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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Les embruns du fleuve rouge est avant tout un roman qui raconte une histoire, qui est écrit pour les lecteurs qui aiment qu'on leur raconte une histoire, avec des ambiances dépaysantes, des personnages, des drames, des renaissances, des péripéties. Une bonne histoire.

Mais ce n'est pas uniquement cela. C'est aussi un roman qui nous parle de ce qui se passe quand la vie nous oblige à être le porteur des symptômes d'un autre.

Au départ (on l'apprend avant la page 20), un Breton a fui la famille qu'il s'était construite au Vietnam, au bord du fleuve rouge. Pourquoi ? Avait-il une intention malveillante ? Non. Il était épris de liberté, amoureux de la mer, et nostalgique, désireux de retrouver sa terre natale. Alors il a fui. Ce faisant, il a choisi sa vie, il n'était pas malade : il n'avait pas de raisons de développer de symptômes, lui – bien au contraire. D'ailleurs, ceux qui sont restés l'ont mis sur un piédestal ; personne n'aurait pu dire qu'ils lui en ont voulu.

Seulement, ce n'est jamais si simple... derrière cette façade, ils ont fait ce qu'ils ont pu avec ce comportement qu'ils pouvaient idéaliser, mais auquel ils ne pouvaient donner aucun sens intime positif. Chacun à leur tour, ils ont porté un symptôme de ce qui n'était pourtant pas une maladie, mais une fuite, et est devenu une tragédie.

Comment l'illustrer sans dévoiler l'histoire ? Disons qu'il y a sa femme, d'abord. Sans doute a-t-elle interprété cette fuite comme un abandon et un désamour... car dans sa vie adulte, elle ne saura pas donner de sécurité affective à leur fils.

Il y a ce fils. Sans doute a-t-il intériorisé cette fuite comme de la haine... car dans sa vie adulte, il exprime à son tour cette haine de la plus cruelle des façons.

Il y a la femme de ce fils. Elle, elle n'a pas vécu cet abandon, elle ne l'a pas vu... et dans sa vie adulte, elle est justement celle qui ne verra rien.

Il y a leur fille. Elle a encore moins vécu cet abandon : elle n'était pas née... mais elle est la troisième génération. C'est toujours celle qui expie.

Et enfin, il y a le deuxième fils. Lui, il est né après la fuite, à l'autre bout du monde, et le symptôme qu'il a porté à la place de son père n'est pas pathologique : c'est la solitude. Celle de l'homme qui a largué les amarres et est passé à côté des attaches humaines, de leurs douleurs mais aussi de leurs joies. C'est pourtant de lui qu'une certaine résilience pourra venir. Mais à quel prix... découvrez-le en lisant Les embruns du fleuve rouge. C'est un très bon moment de lecture, et une nouvelle belle découverte dans le trio de la rentrée littéraire d'un éditeur qui monte, Carnets nord. Après Dans la chair des anges de Cathy Borie, qui est pour moi le coup de coeur que tout le monde sait, il me reste à découvrir Saudade d'Ursula Sila-Gasser : s'il est de la qualité des deux autres, alors je me réjouis déjà !
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Comme un appel d'air, comme le souffle puissant et vespéral des embruns dont le titre éponyme du livre fait allusion, cette sensation évanescente des côtes bretonnes, cet étrange personnage, Léon, un marin qui s'est retiré sur cette terre isolée et sauvage, solitaire, bourru, il prend les jours comme ils viennent jusqu'à cette rencontre improbable d'un soir, une jeune femme d'origine asiatique se présente à sa porte.
C'est le début d'une histoire qui va faire voler en éclats toutes ses certitudes ...

Le choc des cultures, l'Occcident et l'Orient, c'est le roman de tous les contrastes, à travers une histoire empreinte de poésie et de voyage au-delà des frontières, la rugosité du climat face à la douceur exotique, la brutalité devant la sensibilité délicate, la solitude de deux êtres en proie aux caprices de la vie et de ses mystères s'exprime ici avec toute la pudeur et l'intensité qui les submerge, des moments de pure poésie dont les citations d'un illustre poète en sera le fer de lance au fil des pages, comme une empreinte, un style épuré à l'extrême pour un effet instantané, le sentiment d'habiter litteralement les personnages s'exprimant à demi-mots, faisant du silence et des non-dits un échange lourd de significations et de conséquences à travers leur parcours, comment ces deux êtres aux antipodes l'un et l'autre vont-ils s'apprivoiser et se retrouver dans la voie de la sagesse et tracer leur route et surtout leur destinée ?

