AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,55

sur 31 notes
5
2 avis
4
5 avis
3
1 avis
2
0 avis
1
0 avis
Souvenir brûlant comme du vif argent : celui d'avoir découvert au milieu des années 1980 - quelques mois avant cette lecture - une magnifique adaptation cinématographique de ce roman par sa compatriote Türkan Soray... lors d'une émission télévisuelle qui devait se nommer "Cinéma sans frontières"...

Choc d'un film fascinant, âpre et vertigineux.

Son "motif" ? En "Anatolie profonde", un pré-adolescent (presque encore un gamin) est poussé à tuer sa propre mère... "Pour laver l'honneur", comme on dit... "Fatum" pesant sur deux paires d'épaules : ce poids indicible du "On-Dit" et du "Tu-Dois..."

Apparaissaient aussi ces quelques mots dans le générique de fin : "D'après le roman de Yachar Kemal"...

Eh bien, qui était cet écrivain ? Il nous fallait découvrir ce romancier...

Yachar Kemal (en turc : "Yaşar Kemal", de son vrai nom "Kemal Sadık Gökçeli") : nom résonnant comme l'épée contre l'enclume, aussi fascinant qu'énigmatique .

Romancier, conteur et journaliste turc, d'origine kurde, né en 1923 dans le village de Hemite près d'Osmaniye en Cilicie (Anatolie) : sa famille ayant émigré dans la plaine dite de la "Tchoukourova" ("La plaine creuse") qui formera le cadre de bon nombre de ses premiers romans ; Istanbul étant le cadre de ses plus récents.

Il est sans doute le "père de la Littérature turque" (moderne) et un redoutable "homme de gauche" (1 année de prison en 1950 pour "activités communistes") ; voir par ailleurs la couverture turque de son premier "Mèmed", histoire d'un bandit d'honneur révolté contre l'injustice, se résolvant à dépouiller les riches pour rendre ce qui a été dérobé aux pauvres...

Ce vertigineux romancier à la langue lyrique si particulière, inimitable, est l'héritier direct du "savoir-conter" des Achik (ces bardes itinérants anatoliens)...

Il a contribué, tout comme son "collègue" Orhan Pamuk, à faire resurgir - enfin - des brumes de l'oubli nationaliste "kémaliste" puis "erdoganiste" le lourd passé génocidaire en terre turque (Massacre des Arméniens... ) : une question jusqu'alors tabou.

Yachar Kemal obtint en 1982 le Prix mondial "Cino del Duca" pour l'ensemble de son oeuvre.

Mais relisez donc attentivement, à propos de "Tu écraseras le serpent" [« Yılanı öldürseler », 1976] , la très belle critique babéliote de notre ami andreas50 : il vous dit l'essentiel sur ce drame que vont vivre page après page, le très jeune Hassan et sa jeune mère Emsé...

Vif souvenir de lecture de ces pensées funèbres d'enfant solitaire, tournoyant silencieusement comme papillons puis bourdonnant soudain comme des mouches sous le soleil meurtrier de l'Anatolie, dans les hauteurs du Taurus par-dessus la "plaine creuse" de Tchoukour-ova, chère au coeur du barde Kemal...

Ce roman fut - comme la plupart des autres romans de Y. Kemal - magistralement traduit du turc en français en 1981 par la talentueuse Münevver Andaç pour le compte des éditions Gallimard.

*******************************************

+++ NOTE IMPORTANTE : ici sur Babelio, vous pouvez utilement consulter notre "LISTE Yachar KEMAL", qui est la 5ème associée ci-dessous à cet immense écrivain. Elle est intitulée " Yachar KEMAL (Kemal Sadık Gökçeli : 1923-2015) : une vie, une oeuvre - en 30 ouvrages traduits en français". Il s'agit d'un petit travail de synthèse qui vous présentera - par ordre chronologique - pratiquement l'ensemble de son oeuvre romanesque, "essayiste" et politique passionnante.
Lien : http://fleuvlitterature.cana..
Commenter  J’apprécie          280
Même s'il a des qualités indéniables, j'ai été perturbé par ce roman. Mais avant d'en parler, premier élément, l'éditeur aurait pu se dispenser de tout raconter sur la 4ème de couverture ! Question de tuer le suspense, ça fonctionne à merveille.

