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Lire Charles Juliet était un projet vague, qui refaisait surface à chaque évocation médiatique ou à chaque partition de l'auteur. le prix France-Télévision m'a permis ce passage à l'acte. Sans regret. L'écriture reflète bien l'image que renvoie le personnage, discret, presqu'effacé. le journal est intime mais sélectif. Pas d'allusion au quotidien , très peu à son entourage proche qu'il désigne par des initiales. C'est plutôt le récit des rencontres nombreuses, fortuites ou professionnelles, dont il analyse les ressentis, et les émotions suscitées.
Bien sûr la poésie est en filigrane à chaque page, la sienne, celle des autres.
C'est aussi une béquille pour les souvenirs, qui ne prend sens qu'a postériori :

« À 15 ans, J'ai commencé à tenir mon Journal, je ne savais rien de ce qui me poussait à l'écrire. Bien des années plus tard, j'ai compris qu'écrire, c'est mener un combat contre le temps et la mort. c'est oeuvrer pour que subsiste la trace de ce que je vis. »

C'est aussi le lieu de dépôt de réflexion philosophique, et d'une recherche de spirituel.

La langue est raffinée, maniée avec une précision d'orfèvre,  mais sans ostentation. Et la délicatesse qui convient lorsqu'on aime l'outil :


«  Ecrire pour un écrivain, c'est avoir le goût des mots, c'est les ressentir, c'est aimer les agencer, c'est percevoir comment ils interagissent les uns sur les autres, c'est être à même d'apprécier leur poids, leur couleur, leur sonorité, leurs vibrations… »

Ce journal est rédigé alors que l'auteur est dans sa septième décennie, c'est l'heure des bilans, et de la fin de l'illusion de trouver une réponse aux questions fondamentales. et une thérapie par l'écriture. Regrets, ou acceptation? le titre est tout de même gratitude, et l'éponge n'est pas jetée .:

