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EAN : 9782070387267
304 pages
Gallimard (23/04/1993)
3.68/5   311 notes
Résumé :
De l'Europe à l'Afrique, c'est la trajectoire de trois destins qui se nouent à Onitsha. En 1948, Maou et Fintan, son fils, s'embarquent pour le Nigéria retrouver Allan, le père bien-aimé et inconnu. Mais dans la moiteur du fleuve, au son des tambours, c'est un rêve qui s'effondre et un continent de fièvre et de violence qui surgit devant les yeux effarés des deux nouveaux arrivants. L'Afrique n'est pas cette terre de bonheur ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (37) Voir plus Ajouter une critique
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C'est la guerre en Europe, le père est loin dans une ville du Nigeria, dont la poésie tinte aux oreilles d'un jeune garçon : Onitsha. Il est attaché à sa mère comme les enfants monoparentaux le sont, il la regarde nue se douchant un jour, et sera, c'est attendu, jaloux de son père.
Ce n'est pas mon père, se dit Lintan , quand il débarque sur le fleuve Niger, et qu'il perçoit aussi le désappointement de sa mère Maou, qui avait rêvé de l'Afrique, « les randonnées à cheval dans la brousse, les cris rauques des fauves le soir, les forêts profondes pleines de fleurs chatoyantes et vénéneuses, les sentiers qui conduisaient au mystère. Elle n'avait pas pensé que ce serait comme ceci, les journées longues et monotones, l'attente sous la varangue, et cette ville aux toits bouillants de chaleur. »

Récit du voyage que Le Clézio a fait avec sa mère, de Nice à Port Harcourt, et dans les mêmes conditions.

Sauf que ce qui semble mal commencer devient une tendre histoire. Lintan l'enfant part pied nus en brousse, court avec les autres enfants, rencontre et regarde, observe et découvre, il se régale de la vie sauvage, pense être né là, dans la proximité du fleuve, vit tout ce qui peut enchanter les enfants en Afrique et parallèlement invente un roman( comme Le Clezio l'a fait avant lui).

Le père, plutôt absent, invente aussi une histoire, celle de la reine noire de Meroe, la capitale de Nubie, qui aurait migré depuis le Nil jusqu'au fleuve Niger. Pour ce faire, Le Clézio adopte une mise en page différente, mi page, comme dans son autre roman « Désert ».
C'est bien de fleuves dont il s'agit, le Niger omniprésent, c'est lui qui apporte les nouvelles, lui par qui les nouveaux arrivent, lui qui illumine tout le roman. Car c'est un roman lumineux, un peu comme Maou, inactive et sereine, sachant cependant s'opposer aux agissements d'un colon anglais, prétentieux et cruel, voulant faire construire une piscine par des prisonniers enchainés.

Elle découvre la lenteur « un mouvement très long et régulier, pareil à l'eau du fleuve qui coulait vers la mer, pareil aux nuages, à la touffeur de l'après midi, quand la lumière emplissait la maison et que les toits de tôle étaient comme la paroi d'un four. La vie s'arrêtait, le temps s'alourdissait. »

L'eau est toujours présente dans ce roman, celle du bain de la mère, du voyage qu'ils font ensemble de Bordeaux à Dakar puis de Dakar par la mer jusqu'à Cotonou et enfin Port Harcourt, enfin les deux fleuves, le Nil et le Niger, la jeune femme au profil égyptien, Oya, « l'eau », qui perd les eaux devant Fintan.