L'intrigue est simple, et classique, dans les deux sens du terme. Nous sommes dans un village turc situé près des ruines de l'Anavarza, près d'Adana. Une très belle femme, Esmé, a été mariée de force à Halil...alors qu'elle a toujours aimé Abbas, l'amant qui vient rôder près de la maison toutes les nuits. Un jour, il tue Halil. Si les frères de la victime le tuent à son tour, cela ne suffit pas aux yeux de la mère d'Halil à le venger : Esmé étant responsable doit être châtiée. Si la fratrie d'Halil et une bonne partie du village appellent à la mort de la putain, personne n'a le courage de passer à l'acte, les hommes étant peu "courageux" et comme ensorcelés par la beauté de cette femme. La vieille voit alors en Hassan, le fils d'Halil et d'Esmé, le seul capable d'assassiner sa mère.

Hassan est écartelé entre son amour pour sa mère et le désir de venger son père, qui bientôt vient le harceler en prenant la forme d'un revenant et de toutes sortes de bêtes, notamment d'un serpent pour crier sa souffrance : seule la vengeance le délivrera de ses tourments. Hassan est fiévreux, comme fou, arpentant ces collines, fuyant, revenant, allant aux nouvelles des on-dit des villageois...et sa grand-mère quasi-muette mais maligne ourdit toujours sa vengeance...

Ce roman est oppressant, car on se demande longtemps quand Esmé sera tuée, son sort paraît scellé d'avance, par qui, comment...oppressant aussi par ce fantôme d'Halil qui revient, par la personnalité finalement peu sympathique de Hassan, "héros" bien inquiétant, instable et influençable, par la grand-mère calculatrice et obsédée par la vengeance...même Esmé ne parvient pas à nous convaincre de l'aimer, car elle a fauté, et peut-être faute-t-elle encore ?
Oppressant aussi par la survenue du fantastique, du rêve, des superstitions...

Il n'y a donc pas de personnage vraiment net et positif dans cette histoire, c'est une sorte de tragédie grecque, un drame shakespearien...avec une tension et une folie qui montent, parfois entrecoupées d'étranges moments de calme, lorsque les villageois à plusieurs reprises semblent oublier, se désintéresser de l'affaire, avant que les dernières pages nous entraînent jusqu'au paroxysme meurtrier.
Pour cela, ce court roman est une réussite, et le style est enlevé, l'écriture de bonne qualité.

Mais encore une fois, l'issue est sans doute trop prévisible et trop annoncée, dommage, ça gâche un peu le plaisir !
Je me suis aussi demandé si cette histoire pouvait traduire l'essence de l'âme turque, avec ce sens de l'honneur très développé, un esprit de vengeance...ça m'a perturbé, c'est une face un peu sombre...
Commenter  J’apprécie          191
Avec ce petit roman, j'ai été plongée dans un univers bien éloigné du nôtre, mi-effrayant, mi-merveilleux. Un monde où règne la tradition de la vengeance du sang versé. C'est une histoire de manipulation, de conspiration qui va aboutir à un assassinat. Ca ressemble à une tragédie grecque.Un fils doit tuer sa mère pour délivrer l'âme de son père…

Un univers où on voit des spectres, où on dialogue avec les morts, où les hirondelles et les aigles côtoient les serpents et les fantômes, où un homme assassiné apparaît aux autres dans la peau d'un chien ou d'une sauterelle.