«  Ecrire c'est pour moi tendre à l'intemporel, c'est vouloir parvenir à un texte inaltérable, qui idéalement, pourrait résister au temps, à ce pouvoir qu'il a de tout détruire. Je sais qu'il engloutira ce que j'écris , mais il ne pourra pas me détourner de mener mon combat, et de le mener avec ténacité. « 
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Ouvrir ce Journal, c'est retrouver un ami. Cette impression que j'ai toujours ressentie en feuilletant les précédents tomes est peut-être due au fait que Charles Juliet nous invite à partager ses pensées intimes, à faire un bout de chemins avec lui au fil de ses songes, de ses rencontres. Je l'imagine qui arpente les rues de son quartier lyonnais, qui se remplit de regards, de ces vies qui pourraient n'être rien mais qui resteront parfois gravées, comme cet homme trouvé un jour en bas de son immeuble, dormant contre la porte. Plus qu'une radiologie de son âme, Charles Juliet se fait le photographe des inconnus croisés au hasard des jours, de ceux qui sont venus à sa rencontre pour témoigner de leurs souffrances, de leur reconnaissance aussi. Car un écrivain qui sait mettre des mots sur ces maux intérieurs, invisibles, qui rongent parfois, qui enchaînent et empêchent d'avancer, c'est quelqu'un qui a su dire ce qu'on ne saurait que souffrir et porter comme un fardeau. Les écrire l'a libéré, les lire donne un sens à notre vie. Cet écrivain, on a envie en effet de le remercier, car il ne met pas un mot après l'autre juste pour "faire de la littérature", mais aussi pour donner sens, c'est à dire rendre au langage sa fonction première. Son journal s'enrichit comme toujours d'échanges artistiques, de souvenirs de voyages et de réflexions philosophiques, de citations. C'est amusant, au moment où j'écris, j'imagine que l'ensemble des tomes (dont il faudra, Monsieur Juliet, un X, un XI et un XII afin d'égaler les saisons!) pourrait être publié un jour dans une magnifique reliure cuir épaisse. Un énorme livre, comme ceux qu'on voit ornés de reliures médiévales. Un livre de sagesse...
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Je ne sais pour quelle mystérieuse raison j'ai attribué en son temps deux étoiles à lambeaux, ce ne devait pas être le moment. Il faudra que je le relise pour réviser ma copie. Mais une sympathique babeliaute m'a amené à revoir mon point de vue sur Charles Juliet et m'a proposé cette lecture qui fut une belle découverte.
Que serions-nous sans nos blessures nous dit-il dans ce journal ? Il est vrai qu'il a eu sa dose, mais son parcours de vie nous invite, non pas à rejeter notre passé car il est constitutif de notre identité mais à le tenir à distance. Travailler sur soi pour dépasser les traumatismes de l'enfance, se libérer de ce qui nous enferme et grandir de cette expérience est la leçon que je tire de cet ouvrage. A travers de nombreux portraits, d'artistes, de gens de la rue croisés brièvement, en nous faisant partager ses lectures, l'auteur nous invite à la vie, à la culture, à la simplicité dans l'écriture.
J'ai découvert un auteur très attachant, empreint d'humilité, il m'a donné envie de lire ou de relire Camus, Mauriac ou Krishnamurti.
La vie n'est pas un long fleuve tranquille et il faut du temps pour devenir jeune nous dit-il paraphrasant Picasso et surtout je retiens cette belle phrase : il ne faut jamais demander son chemin à quelqu'un qui le connaitrait, on pourrait ne pas s'égarer.
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Ce Journal de Charles Juliet couvre la période de 2004 à 2008, il fait suite à "Apaisement" paru en 2013. C'est un recueil de notes écrites au jour le jour, recueil de ses souvenirs, de ses rencontres avec des anonymes, des écrivains et des artistes célèbres, des professeurs et des lycéens. Il évoque aussi ses observations de passants, des histoires d'anonymes impliqués dans des faits divers... Il parle également de ses lectures, de sa passion pour la littérature, la peinture et l'art en général, en particulier de sa proximité avec Cézanne, passion qui l'a aidé à traverser des périodes difficiles de sa vie. Son travail d'écriture est aussi largement évoqué nous faisant entrevoir un homme plein de doutes.

Charles Juliet évoque de multiples contacts avec des lecteurs à l'issue de rencontres, contacts brefs et intenses au cours desquels ces inconnus lui confient des éléments intimes de leur vie qu'il relate au long de ce journal en respectant leur anonymat. Dans un premier temps j'ai été étonnée par la proximité qu'il entretient avec ces lecteurs qui lui confient ainsi spontanément des tranches de vie en général tragiques mais, au fil des pages, j'ai compris cette proximité en découvrant la personnalité de Charles Juliet, un homme tourné vers les autres, toujours attentif à l'autre, profondément empathique avec l'autre, un homme d'une grande humanité dont l'intérêt porté aux autres est impressionnant ainsi que la capacité à percevoir leur souffrance "Je me suis senti proche. J'avais pressenti qu'un problème avait dû assombrir son enfance." "J'ai lu de la souffrance dans ses yeux et le temps d'un éclair, je l'ai violemment aimée."

Les blessures qui nous construisent, les épreuves qui enrichissent me sont apparues comme le fil conducteur de son journal dans lequel il cite la phrase d'un de ses amis poètes : "Qui serions-nous sans nos blessures ?" Dans une sorte de quête intérieure, il évoque son enfance, l'internement de sa mère alors qu'il n'a que quelques semaines, son placement dans une famille de paysans à l'âge de trois mois, la disparition de sa mère sept ans plus tard dans des circonstances dramatiques, son départ à douze ans pour une école militaire, la solitude dont il a longtemps souffert et le chemin intérieur parcouru pour dépasser sa souffrance. C'est un homme tourné vers les autres mais aussi vers la vie qui proclame son amour porté "aux humains, aux animaux, à la nature, à la vie dans son ensemble". Un homme animé d'une grande vitalité malgré son grand âge et d'une volonté inaltérée d'acquérir sans cesse de nouvelles connaissances.

