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Les courts extraits de livres : 04/12/2007
Jésus leur dit : «La lumière n'est plus parmi vous que pour peu de temps. Marchez tant que vous avez la lumière, de peur d'être surpris par les Ténèbres : Celui qui circule dans les ténèbres ne sait où il va.»
Évangile de Jean, 12-35
Le mois de janvier 1697 fut extrêmement froid, le plus glacial que j'aie jamais connu, et, d'après mon maître, le plus froid qu'il ait lui-même vécu depuis l'hiver 1683, où il resta calfeutré chez lui à écrire son Arithmetica universalis - son ouvrage le plus élémentaire. J'avais tenté de le lire, mais n'y étais pas parvenu. Peut-être était-ce le froid qui engourdissait mes facultés intellectuelles, tout comme il ralentissait la frappe de la monnaie. L'argent restait rare en dépit des efforts des monnayeurs, bien que tout le monde évoquât une paix avec la France, les choses n'avançaient guère, et chaque jour on apprenait de nouvelles arrestations de jacobites, de sorte qu'une atmosphère de grande instabilité flottait dans tout le pays. Entre-temps, James Hoare, le contrôleur du Mint, qui venait de mourir, avait été remplacé par Thomas Molyneux et Charles Mason, dont mon maître disait qu'ils étaient tous deux corrompus. En tout cas, ils commencèrent bientôt à se quereller et firent vite preuve de leur incapacité.
J'ai déjà mentionné que l'espion de mon maître, Humphrey Hall, nous avait appris que des faux-monnayeurs avaient mis au point une nouvelle technique pour la fabrication de la guinée d'or, c'est cette sombre affaire qui nous entraîna dans la suite de mon histoire. Les informations de M. Hall avaient beaucoup perturbé mon maître, car la guinée était une pièce beaucoup plus difficile à contrefaire qu'une couronne d'argent ou un shilling et nous n'avions encore jamais vu de fausse pièce d'une guinée. Mais dans la soirée du samedi 13 février, ce manque se trouva comblé.
Je m'étais couché tôt et dormais déjà lorsque M. Hall me réveilla, une bougie à la main.
- Que se passe-t-il, monsieur Hall ? m'enquis-je.
Je fus inquiet de le voir dans ma chambre, car même si c'était un homme de toute confiance, M. Hall, avec sa figure austère, son grand âge et ses gestes lents, ressemblait, au pied de mon lit, à Charon dans sa barque attendant de transporter mon âme au-delà de l'Achéron. Pour prix du passage Charon réclamait une obole, mais c'est d'une guinée dont voulait m'entretenir M. Hall.
- Je crois que nous avons trouvé ce que nous cherchions, monsieur Ellis, m'informa-t-il de sa voix lente et pâteuse. le maître geôlier de Newgate a entendu dire qu'un prisonnier du nom de John Berningham s'est vanté d'avoir payé sa bienvenue avec une fausse guinée.
Les gardes appelaient «bienvenue» le pot-de-vin extorqué aux prisonniers qui, en attendant leur procès, souhaitaient être mieux traités. Ces sommes étaient réglées en quibus ou en jaunets, c'est-à-dire en espèces sonnantes et trébuchantes. Depuis que j'étais entré au service de Newton, j'avais été obligé d'apprendre tout un vocabulaire d'argot, faute de quoi je n'aurais rien compris aux dépositions que j'étais chargé de transcrire. Et il arrivait que certaines fois, Newton et moi parlions comme deux gibiers de potence.
- Je crois que nous devrions aller nous renseigner sur-le-champ, ajouta M. Hall, avant que cet homme soit libéré ou que nous perdions trace de la guinée.
- Vous avez raison. Je vais vous accompagner.
Je me rhabillai donc en hâte et, bientôt, M. Hall et moi nous dirigeâmes non sans difficulté vers Newgate, car le sol était verglacé ou, par endroits, rendu boueux par le piétinement des passants dans la neige fraîche.-http://www.lechoixdesbibliothecaires.com/livre-46099-le-chiffre-de-l-alchimiste.htm
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