"Yannie, je m'appelle Yannie"

Un climat qui baigne dans la torpeur des angoisses de l'existence, cette atmosphère chargée d'électricité pour creuser dans la viscosité en exergue, l'auteure évoque le temps qui passe, cette lenteur de mouvements pour alterner des situations d'urgence, un rythme qui tend inéluctablement vers une tragédie des temps modernes, le poids du passé, l'absence de l'autre, le deuil est subtilement abordé pour donner encore plus d'ampleur, dans cet assourdissant mensonge et de la fureur humaine qui fait basculer l'existence, la volonté de s'affranchir de ces déchaînements de violence et de l'indicible, la folie des uns pour contrer la faiblesse pathétique des autres, l'envie irrépressible de bousculer les conventions pour aspirer à la liberté d'être, des séquences marquantes qui vous saisissent à la gorge, cette volonté de rendre les personnages totalement prisonnier et impuissant face au destin et à la fatalité, dans ce brouillard naît souvent la beauté de l'âme, la marque de l'empathie pour s'opposer, pour donner des pistes de rédemption des âmes qui savent que le temps joue contre elles, ces ornières qui encerclent des chemins semés d'embûches.

Un roman choral, intelligent et subtil pour saisir toutes les nuances de la vie, jamais il ne tombe dans le pathos et la facilité du propos par ce parti-pris de l'auteure d'en distiller l'essentiel, il prend aux tripes dans la couleur de toutes les émotions, une mélancolie suave plane dans l'air marin et tropical, des réflexions existentielles d'une grande richesse y sont convoquées, il tend irrémédiablement vers une quête identitaire, une mission vitale pour retrouver les racines de ses terres originelles, comme un chant du cygne, la résonance n'en est que plus forte pour suivre le périple de ses personnages à la recherche du temps perdu, à se recueillir, à puiser au fond d'eux-mêmes pour comprendre et savoir, récit initiatique pour donner un sens à l'existence, pérégrinations de tous les dangers pour retrouver la joie du bonheur, fusse-t-il éphèmère, ces précieux croisements n'ont pas de prix quand il s'agit d'un amour filial, les sources du fleuve rouge n'ont pas fini de couler sous les ponts, vers des contrées inconnues ...

Léon

Une histoire de collision et de connivence pour embarquer vers un voyage de tous les possibles, vers cette pointe qui culmine à des hauteurs vertigineuses dans la transversalité des sentiments contrariées, le poids du mensonge, le désir impérieux d'avancer, cette économie de mots prend un sens particulier pour capter les écorchures de deux être unis par des liens sacrés, par cette force d'esprit à concilier deux mondes, le parfum des effluves qui fouette le nez, le symbolisme de l'art à son apogée pour parachever la relation fusionnelle de l'être humain et de sa nature profonde, des fantômes qui dansent aux sons du crépuscule, l'abandon de soi pour le sacrifice de l'autre, dans la fragilité et le désarroi tangible, pour retrouver des prismes inhérents à son moi, à cette inconscience qui n'a de cesse de traverser les pensées de ces blessés de la vie, de ces plaies purulentes qui n'en finissent pas de rougir, jusqu'où l'amour du prochain peut-il aller pour sauver les âmes en perdition ?

Raisons d'êtres désespérés, raisons de rétablir la vérité pour trouver la paix dans l'éternité de ces embruns qui continuent inlassablement à percuter la paroi rocheuse du Finistère, une intrigue qui regorge de rebondissement pour maintenir une lecture fluide, dans la transparence des ricochets, dans la compassion des êtres isolés, dans la souffrance réprimée, dans la douleur insoutenable qui les étreint jour après jour, des perles miraculeuses peuvent jaillir du fond de l'eau du fleuve comme celui qui traverse Haiphong, cette ville du Vietnam sera-t-elle la terre promise de toutes les espérances, de tous les futurs, celle que les âmes meurtris cherchent depuis la nuit des temps ?

Un grand roman de l'amitié, ce rapprochement singulier et émouvant qui se dévoile au gré des vents et des rafales de toutes les détresses et de la déchéance humaine, cette légèreté de ton qui imprègne certains scènes rappelle que tout n'est pas que le fruit des malheurs, des doutes et des tourments, que l'équilibre et l'harmonie peuvent aussi cohabiter, que les stigmates du passé peuvent s'estomper, malgré tout, dans le sourire et la joie communicative voire contagieuse.
La délivrance de tout un chacun pourra-t-elle enfin trouver sa source du bonheur perdu, dans ces terres d'exil qui n'ont pas encore dévoiler tous ses secrets et ses mystères ?