Charles Juliet nous livre ses réactions, ses pensées, ses sentiments face à des faits simples relatés dans un désordre qui pourtant ne manque pas de cohérence. Il développe sa réflexion, ses questionnements et nous donne sa vision du monde. Et surtout il souligne l'importance de travailler à la connaissance de soi pour conquérir notre liberté.

" Se connaître, c'est dépasser un inévitable égocentrisme, se donner une assise, conquérir une liberté et une force intérieures qui permettent de ne pas juger et de ne pas se laisser déstabiliser."

" Chacun doit intervenir en lui-même pour éliminer ce qui l'entrave, le retient, l'empêche d'être lui-même. "

Je l'ai trouvé également très honnête dans l'analyse qu'il fait des difficultés qu'il rencontre dans l'écriture qui est plus tourment que plaisir pour lui, il fait preuve dans ce domaine d'une grande humilité mais aussi d'un manque de confiance en lui très touchant. " Au fond ma difficulté à écrire m'a servi. Je peine à extraire les mots de ma nuit, je peine à les organiser, à leur trouver leur juste place dans la phrase qui s'élabore, mais pendant que j'hésite et tâtonne, ma substance coule en eux, les charge de ce qu'ils ont à exprimer."

A la fois regard intérieur mais aussi regard sur l'autre et regard sur son travail d'écriture, ce journal est tout sauf nombriliste, je n'y ai relevé aucune impudeur. Il révèle un homme simple, sincère, curieux de tout et très humble qui n'émet jamais aucun jugement. Ce journal qui relate souvent des faits tragiques n'est pourtant pas triste, je l'ai trouvé au contraire assez lumineux et apaisant. Charles Juliet parle souvent de son obsession du mot juste, "du parler clair", il en ressort une écriture précise et limpide, un style très épuré qui rend la lecture très agréable. Si style est très clair, sa pensée l'est également, l'assimilation de ses réflexions ne demande aucun effort. Charles Juliet sait aussi manier l'autodérision quand il raconte avec quelle naïveté il est tombé dans une arnaque qui lui a fait vider une partie de son compte en banque par excès de compassion envers un faux vendeur de blousons soit-disant sans un sou. Un livre profond et passionnant, une lecture qui ressource et nourrit intelligemment.
Une très belle découverte, la rencontre avec un grand et bel homme dont j'ai envie maintenant de découvrir l'oeuvre.

Ce titre fait partie de la sélection du Prix Essai France-Télévisions 2018.
Lien : https://leslivresdejoelle.bl..
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Tout d'abord signaler que j'étais en pleine lecture de ce journal quand j'ai appris le décès de l'éditeur... Je ne le connaissais bien sûr pas personnellement, mais tous les livres découverts chez lui au fil des années m'ont plu.

Au fil du temps, les titres des Journaux de Charles Juliet semblent vraiment coller à sa vie. Après Apaisement (on est loin du premier, Ténèbres en terre froide!) voici Gratitude, dont j'apprends en fin de volume que le texte a été envoyé à l'éditeur fin 2016. Il reste à souhaiter encore plein de jours à l'auteur et attendre le prochain volume!

"Gratitude, c'est le mot qui me vient quand je considère la vie que j'ai eue. Car la chance, à plusieurs reprises, a été avec moi, si bien qu'elle a déterminé mon destin : maman Ruffieux et sa famille, les enfants de troupe, ma rencontre avec M.L., la rencontre avec P.O.L... Aussi, lorsque je songe à tous ceux -amis, parents, sages, mystiques, écrivains, poètes, peintres, artistes, jazzmen, chanteurs, chanteuses...-, à tous ceux qui m'ont tant apporté, je suis éperdu de reconnaissance."

