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sur 975 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Avant j'aimais Lehane. Mais ça c'était avant.
A présent, j'admire davantage. Je place l'écrivain dans le cénacle de ceux, rares, qui racontent l'Amérique entre histoires et Histoire, tissant un récit aussi dense et somptueux qu'une toile de Jouy.

Un pays à l'aube, c'est l'Amérique entre 1917 et la prohibition de 1919. Ce sont sept cent cinquante pages qui annoncent dans leurs spasmes sauvages la modernité naissante d'un XX° siècle américain qui s'étourdira de jazz, dressera ses buildings toujours plus haut, connaitra quelques années prospères, tombera dans le capitalisme pour ne plus s'en relever.
John Edgar Hoover pointe déjà son nez.
Les mouvements politiques balaient les rues de Boston. Il y a des rêves anarchistes dans l'air, des bombes qui s'égarent parfois, des tracts bolchéviques qui viennent titiller ces entreprises mangeuses d'hommes. Il y a les noirs que l'on congédie pour faire place aux soldats rentrés d'Europe dans la grande épidémie de grippe. Il y a ce racisme qui ulcère l'âme, gangrène l'espoir d'une impossible égalité. A ce titre, la partie de base ball inaugurale du roman est un sommet en plus d'un hommage à Outremonde de Don DeLillo.
Il y a ces espoirs syndicaux qui s'embourbent déjà.

Avant, j'aimais Lehane. Mais ça, c'était avant. Maintenant je l'élève toujours plus haut dans mon palmarès personnel. Lui qui redonne vie et parole à ces anonymes engloutis par L Histoire. Lui qui dénonce par des faits (rien que des faits) ce rêve américain qui, malgré ses désenchantements, ne cessera de renaître comme si le seuil de pauvreté jamais ne touchait une part importante de la population.
Jamais d'envolées lyriques. Juste quelques vols de briques. Jamais de considérations oiseuses sur le bien et le mal. Des histoires qui s'enchevêtrent et racontent des hommes. Aucun aphorisme d'écrivain qui se regarde écrire mais le détail qui succède au détail.

Avant j'aimais Lehane. Mais ça, c'était avant. Aujourd'hui, je ne le réduis pas à un auteur de. Avez-vous remarqué combien est réducteur tout complément du nom écrivain? Être écrivain de romans policiers pose moins qu'être écrivain. Pourtant, sans vouloir être mauvaise langue, je connais moult écrivains-tout-court qui ne valent guère l'usure des yeux même minime que la lecture de leur prose reliée engendre. Mais ceci est une autre littérature.

Avant j'aimais Lehane. Mais ça, c'était avant. Maintenant j'aime Lehane.
Il y a juste qu'après un pays à l'aube je possède la preuve que cet écrivain-là est un grand écrivain. Il a su dresser un portrait politique, social, moral d'une Amérique charnelle, pleine de suie, de mélasse, de fureur, d'espoir et de haine. Et il lui a suffi d'incarner quelques destins pour ce faire.
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Ayant une expérience limitée de Dennis Lehane (le 1er Kenzie-Gennaro et c'est tout), je m'attendais à un polar du même type, avec le même style impayable, mais situé dans la Boston des années 1918-1920 et prenant comme héros les grands-parents des détectives de la tour d'église. Un pays à l'aube, ce n'est pas ça du tout... et c'est probablement tant mieux pour nous !

Pour commencer, ce n'est pas un thriller à proprement parler, plutôt un roman historique sombre autour de 2 thèmes importants : le syndicalisme et le racisme (j'oubliais, ça parle aussi d'un 3ème thème important de temps en temps : le baseball). le livre apporte certes son lot de morts violentes, d'agressions et d'injustices, mais sans qu'il y ait enquête ou qu'on s'interroge sur les auteurs et les mobiles. Non, ce sont simplement des événements de la vie courante pour ceux qui ne se trouvent pas du bon côté de la barrière en cette période troublée (et ils sont nombreux, que la barrière vienne du statut social, de la couleur de peau ou simplement d'une histoire personnelle malheureuse).