La libération des sens, effet cathartique, une leçon d'humanité et d'espoir, la renaissance, une histoire sensible qui fait écho avec une des problématiques du monde actuel, l'afflux des migrants, la richesse et la valeur individuelle que chacun peut contribuer, le miroir contemporain d'une société en pleine mutation.

Un florilège d'émotions pures qui continuent de vous étreindre au-delà de la lecture, cette désespérance des personnages dans l'immensité des espaces et du temps, il suffit parfois d'un bouleversement imprévisible ou vous faisant immerger dans un chaos destructeur, la vie ne tient qu'à un fil, la mort, les blessures de l'âme sont indélébiles, cruelles, dans la mémoire du silence, dans la mélodie des paroles étouffées, les anges s'en reviendront.
Il appartient au lecteur de naviguer entre rêve et réalité, entre le passé et le présent, invoquer les dieux de la compassion, à saisir ce cadeau précieux qui définit l'être humain par essence, dans sa quête absolue vers un idéal, vers le bonheur des choses simples, vers l'amour et celui de son prochain.

Je termine avec cette très belle citation du livre ...

"A toutes ces choses qui vous nourissent pour la vie entière et dont vous n'avez pas conscience sur le moment. Ces tout petits riens qui sont des pépites de bonheur et que l'on consomme sans modération au lieu d'en savourer chaque seconde."

Je remercie infiniment l'auteure, Elisabeth Larbre pour cette lecture qui est arrivée à point nommé dans un moment de doute existentiel, le hasard fait bien les choses mais n'est-ce pas plutôt y voir un signe miraculeux et du destin, à l'instar de cette jeune personne qui s'apprête, un soir de grand froid, à toquer à une certaine porte ...

Je vous invite chaudement à découvrir cette pépite éditée chez Carnets Nord, Les Embruns du fleuve rouge d'Elisabeth Larbre et qui sortira officiellement le 28 septembre 2018.

Laissez-vous embarquer dans ce voyage de tous les sens afin de vous en imprégner chaque particule, de vous libérer, de retrouver toutes ces perceptions uniques qui vous appartiennent et vous feront sûrement, je l'espère comme ce fut le cas pour ma part, plonger dans votre coeur et votre esprit pour redonner un nouveau souffle, pour rebondir, pour continuer à croire de nouveau en la valeur de choses simples, précieuses et définitvement humaines.

Les Embruns du fleuve rouge de Elisabeth Larbre, un coup de coeur pour une histoire de toutes les espérances !!!
❤️ Un coup de coeur, une histoire ... divine et magique !!! ❤️

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Comment ne pas sentir sa curiosité éveillée lorsque le prologue raconte une inhumation secrète dans un lieu désert de Bretagne. Pourtant, ce n'est pas un crime mais une action de grâce. Comment mieux nourrir l'espérance quand le roman commence avec une porte qui s'ouvre ? Entre Yannie, jeune fille vietnamienne à bout de forces et Léon, le vieux loup de mer breton rompu à la solitude existent des liens qui se dévoilent au fil de l'histoire tandis que le lecteur navigue du coeur de la Bretagne sauvage au Vietnam grouillant de vie, de bruits et de parfums. Les embruns du fleuve rouge se mêlent à l'écume de l'océan qui fouette les côtes bretonnes. le personnage de Léon, on aimerait le connaître, Yannie, on aimerait l'entourer et la prendre dans ses bras . C'est ce que font Léon et son vieil ami médecin Pierrick et on est à l'écoute des douleurs, des chagrins, des épreuves de Yannie venue du bout du monde. Son histoire, ses peines, elle nous les livre peu à peu, par petites touches puis, plus longuement en se confiant au vieux médecin qui l'aide à porter le fardeau de son destin. Dans la maison de Léon, ce coin perdu de Bretagne, elle se sent pour la première fois à sa place. Quant à Léon, lui aussi, il trouvera sa maison, l'harmonie et la plénitude . Dans le port de Haiphong Léon rencontrera le pan manquant de son existence, des amis et le lecteur découvre que la folie peut être le résultat d'une conjoncture, d'une maltraitance, des mensonges et des no-dits. le roman s'achève sur une ouverture, un équilibre métaphorisé par un couple d'oiseaux, de spatules à tête noire, de leurs battements d'aile, de leur vol puissant et endurant.
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Ce livre est bouleversant ! Comme un conteur qui nous raconte une histoire… Elle nous transporte dans les abîmes de la vie, de la liberté, mais également dans tous ses travers…

