La préface nous prévient :
Richard Krawiec est un gros morceau de la littérature contemporaine américaine, avec déjà deux titres traduits et accueillis par les éditions Tusitala.
Stewart Rome est notre narrateur - fait important à signaler car rapidement dans la lecture, une relation entre le lecteur et lui se noue. Partie prenante d'un drame qu'il choisit de raconter, embellira-t-il le rôle qu'il y a joué ? Qu'est-ce que qui le motive réellement à donner sa version des faits ?
Fin des années 60, dans le sous-sol de son lycée, on retrouve le corps de Masha, immigrée polonaise et petite amie du narrateur, qui a été brutalement agressée. Il s'agit de remonter le temps et le fil des souvenirs de Stewart Rome pour lever le voile sur une affaire probablement trop vite résolue par l'arrestation d'un jeune homme noir.
Roman sur l'ambiguité de l'adolescence,
Paria est aussi (surtout ?) un roman de violences qui pose notamment la question du déterminisme, tant social que racial, dans l'Amérique du nord des années 60. L'impitoyable dynamique de groupe est dépeinte à plusieurs reprises, que ce soit à l'échelle de la bande, celle du quartier ou même celle de la ville entière. Tel un rouleau compresseur, ces mouvements de fonds semblent réduire à néant toute possibilité d'émancipation morale individuelle.
Tord-boyaux, la lecture de
Paria constitue une expérience intense, sous-tendue par l'attente de la terrible Résolution : que s'est-il réellement passé ce 14 octobre 1967 ? Comme dans un polar, le lecteur va cristalliser son attention sur le retour à l'ordre que nous promet la confession. Espérant peut-être un peu trop fort, il se retrouve d'ailleurs à plusieurs reprises à croire le moment venu, tant la pente vers le drame annoncé s'avère glissante.
Après le vertige Francis Rissin,
Paria sur une autre corde fait vibrer le lecteur. La production maîtrisée et exigeante des éditions Tusitala nous laisse encore une fois le souffle court et on ne boude pas son plaisir.