L'eau, plus que la guerre, évoquée au début du livre, raison de l'éloignement du père, et guerre du Biafra des années après, pour le pétrole sous marin. « Pour la main mise sur quelques puits de pétrole, les portes du monde se sont fermées sur eux (les enfants sacrifiés) les portes des fleuves, les iles de la mer, les rivages. Il ne reste que la forêt vide et silencieuse. »
Je lis ce roman comme un histoire d'eaux, et de femmes : Maou, Oya, Marima, et l'héroïne du père, la reine de Meroe et sa descendance de femme en femme , jusqu'à Arsinoe.
Ceci est ma lecture, très partiale ( l'eau, les femmes, la sérénité africaine), cependant Le Clezio a écrit, avec Onitsha, aussi, un livre très documenté, qu'il met comme en parenthèse par sa manière de scinder les pages en deux, et qui demande une érudition que je n'ai pas.
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C'est un roman merveilleusement bien écrit mais complexe. Il s'agit surtout de l'aventure de trois personnes avec des rêves et des attentes différentes. Trois personnes dont on ne connait pas grand chose de leur passé. Il y a, en 1948, le père, un anglais, installé à Onitsha où il travaille, qui fait venir sa femme italienne, et leur fils de 12 ans. le fils ne connait pas ce père et le regarde comme un étranger. Il y a aussi la colonie britannique remplie de préjugés et régnant sur les autochtones. L'enfant qui redoutait de partir pour l'Afrique, va y découvrir la liberté et va être marqué à vie par ces quelques mois passés au Nigeria. La mère attendait une autre Afrique, et souhaitait renouer avec son mari dont elle vivait séparée depuis très longtemps. le père vivait d'un travail administratif qui ne le satisfaisait pas vraiment, mais n'avait qu'une idée en tête, retrouver l'emplacement de la nouvelle Méroë en marchant sur les traces d'Arsinoë.
Le roman débute par le très long voyage sur un navire qui les conduit de Bordeaux jusqu'à Port Harcourt.
Et puis il y a l'installation à Onitsha, l'incompréhension, le désaveux de la communauté britannique.
Cela se concrétise par un retour précipité en Europe.
Le roman se termine en 1968, en Angleterre et dans le sud est de la France, alors que l'enfant, devenu adulte, est hanté par la tragédie du Biafra faite de guerre, de génocide et de famine... se questionne sur ce qu'ont pu devenir les gens qu'il a connu au Nigeria et prend conscience de l'importance qu'à eu pour lui son expérience africaine.
Le roman est ponctué aussi tout au long des 251pages d'une quête, ou d'une enquête, trouver le chemin emprunté par la reine Arsinoë accompagnée de son peuple au travers de l'Afrique pour y installer la nouvelle civilisation méroïtique.
Un roman qui fait aimer l'Afrique et donne envie de se documenter sur une civilisation disparue.
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Un livre que j'ai été longue à lire et pourtant, il m'a beaucoup plu.

On découvre l'Afrique, que l'auteur a si bien connue enfant,une Afrique magique et envoûtante. A travers le regard d'un autre enfant ( son double?), Fintan , qui , au début du livre, quitte cet univers aimé. Poignant est son départ, son adieu à cette Afrique qu'il a appris à aimer.

Le livre présente aussi la vision irréelle du père, Geoffroy, en quête du peuple étrange au signe sur le front, de la reine Arsinoë Oya , déesse troublante du fleuve.

Maou est un autre personnage que l'on aime d'emblée.

Le fleuve s'étire, plein de langueur, symbole de la vie qui s'écoule, de l'oubli de tout. Et on se prend à rêver, nous aussi, de ce continent fiévreux et mystérieux ...

Une lecture fluide,poétique, porteuse de songes...
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La lecture d'un roman de M. le Clézio est toujours un enchantement. Ici, après un long voyage en bateau, il nous transporte en Afrique, et à travers les yeux de Fintan on vit quasi en live, toute la magie de ce pays. Les difficultés d'adaptation, connaitre et accepter une autre culture, ne sont pas toujours facile pour un enfant.
Maou la maman, de son côté s'intègre plutôt bien avec les femmes du village, affectionne le peuple et prend aussi la défense des prisonniers et autres domestiques maltraités. Elle sera mal vu par les colons qui eux abusent et profitent bien de leur position.
Quant à Geoffroy, il se prend de passion pour la dernière pharaonne Méroé, et s'investit dans des recherches minutieuses et prenantes.
L'aventure est vivante, l'ambiance, tout est fait pour nous emporter dans ce pays.
Le retour est difficile tant pour Fintan et ses parents et pour le lecteur.
Une très belle lecture une fois encore avec cet auteur.
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Si la Provence a Pagnol et Giono, l'Afrique peut s'enorgueillir d'être au centre du magnifique roman Onitsha de le Clézio.
Avec une terre rouge, le fleuve qui charrie des eaux boueuses, le grondement de l'orage, les pluies torrentielles, l'odeur de l'igname cuit, la fureur des tambours, J-M G. le Clézio parvient à mettre tous nos sens en éveil dans une Afrique riche de couleurs et de sonorités. Il charme, il envoûte grâce à une écriture parfaitement maîtrisée qui fait de l'Afrique quelque chose de charnel et entêtant qui accompagne le lecteur tout au long du récit . Plus que les mots, c'est le rythme qui retient captif le lecteur. L'auteur a su capter et transmettre le rythme de l'Afrique tantôt avec une écriture fébrile, des phrases courtes et répétées qui deviennent envahissantes, obsédantes, tantôt avec une écriture qui s'étire toute en longueur et en langueur sublimant la contemplation de la nature qui s'avère fondamentale pour les trois protagonistes.