Et puis pour finir, il reste à parler de la construction du roman. L'auteur ne suit pas la chronologie des événements, on va et vient dans le temps, comme on erre dans les montagnes ou dans l'esprit du jeune Hassan qui ne sait plus où il en est. Pour notre plus grand plaisir !
Lien : http://krol-franca.over-blog..
Commenter  J’apprécie          102
Cilicie (Turquie), période indéterminée entre les années 1940 et 1970. le père de Hassan a été assassiné par Abbas, l'amant de son épouse Esmé. En représailles, Abbas est rapidement appréhendé et tué par les frères de la victime. Mais la grand-mère réclame encore justice : la jolie Esmé doit payer de sa vie. Tandis qu'un de ses beaux-frères lui conseille de fuir, la jeune femme ne peut se résoudre à abandonner son fils. le petit Hassan est écartelé entre son amour pour sa mère et les injonctions incessantes, lancinantes de sa grand-mère, de ses oncles paternels et des villageois qui le poussent à la revanche.
Pas toujours simple à lire au début, en raison des va-et-vient chronologiques, ce petit roman est dur, intense. Il a parfois des accents de tragédie antique, par le côté théâtral et grandiloquent des paroles de ceux qui réclament vengeance. Le thème de la domination masculine dans cette société est traité sans complaisance, l'auteur porte un regard sévère sur ces hommes pleutres qui déstabilisent et harcèlent un enfant pour qu'il lave leur honneur, répare l'outrage dont une femme est responsable selon eux...
Commenter  J’apprécie          91
Une nouvelle longue époustouflante sur la singularité et ce qui est pour nous l'aberration du système d'éthique familiale dans l'est anatolien. le sentiment de l'honneur qui mène jusqu'à la folie et jusqu'au matricide d'un enfant. Face à ces pages qui m'ont empli d'horreur et de fascination, il devient évident qu'il est totalement inutile de parler de société "avancée" ou "arriérée" de même que de tracer de superficielles analogies entre notre passé (plus ou moins lointain) et la tradition turque qui est totalement et radicalement autre (que l'Europe).
Commenter  J’apprécie          80
Il y a deux raisons qui me font aimer Yasar Kemal. La première, c'est que j'attache une grande importance à la méritocratie. Indépendamment du succès rencontré, il n'y a rien de glorieux à réussir sans avoir morflé. Et Yasar Kemal en a morflé. La seconde, c'est que Yasar Kemal me ramène à mon père et à ma mère. A mon père parce que – il est Kurde mais refuse de se considérer comme tel, il a abandonné l'école très jeune pour gagner sa croûte et il se trouve très à gauche sur l'échiquier politique. A ma mère parce que – elle a lu tout Yasar Kemal, elle lui voue un culte sans faille et elle porte en elle la nostalgie de la vie passée dans les villages et les montagnes...
Lien : http://publikart.net/tu-ecra..
Commenter  J’apprécie          60
Un enfant turc, poussé à tuer sa mère.
Commenter  J’apprécie          31
Une histoire de vie de village et de psychologie, de folie commune (aussi bien dans le sens "ordinaire" que "partagée"). Comme dans ses livres "Mehmet", yachar Kemal dépeint simplement et brutalement la vie de village en Turquie, telle qu'elle est/était. Il y a de la poésie dans ses descriptions de paysages et de la tragédie dans le quotidien.
Commenter  J’apprécie          21


Lecteurs (101) Voir plus



Quiz Voir plus

Tête de Turc !

De quelle pièce de Molière cette réplique est-elle extraite ? Que diable allait-il faire dans cette galère ? Ah maudite galère ! Traître de Turc à tous les diables !

Le bourgeois gentilhomme
Monsieur de Pourceaugnac
Les Fourberies de Scapin
La jalousie du barbouillé

10 questions
61 lecteurs ont répondu
Thèmes : turquie , turc , littérature , cinema , humour , Appréciation , évocationCréer un quiz sur ce livre

{* *}