Peu de lecteurs et encore moins de critiques sur ce livre, qui est un Journal, se déroulant de 1961 à 1991, mais l'essentiel concerne les années 1980. L'auteur, Imre Kertrsz, vit de sa plume, difficilement, dans une Hongrie re-stalinisée après l'insurrection de 1956. Sa création littéraire est clandestine. Et il s'interroge sur justement l'écriture, la création, la vérité, la réalité. Donc la vie et sa perception. le mensonge.
Et puis,
Imre Kertesz est revenu de là où l'on ne revient pas (cf. mes notes sur l'oeuvre de
Charlotte Delbo). Et il s'interroge mais répond aussi sur le rapport entre la vie et l'écriture.
Ce
Journal de Galère est à la fois simple à lire, car il est souvent constitué de notes, comme postées un jour, un soir, quelques réflexions, et puis il est compliqué, complexe, tant Imre fait référence a ses propres lectures. Pourquoi ? car lui-même découvre la lecture, est assoiffé de lectures, il s'en gave, et il nous livre dans ce Journal, toutes ses réflexions. Ses lectures sont riches, puissantes, entre Kafka,
Nietzsche,
Thomas Mann,
Goethe, et autres, par moment, je recommande le silence pour déguster, savourer une écriture magnifique.
Oui, lire
Kertesz c'est écouter une symphonie de Beethoven ou de Malher (clin d'oeil au livre et à son auteur).
Kertesz écrit d'une manière toute musicale et je comprends ses références constantes (à chacun de ses livres) à Thomas Bernhardt. Lire
Kertesz c'est comme écouter le Requiem de Mozart ou celui de Haydn (là je laisse le choix, moi j'aime les deux).
La langue de
Kertesz (et là bravo sans doute aux traducteurs) est toute symphonique.
Mais je concède que ce n'est pas d'un accès facile, il faut un temps et commencer par un grand silence, comme lorsqu'on attend que l'orchestre sous la commande de son chef entame les premières notes. Lire
Kertesz c'est l'entendre, accepter le rythme, vibrer aux sons, prendre plaisir aux répétitions, jouir des paradoxes du langage, c'est rester éveillé dans un monde qui a une fin.