Geoffroy Allen rejoint par son épouse Maou et Fintan le fils qu'il connait à peine, a « échoué » à Onitsha, une ville du Golfe de Guinée où inévitablement tout s'échoue : les réminiscences de l'Empire britannique, l'arrogance méprisante des exilés européens pour les indigènes, les rêves de nouveau monde et de nouvelle vie, à l'image de l'épave du vieux George Shotton, l'un des prestiges de la marine anglaise enlisé dans les alluvions du fleuve Niger.
Au contact des indigènes et de la fureur des éléments, chacun à sa manière va se découvrir. On se laisse séduire par un fleuve fécond qui nourrit de manière mystique l'imaginaire du père et apaise Maou et Fintan, un fleuve capable de réunir des individus trop longtemps éloignés. Au point qu'on se prête à imaginer que cette famille disloquée va renaître.


Onitsha dépasse le cadre de la lecture, on referme ce livre avec la sensation de l'avoir vécu. Intensément lorsque la fièvre monte et pousse à la révolte ceux qui sont exploités, ou encore lorsque le soleil écrase de sa chaleur les maisons au toit de tôles. L'atmosphère est particulière, insaisissable.

Roman magnifique où Le Clézio se fait conteur, à la manière de la tradition orale de l'Afrique. Il parvient à nous absorber dans un univers primitif où se mêlent mysticisme et réalité. Un bel hommage à l'Afrique.
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Citations et extraits (29) Voir plus Ajouter une citation
Marima, que puis-je te dire de plus, pour te dire comment c'était là-bas, à Onitsha? Maintenant, il ne reste plus rien de ce que j'ai connu. A la fin de l'été, les troupes fédérales sont entrées dans Onitsha, après un bref bombardement au mortier qui a fait s'écrouler les dernières maisons encore debout au bord du fleuve. Depuis Asaba, les soldats ont traversé le fleuve sur des barges, ils sont passés devant les ruines du pont français, devant les îles noyées par la crue. C'est là qu'était né Okeke, le fils d'Oya et d'Okawho, il y a vingt ans déjà. Les barges ont accosté sur l'autre rive, là où se trouvait l'embarcadère des pêcheurs, à côté des ruines du Wharf et des hangars éventrés de la United Africa. Onitsha était désertée, les maisons brûlaient. Il y avait des chiens faméliques et, sur les hauteurs, des femmes, des enfants à l'air égaré. Au loin, dans les plaines d'herbes, le long des sentiers boueux, les colonnes de réfugiés marchaient vers l'est, vers Awka, vers Owerri, vers Aro Chuku. Peut-être qu'ils passaient sans les voir devant les châteaux magiques des termites, qui sont les maîtres des sauterelles. Peut-être que le bruit de leurs pas et de leurs voix réveillait le grand serpent vert caché dans les herbes, mais personne ne songeait à lui parler. Marima, que reste-t-il maintenant d'Ibusun, la maison où tu es née, les grands arbres où se perchaient les vautours, les limonettiers cousus par les fourmis, et au bout de la plaine, sur le chemin d'Omerun, le manguier sous lequel Bony s'asseyait pour m'attendre?
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C'était donc cela, l'Afrique, cette ville chaude et violente, le ciel jaune où la lumière battait comme un pouls secret. Avant qu'ils ne repartent pour Dakar, les Botrou avaient invité Maou et Fintan à Gorée, pour visiter le fort. Sur la rade, le canot glissait vers la ligne sombre de l'île. La forteresse maudite où les esclaves attendaient leur voyage vers l'enfer. Au centre des cellules, il y avait une rigole pour laisser s'écouler l'urine. Aux murs, les anneaux où on accrochait les chaînes. C'était donc cela l'Afrique, cette ombre chargée de douleur, cette odeur de sueur au fond des geôles, cette odeur de mort. Maou ressentait le dégoût, la honte. Elle ne voulait pas rester à Gorée, elle voulait repartir au plus vite vers Dakar.
