicier avec des raffinements de cruauté. La plupart désiraient tout simplement ma mort, le plus vite possible, pour se lancer ensuite dans la traque de mon oncle.
Ce matin-là, ma capture a donc bien failli sceller mon destin.
Des années durant, je me suis gardé de raconter cet épisode de mon existence. Cela s’accordait plutôt mal avec l’autorité que j’avais acquise ; un héros tue ou est tué. Mais se rend-il ? Comment peut-il accepter le joug ? Comment concilier le roi d’aujourd’hui avec le captif d’hier ? J’ai tout fait pour étouffer ce souvenir. Dans leurs éloges, mes bardes font l’ellipse sur cette période. Non qu’ils mentent par omission : ils ignorent ce qui m’est réellement arrivé. Je n’ai laissé filtrer que quelques allusions à propos de ma rencontre avec Prittuse ; la flagornerie et l’imagination s’en sont emparées et l’ont travestie en un duel entre le guerrier et la magicienne. Ce conte a fini par participer à ma gloire. Il prépare en quelque sorte l’autre légende, bien plus véridique, celle qui raconte comment j’ai terrassé l’invocateur de foudre, Avile Amthura. Et dans un sens, c’est vrai, j’ai affronté Prittuse et je l’ai vaincue, après avoir été très près de me perdre… Mais les péripéties qui sont chantées pendant mes banquets ne sont que sottises. J’aurais été bien en peine de défier l’enchanteresse les armes à la main, parce que je me trouvais doublement lié : j’étais son prisonnier et je demeurais sous le coup de l’interdit qui m’empêchait de faire violence aux femmes.
Commenter  J’apprécie          10
La roue tourne. Elle ne demeure jamais immobile. Enfant, j'ai été prisonnier. Ensuite, j'ai été héros combattant. Me revoici prisonnier. L'épreuve me rappelle une leçon enseignée pat l'exemple de ma mère : pour sauvegarder sa fierté dans les chaînes, il faut sans doute plus de courage que pour conserver son sang-froid dans la mêlée. C'est dans la défaite bien plus que dans la victoire qu'il convient de déployer de la grandeur pour demeurer fidèle à soi-même. Mais si tu parviens à garder la tête haute, qu'importent les métamorphoses que t'imposent les caprices des dieux ! Il ne s'agit que d'un remous au fil du fleuve de nos existences.
Commenter  J’apprécie          120
La roue tourne. Elle ne demeure jamais immobile. Enfant, j'ai été prisonnier. Ensuite, j'ai été héros combattant. Me revoici prisonnier. L'épreuve me rappelle une leçon enseignée pat l'exemple de ma mère : pour sauvegarder sa fierté dans les chaînes, il faut sans doute plus de courage que pour conserver son sang-froid dans la mêlée. C'est dans la défaite bien plus que dans la victoire qu'il convient de déployer de la grandeur pour demeurer fidèle à soi-même. Mais si tu parviens à garder la tête haute, qu'importent les métamorphoses que t'imposent les caprices des dieux ! Il ne s'agit que d'un remous au fil du fleuve de nos existences.
Commenter  J’apprécie          40






    Lecteurs (820) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Jean-Philippe Jaworski pour les nuls

    Il a mon âge ! Il est né en...

    1939
    1969
    1999

    10 questions
    110 lecteurs ont répondu
    Thème : Jean-Philippe JaworskiCréer un quiz sur ce livre

    {* *}