Ensuite, les personnages sont plus nombreux, plus complexes, et on fait connaissance avec eux plus en profondeur (alors que dans un polar ''classique'', l'intrigue policière occupe presque toute la place). Évidemment, on s'attache à Danny, flic qui suit au départ les traces de son père le capitaine, jusqu'à ce que sa conscience s'éveille au fil de ses missions d'infiltration, de l'aggravation des terribles conditions de travail de ses collègues et des injustices faites aux Noirs. À Luther aussi, qui personnalise les impasses auxquelles un Noir se trouvait confronté à cette époque-là, aussi doué, idéaliste et malin soit-il. À Nora enfin, dans une certaine mesure la femme fatale de l'histoire, embourbée dans ses souhaits paradoxaux de liberté et de respectabilité. J'aurais aimé les connaitre, tous les trois, partager un verre de vin avec eux sur le toit, plaisanter et refaire le monde. Les portraits des personnages secondaires sont très réussis aussi : de Babe Ruth qui aimerait être un grand homme mais ne parvient qu'à être un grand joueur de baseball (assez sympathique, malgré tout) au lieutenant Eddie, le gentil parrain de Danny qui bascule parfois dans les préjugés et la haine (nettement moins sympathique, pour le coup). Puis toute la famille Coughlin, Lila, les Gidreaux, les communistes, les anarchistes, les policiers, les syndicalistes...

Parce que c'est ça, la dernière particularité de ce roman : il est basé sur un fait réel méconnu, la grève de la police de Boston en 1919, et nous apprend énormément de choses sur la période, les mentalités et les événements. Cela se traduit dans le style, plus sérieux et moins percutant, mais toujours fin et agréable. On se sent (un peu) plus intelligent après la lecture, je me suis même surprise à reconsidérer ma position sur les syndicats (ou à tout le moins à me dire que je devrais me documenter plus sur la question).

Bref, une lecture tout à fait passionnante (mais je me réjouis quand même de retrouver le Lehanne de Kenzie-Gennaro dont j'avais vraiment adoré l'humour, par ex 'Gina-du-bain-moussant' qui est devenu culte pour moi).
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Une seule chose à dire, moi aussi, je suis Lehane-fan!
Dans la série Kenzie-Gennaro, sans doute un faible pour Ténèbres , prenez moi par la main, et Gone, baby gone dont j'ai d'ailleurs aimé aussi l'adaptation par Ben Affleck;
Mystic River, et Shutter Island ( un monument dans la manipulation du lecteur, celui-là.. ), excellents.

Un pays à l'aube est grand roman américain. Racontant cette nation et ses habitants à un moment donné. Avec les injustices , les jeux truqués d'avance, mais aussi la foi en un pays .
Un pays à l'aube de la modernité, dans un cadre de temps court et bien situé, l'effervescence régnant à Boston à la fin de la Première guerre mondiale. Epoque assez symétrique à la nôtre, crise économiques, désarrois idéologiques et terrorisme mené par des groupes radicaux d'origine européenne. C'est foisonnant, de personnages, de croisements de destins , la construction , ponctuée par les retours du personnage de Babe Ruth, héros du baseball de l'époque , le sport américain par excellence, ne laisse pas une minute de répit au lecteur, c'est bien sûr « cinématographique » , mais aussi, et encore une fois, très actuel et passionnant.

Pas encore lu "Ils vivent la nuit", ça ne saurait tarder!


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L'auteur aurait-il fini de régler ses comptes avec son enfance ?
Ce récit est beaucoup moins sombre que les précédents, pourtant renommés à juste titre.
En le lisant, j'ai beaucoup pensé à Howard Zinn et son "Histoire populaire des Etats-Unis", cité d'ailleurs en remerciements.
Dennis Lehane nous narre un pan méconnu de l'histoire de son pays, plus particulièrement celle de la ville de Boston, cadre pour lui familier.
Cette cité est secouée, en 1918-19, par une série de catastrophes : attentats anarchistes, explosion d'une raffinerie sucrière et, pour finir, grève de policiers, d'où émeutes et pillages.
Nous suivons plusieurs personnages, noirs ou blancs, bien rendus, aux caractères forts. L'écriture est, elle, toujours aussi fluide.
En bref, voici un roman parcourir impérativement pour connaître un peu mieux un épisode oublié, du moins par les Européens, de l'histoire de ce grand pays.
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Boston, Danny Coughlin, fils d'un ponte de la police locale, est un simple flic qui aspire à grimper les échelons au plus vite. Dans l'Ohio, Luther Laurence est un ouvrier noir qui vient de perdre son boulot. Avec sa compagne enceinte depuis peu, il part pour Tulsa. En cette fin de première guerre mondiale, l'Amérique souffre économiquement et les classes populaires ont du mal à joindre les deux bouts. Les grandes luttes syndicales se développent et anarchistes et bolchéviques venus d'Europe commencent à faire parler d'eux. Pour obtenir sa promotion, Danny doit infiltrer ceux que les forces de l'ordre appellent les « séditieux ». de son coté, Luther s'acoquine de trop près avec quelques truands locaux et doit quitter au plus vite l'Oklahoma. Deux destins à priori impossibles à réunir et pourtant leurs routes vont se croiser au cours de l'année 1919, pour le meilleur et pour le pire.