Ma Chère Lectrice, Mon Cher Lecteur, je vous emmène en voyage… Déjà à travers la Bretagne et le Vietnam… Puis, nous voguons à la rencontre de l'être humain et de ses ressentiments, de ses besoins, de sa psychologie, mais encore… Un long voyage poétique, aussi troublant qu'une peinture, le Munch, aussi enivrant que les vers d'Aragon, aussi impétueux que les sentiments profonds d'un être humain…

Ah ! Vous en voulez plus ? Petits gourmands ! Et vous avez complètement raison 😉
Nous débutons notre histoire avec Léon, un vieux loup de mer ayant posé le pied à terre, à l'Ar-Men en Bretagne. Il est dans sa cabane tranquille, sans que personne ne vienne le déranger… Personne ? Ah si, Yannie arrive, tremblante, trempée, gelée ! Mais bon sang c'est qui cette femme-enfant ? Elle l'appelle Léon… Ces deux-là ne se connaissent pas et pourtant leur histoire est bel et bien liée.

Yannie va alors lui raconter. D'où elle vient, qui elle est, comment elle a fait le voyage d'Haiphong à Ar-Men et surtout pourquoi. C'est dur, c'est fou, c'est poignant et révoltant ! Un terrible secret de famille va alors être mis à jour. Une certaine complicité va naître entre Léon et Yannie, une sorte de relation père-fille.

Oh ! Ma Chère Lectrice, Mon Cher Lecteur, quelle galère cette famille ! Un homme, pêcheur, amoureux de la mer qui part et vogue vers le Vietnam dans le bataillon de la légion étrangère. "Une femme dans chaque port" qu'il disait l'autre… le Glaouneg rencontre en effet Ru-Su une belle jeune femme magnifique, à Haiphong. de leur amour naîtra un enfant, etc. ainsi va la vie… D'un homme, on en fait une légende. Et pourtant !

Cette famille a plusieurs branches ! Une en France, une au Vietnam. On va suivre en parallèle de la découverte du récit de Yannie à Léon, la vie des femmes restées au Vietnam… Que va-t-il se passer ? Léon va-t-il découvrir ce qu'est réellement sa famille ? le vieux loup de mer… lui qui pensait être tranquille !

Mon Cher Lecteur, Ma Chère Lectrice, ce roman m'a aimanté ! Oui, oui ! C'est une lente plainte poétique qui vous embarque au fil des flots, de la mer, de la vie et des tourments.
Un petit caillou dans la chaussure m'a dérangé, comme une petite complainte sourde… Ce sont les non-dits qui bordent se livre. Elisabeth Larbre a cette façon fabuleuse de mettre le lecteur dans l'atmosphère ouatée et dérangeante de ses personnages. Elle arrive en un style simple à nous retourner le coeur ! C'est violent et brûlent de sentiments. Tous plus forts les uns que les autres !

C'est un livre qui est loin de se lire comme ça, comme un « j'men jette un p'tit dans gosier » ! Chaque phrase, chaque chapitre faisant le ping-pong de part et d'autre de la planète, nous plongent dans l'état d'esprit de cette famille. Des différents membres qui la composent… de ce secret vertigineux…

Ce roman est une tempête à coeur ouvert. C'est minutieux et chirurgical. L'écriture et l'histoire sont belles et pourtant terriblement dramatiques ! Comme le Ying et le Yang. Tout et son contraire… On aime la relation qui se construit entre Léon et Yannie, on exècre certaines situations. On prend en affection ce vieux loup de mer. Elisabeth a su me projeter dans cette psychologie fine qu'elle fait resurgir dans ce livre. On sent toute l'animosité et la beauté de son écriture. C'est à vif, c'est emporté, c'est puissant !

Mon Cher Lecteur, Ma Chère Lectrice, c'est un roman peu commun qui saura vous empoigner et vous transporter ! Il m'a emprisonné comme une sirène qui appelle au large et qui ne m'a pas encore laissé… L'écriture est belle et les ressentiments d'une extrême minutie ! C'est un roman brillant et pourtant terriblement troublant. Je vous recommande fiévreusement ce livre. Rien à voir avec ce que vous avez l'habitude ! C'est un petit démon qui danse sur l'épaule, qui fait un pied de nez à la vie littéraire 😈😉

Lien : https://linstantdeslecteurs...
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La plume est fluide, sensible, et délicate. Impossible de lâcher le roman, tant il vous prend aux tripes. Une fois le livre refermé, les personnages, particulièrement attachants, continuent de vous accompagner...
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