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Fintan guettait les éclairs. Assis sous la varangue, il regardait le ciel du côté du fleuve, là où l'orage arrivait. Chaque soir, c'était pareil. Au coucher du soleil, le ciel s'obscurcissait à l'ouest, du côté d'Asaba, au-dessus de l'île Brokkedon. Du haut de la terrasse, Fintan pouvait surveiller toute l'étendue du fleuve, les embouchures des affluents, Anambara, Omerun, et la grande île plate de Jersey, couverte de roseaux et d'arbres. En aval, le fleuve formait une courbe lente vers le sud, aussi vaste qu'un bras de mer avec les taches incertaines des îlots qui semblaient des radeaux à la dérive. L'orage tournoyait. Il y avait des traces sanglantes dans le ciel, des déchirures. Ensuite, très vite, le nuage noir remontait le fleuve, chassant devant lui les vols d'ibis encore éclairés par le soleil.
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Le Surabaya, un navire de trois cents tonneaux, déjà vieux, de la Holland Africa Line, venait de quitter les eaux sales de l'estuaire de la Gironde et faisait route vers la côte ouest de l'Afrique, et Fintan regardait sa mère comme si c'était la première fois. Peut-être qu'il n'avait jamais senti auparavant à quel point elle était jeune, proche de lui, comme la soeur qu'il n'avait jamais eue. Non pas vraiment belle, mais si vivante, si forte. C'était la fin de l'après-midi, la lumière du soleil éclairait les cheveux foncés aux reflets dorés, la ligne du profil, le front haut et bombé formant un angle abrupt avec le nez, le contour des lèvres, le menton. Il y avait un duvet transparent sur sa peau, comme sur un fruit. Il la regardait, il aimait son visage.
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La jeune reine Arsinoë est la première à recevoir la marque d'Osiris et d'Horus. Le dernier grand prêtre est mort il y a longtemps déjà, enfermé dans le tombeau d'Amanirenas au milieu du désert. C'est un Nouba d'Alwa, nommé Geberatu, qui grave les signes sacrés, sur le front les deux grands yeux de l'oiseau du ciel, représentant le soleil et la lune, et sur les joues les stries obliques des plumes des ailes et de la queue du faucon. Il incise le visage de la reine avec le couteau rituel, et il saupoudre les marques avec de la limaille de cuivre. La même nuit, tous les enfants premiers-nés, garçons et filles, reçoivent le même signe afin que nul n'oublie l'instant où le dieu s'est arrêté dans sa marche et a éclairé pour le peuple de Meroë le lit du grand fleuve.
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Vidéo de J.M.G. Le Clézio
Cette semaine, La Grande Librairie s'installe à Marseille et propose une émission exceptionnelle, en public, à l'occasion des Nuits de la lecture et des 10 ans du Mucem. Au coeur de ce musée dédié aux cultures de la Méditerranée, des écrivains, des librairies et des lecteurs pour une soirée dédiée aux mots, aux mille identités de l'espace méditerranéen, et à cette idée que la littérature est toujours un lieu de rencontres, de partage et de commun.
Augustin Trapenard est donc allé à la rencontre du lauréat du prix Nobel 2008 Jean-Marie Gustave le Clézio. Il est venu présenter son dernier ouvrage, "Identité nomade" (Robert Laffont), explorant son parcours d'écrivain, ses voyages et ses affiliations. L'auteur s'interroge également sur le pouvoir de la littérature dans le monde contemporain. Un récit introspectif captivant sur l'essence de l'écriture. le tout, durant une magnifique balade à Nice, ville qui l'a vu naître.
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