Un livre extirpé de dessous les piles à lire ... et pourtant ...
"Mauves (sur Loire), le 16 avril 2011
Pour christine,
Parier sur les femmes et les hommes. Parier sur la vie. Toujours.
Amicalement.
Marin Ledun"
Il y eu une rencontre ... et j'ai laissé traîné le livre !
Depuis, Marin a trouvé son public, ce livre a eu du succès, il est devenu aussi un film, avec Isabelle Adjani, ce film a rencontré ses spectateurs. Personnellement il ne m'a pas semblé convainquant, je crois que l'interprétation de la belle actrice m'a semblé outrancière et son jeu trop évaporé.
Reste à revenir au début de l'histoire et lire enfin le livre.
Un livre c'est raconter quelque chose.
Il y a le fond et la forme.
Une critique c'est dire ce que l'on pense de ce qu'on a lu.
Il y a le bon et le mauvais.
Ce qui est évoqué par le livre c'est un fond d'actualité ... une série de suicides dans de grandes entreprises françaises, provoquée par des méthodes de management ...
des souvenirs personnels occupent toujours un coin de ma mémoire (1) ... le rôle de la médecine du travail dans l'univers professionnel des grandes entreprises françaises … C'est ce qu'on peut appeler le fond.
En ce qui concerne la forme
Un style haché, des mots lancés dans l'ordre ou le désordre, qui se répètent, qui martèlent la dure réalité du travail sur une plate forme.
Quant au rôle du médecin du travail, mon expérience ne m'a pas permis de rencontrer quelqu'un autant atteint par le rôle ingrat, qu'à la fois le conseil de l'ordre et l'entreprise pour laquelle il travaillait, lui imposent.
Les intentions sont louables mais l'écriture retire tous attachements aux personnages et décrédibilise la psychologie de chacun des intervenants.
(1)
Se retrouver sans aucune ressource et sans aucun droit au chômage a plus de cinquante ans ... une offre d'emploi sur un plateau de télé vente vue comme une planche de salut ... la découverte d'un univers ...
Confrontée pour commencer à des essais tournant autour d'une journée d'intérim, puis d'une autre, puis d'une semaine, puis d'un contrat en CDD d'une semaine renouvelable, puis d'un mois renouvelable pour finir par obtenir un CDI, le tout bien sûr à temps partiel délivrant un salaire de misère insuffisant pour vivre ...
Des rencontres avec le personnel à 99% féminin, (les hommes ne passant même pas le premier RV d'embauche), des femmes fracassées par les accidents de la vie, échec universitaire sans aucune expérience du monde du travail, divorce, reprise d'une vie professionnelle après plusieurs grossesses, déconnectées du monde du travail, licenciées par fermeture d'entreprise, reconversion forcée dans un boulot ne nécessitant pas les mêmes compétences que le précédent ...
Un encadrement dont le but est de formater chaque conseillère de vente à tenir le discours à la mode à ce moment là, d'être à l'écoute de chaque conversation avec les clients pour vérifier le ton et la répartie dont le petit personnel fait preuve, faire le bilan chaque matin, chaque semaine des efforts faits pour tenir les objectifs fixés arbitrairement par ceux qui savent, ne pas hésiter à traiter ceux qui n'ont pas réussi leur challenge comme des moins que rien …
Je pense encore souvent aujourd'hui, alors que j'ai réussi à sortir de ce bourbier qui pour moi n'a été que passager (tenir six mois pour acquérir un droit au chômage me permettant d'envisager un stage de formation rémunéré pour une reconversion) à celles qui n'ont pas la motivation, le sursaut, l'énergie, nécessaires pour oser franchir le pas vers l'inconnu, et restent soumises à l'arbitraire, à la maltraitance psychologique, à la mauvaise image d'elles même que leur renvoient leurs manques de résultat.