Comme d'ordinaire, Charles Juliet parle de rencontres, d'adaptations de Lambeaux, de sa vie. Des personnages connus apparaissent, mais aussi des anonymes, avec lesquels souvent le courant est passé, qui se sont confiés, des personnes aux blessures, souvent d'enfance, encore saignantes, parfois refermées. Une impression de simplicité, de plénitude, sans chichis ni recherche de style. Sans masque, tout en gardant pour soi ce qu'il convient, respectant les anonymats quand c'est nécessaire, même si l'on prend plaisir à retrouver des noms, par exemple lors de cette visite dans une librairie de Tours.

"Ce n'est pas parce qu'on ne peut tout dire dans un journal que la véracité de ce qui s'y trouve écrit doit être remise en cause."

Un passage du Talmud: "Il ne faut jamais demander son chemin à quelqu'un qui le connaîtrait, on pourrait ne pas s'égarer."

"A une lycéenne

Si tu veux écrire un poème
surtout surtout
ne cherche pas
à faire de la poésie
laisse-toi simplement
traverser par les mots
qui te viennent.
Ce que tu sens ce que tu ressens
cette brume qui veut
prendre corps
laisse-là s'épancher
sur la page
Surtout n'enjolive pas
ce qui t'est donné
Tiens-toi au plus intime
au plus vrai de toi-même
et les vers apparus
deviendront ces pépites
que les chercheurs de vie
aiment à trouver
au creux de leur tamis.

Lien : http://enlisantenvoyageant.b..
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Je lis son journal depuis le début. Ce qui m'épate au fil du temps, c'est l'évolution vers plus de légèreté. le chroniqueur accroche son écriture au réel constitué de rencontres, de réflexions, d'émotions, de doutes. Rien n'est anodin, le moindre événement peut faire sens. J'aime bien les rencontres avec les artistes, avec des inconnus apparemment sans histoires. Il y a des thèmes récurrents, toujours neufs sous le regard du moment : l'enfance, la littérature, la connaissance de soi. À prendre, à apprendre et à reprendre.


Lien : http://cinemoitheque.eklablo..
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Toujours très agréable à lire l'écriture de Charles Juliet...
Les commentaires qui sont sur ce site sont extrêmements bien écrits et ressentis...
Je ne peux donc que conseiller ce livre qui comme toujours appaise le lecteur... le déleste de ses soucis...
Charles Juliet a l'art de faire raisonner en nous sa musique intime... ce retour sur soi... et nous aide à nous recentrer sur l'essentiel de notre vie.

Cet homme humble, aimant et sage nous veut que du bien.

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Mais qu'est-ce qu'on attend pour parler de ce grand écrivain poète français si talentueux et si modeste à qui rien ne fut épargné dans sa jeunesse et qui s'en est tiré grâce à l'écriture, grâce à la relation avec ses pairs, les artistes, grâce à son amour, sa passion pour la vraie littérature, grâce à Camus .. Mais qu'est-ce qu'on attend pour lui rendre les honneurs qui lui sont dus : qu'il casse sa pipe ? Vraiment je ne peux comprendre ce relatif manque d'attention à l'égard d'un homme d'une humilité touchante, d'une grande sensibilité dont l'oeuvre majeure ne trouve de manière fort injuste pas plus d'écho que ça. Lui qui projette un regard si vrai, si lucide sur la difficulté d'écrire, je l'entends encore parler admirablement de Pessoa à la radio, avec une modestie exemplaire, alors vraiment on peut parler un peu de lui maintenant ..
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Ce livre est pour moi plus un journal. J'ai eu dû mal à comprendre où Charles Juliet voulais nous conduire, peut être à partager sa route... nous inviter à découvrir les rues de son quartier lyonnais. Il désirait peut être tout simplement nous apprendre à observer les passants, les regards,....
Il m'a manqué juste un quelque chose qui fait que ce livre est arrivé 2e après 3 votes au prix littéraire d'essai de France Télévision 2018. Pardon Monsieur Juliet de ne pas avoir eu la petite étincelle pour être Lauréat.
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