18 février 1960 : Il est des êtres qui cultivent une apparente difficulté de vivre à seule fin de se croire supérieurs à ceux que ces tourments épargnent. Mais pourquoi celui qui souffre et cherche, devrait-il s’estimer supérieur à celui qui ni ne souffre, ni ne cherche ? Face à la vie, nous sommes tous des infirmes, et nul n’est fondé à se croire supérieur ou inférieur à quiconque.
Écrire, c'est soutenir le face à face avec l'insoutenable, s'acharner sa vie durant à creuser un seul et même petit dérisoire sillon. C'est une entreprise surhumaine d'une grandiose humilité. Et moi, condamné à mon sillon, je serai heureux le jour où je pourrai me comparer à un bœuf de labour, où j'aurai un peu de sa lenteur, son obstination, sa puissance.
Nous n'appréhendons un être qu'à travers ce que nous sommes, et inconsciemment, nous nous projetons en lui, lui supposons ce que nous trouvons en nous-même. Cette stupéfaction lorsque nous découvrons qu'il n' est rien de ce que nous imaginons qu'il est.
27 octobre 1959 : Si vivre, c’est recherche l’être, comment considérer la vie de la plupart ? Leur besoin de sécurité et de toujours plus grande sécurité ? Ils amassent, amassent, ignorant qu’ils sont promis au trou.
« A Aix, j’ai souvent envisagé de tuer pour me venger des humiliations subies, mais je m’en suis abstenu, car je savais qu’un crime n’aurait rien modifié. Ce dont je rêvais, c’était d’un acte de révolte qui n’eut cessé de perpétrer ses conséquences à la fois dans le temps et l’espace. Faute d’avoir su imaginer un tel acte, je n’ai jamais cherché à exprimer ma révolte. »
Journal I de Charles Juliet, le 2.12.1958
« Oui, toute révolte qui s’exprime est puérile, parce que d’un effet limité au temps et à l’espace, alors que ce qui la suscite est d’essence éternelle. Mieux vaut la garder dans ton sang, et la laisser te brûler. C’est elle qui te donnera la force de reprendre le combat quand tu n’en auras pas l’énergie. »
Journal I de Charles Juliet, le 4.12.1958 – 24 ans
Avec Marc Alexandre Oho Bambe, Nassuf Djailani, Olivier Adam, Bruno Doucey, Laura Lutard, Katerina Apostolopoulou, Sofía Karámpali Farhat & Murielle Szac
Accompagnés de Caroline Benz au piano
Prononcez le mot Frontières et vous aurez aussitôt deux types de représentations à l'esprit. La première renvoie à l'image des postes de douane, des bornes, des murs, des barbelés, des lignes de séparation entre États que l'on traverse parfois au risque de sa vie. L'autre nous entraîne dans la géographie symbolique de l'existence humaine : frontières entre les vivants et les morts, entre réel et imaginaire, entre soi et l'autre, sans oublier ces seuils que l'on franchit jusqu'à son dernier souffle. La poésie n'est pas étrangère à tout cela. Qu'elle naisse des conflits frontaliers, en Ukraine ou ailleurs, ou explore les confins de l'âme humaine, elle sait tenir ensemble ce qui divise. Géopolitique et géopoétique se mêlent dans cette anthologie où cent douze poètes, hommes et femmes en équilibre sur la ligne de partage des nombres, franchissent les frontières leurs papiers à la main.
112 poètes parmi lesquels :
Chawki Abdelamir, Olivier Adam, Maram al-Masri, Katerina Apostolopoulou, Margaret Atwood, Nawel Ben Kraïem, Tanella Boni, Katia Bouchoueva, Giorgio Caproni, Marianne Catzaras, Roja Chamankar, Mah Chong-gi, Laetitia Cuvelier, Louis-Philippe Dalembert, Najwan Darwish, Flora Aurima Devatine, Estelle Dumortier, Mireille Fargier-Caruso, Sabine Huynh, Imasango, Charles Juliet, Sofía Karámpali Farhat, Aurélia Lassaque, Bernard Lavilliers, Perrine le Querrec, Laura Lutard, Yvon le Men, Jidi Majia, Anna Malihon, Hala Mohammad, James Noël, Marc Alexandre Oho Bambe, Marie Pavlenko, Paola Pigani, Florentine Rey, Yannis Ritsos, Sapho, Jean-Pierre Siméon, Pierre Soletti, Fabienne Swiatly, Murielle Szac, Laura Tirandaz, André Velter, Anne Waldman, Eom Won-tae, Lubov Yakymtchouk, Ella Yevtouchenko…
« Suis-je vraiment immortelle, le soleil s'en soucie-t-il, lorsque tu partiras me rendras-tu les mots ? Ne te dérobe pas, ne me fais pas croire que tu ne partiras pas : dans l'histoire tu pars, et l'histoire est sans pitié. »
Circé – Poèmes d'argile , par Margaret Atwood
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