Après avoir dévoré (et être restée un peu mitigée) "
Les visages" de
Jesse Kellerman, j'ai enchaîné avec "
Beau parleur".
Une des premières choses qui m'a sauté aux yeux (surtout en lisant entretemps le résumé de "
Jusqu'à la folie", que je comptais lire juste après "
Beau parleur") est que la trame de départ, de construction même, de ses romans semble être toujours la même pour
Jesse Kellerman : il choisit un héros, assez banal (du moins au début de l'histoire), spécialisé dans un domaine (art, philosophie, médecine...), et le place dans une situation qui va peu à peu l'obséder, le torturer psychologiquement au point de le changer profondément. C'est bien sûr plus ou moins le schéma type de bon nombre de romans, mais chez Kellerman, c'est très (trop ?) net. Presque trop scolaire. Ca n'enlève rien à la qualité de ses récits par ailleurs, et c'est peut-être le problème d'avoir enchaîné sans répit la lecture de ses différents romans, mais c'est toutefois un point qui m'a interpellée et un peu dérangée.
Mais passons, là n'est pas l'essentiel de la critique de cet ouvrage.
Car en plus, très sincèrement, j'ai adoré ! Plus encore que "
Les visages" (pourtant pas mal dans son genre, quoique inachevé à mes yeux), "
Beau parleur" m'a séduite par son cadre (la demeure, les ambiances...), par le récit de ce jeune homme qui choisit de converser avec cette vieille dame. Peu commun, intriguant, on est quasiment dans un huis-clos, et moi qui adore cela, j'ai été délicieusement servie !
Bien sûr, on sent venir le drame de ce récit, le noeud du problème. Mais ça n'empêche pas le lecteur de suivre avec empathie chaque émotion du héros. Et chapeau bas pour le style de Kellerman quand son récit passe soudainement de la première à la troisième personne sur une scène cruciale : le choix est pertinent, efficace, et marque les esprits.
J'ai été vraiment emballée par ce récit, qui garde en haleine, joue avec le bon dosage sur nos nerfs... mais une fois de plus, quelle déception que cette fin ! J'en attendais plus de subtilité, et surtout une meilleure trouvaille (purement psychologique) : là, on a l'impression que Kellerman a choisi la facilité, et je trouve cela très dommage, d'autant qu'il tenait un véritable ressor narratif, puissant et oppressant, avec la culpabilité que ressent son héros (il aurait dû jouer là-dessus jusqu'au bout).
Ce roman est donc dans l'ensemble un excellent récit, qui peut plaire pour son ambiance et la profondeur psychologique de son héros, ainsi que pour son récit bien ficelé... mais qui peut décevoir pour sa fin malheureusement pas aussi aboutie que le reste de l'ouvrage.