Rien de plus classique que d'insérer la petite histoire dans la grande mais quand c'est fait avec une telle maestria, on se régale. La description des événements de cette année 1919 à Boston, qui culminera avec la grève de la police et les émeutes qui s'en suivront, est palpitante. Très documenté sans jamais tomber dans le didactisme, le roman vous emporte dès les premières pages. Lehanne décortique le processus politique et social qui a poussé les policiers à entamer la première grève des forces de l'ordre en Amérique. On découvre la chasse aux sorcières menée contre les « rouges », les manigances pour briser toute aspiration syndicale, l'espoir d'une vie meilleure pour ses hommes et leur famille qui se fracasse face à l'intransigeance des élus. Et puis avec Luther, on plonge au coeur des premiers mouvements de défense de la cause noire et on reste abasourdi devant le traitement réservé aux gens de couleur dans une ville de l'Est pourtant réputée pour être une des plus tolérantes du pays.

La construction est imparable et les chapitres consacrés aux émeutes urbaines sont d'un réalisme à couper le souffle. Personnages nombreux et incarnés, art consommé du dialogue, alternance entre tension dramatique, scènes plus légères et explosion de violence, le canevas est tissé au millimètre. du grand art !

Lien : http://litterature-a-blog.bl..
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Les héros sont d'une part des irlandais, 1ère et 2ème génération d'émigrés à Boston, qui vouent leur vie à la police et leur ascension sociale. D'autre part on suit un jeune noir qui tente de vivre une vie d'homme libre dans une Amérique encore très raciste et très violente. C'est un monde en crise où on meurt de faim sans avoir aucun droit, même pas celui de se plaindre.
C'est une très belle histoire qui retrace les destins croisés de quelques uns tentant de bâtir une société plus juste contre le capitalisme sauvage, le racisme le plus brutal, l'hypocrisie des classes moyennes et la religion dans ce qu'elle a d'aliénant.
Il s'agit aussi du récit de la naissance du syndicalisme, dans ses beautés et ses excès.
Poignant, violent, très fort.
J'ai aimé TOUT ce que j'ai lu de lui.
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États-Unis 1918, la Première Guerre mondiale prend fin et une nouvelle ère se dessine. Danny Coughlin est blanc, descendant d'une famille irlandaise, il est policier comme son père. La prohibition, les révoltes de travailleurs, une épidémie de grippe espagnole, des attentats, le travail de flic est mis à rude épreuve. Sans compter les inégalités sociales et le racisme qui engrangent un climat permanent de tension. le pays est en crise, la vie est devenue trop chère et les salaires ne suivent pas, même les flics songent à faire grève. Ses chefs lui demandent d'infiltrer les milieux anarchistes et communistes afin de connaître tous leurs projets pour qu'ils puissent anticiper leur lutte. Luther Laurence est noir, lors du retour des soldats blancs, il est licencié de l'usine qui l'emploie à Columbus. Forcé de s'expatrier pour trouver du boulot, il s'installe avec Lila à Tulsa en Oklahoma, un des rares états où les noirs peuvent avoir un travail décent. le jeu, l'alcool, la drogue, l'argent facile entraînent rapidement Luther dans une sale histoire qui le contraint à fuir l'état. Il se retrouve à Boston où il se fait embaucher au service des Coughlin comme homme de maison. Une amitié sincère se crée entre Danny et Luther, chacun dans leurs luttes, leur destin va se trouver scellés à jamais. L'auteur signe ici une grande fresque historique et sociale digne de Zola. Il faut une certaine persévérance pour affronter cette part de l'histoire de l'Amérique en presque huit cents pages. le tout est très dense, foisonnant de personnages emblématiques, décrivant un contexte intense où les injustices poussent malgré tout le lecteur à poursuivre afin de trouver une issue positive qui heureusement arrive par le côté romanesque.
Lien : http://ma-bouquinerie.blogsp..
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Un an dans la vie des Etats Unis. Un an, vu au travers de 3 personnages principaux et de leurs familles qui vont se croiser, un flic de Boston, un jeune noir criminel pour se défendre et un peu truand, un joueur professionnel de base ball.

Septembre 1918, les soldats américains ayant combattu en Europe reviennent au pays, ils apportent dans leurs bateaux la grippe espagnole, ils arrivent dans un pays marqué par la crise, le chômage, les attentats des "bolcheviks" des anarchistes, des russes, la montée du syndicalisme, le développement des grèves, les assassinats de grévistes, les tensions raciales.

Pendant cette année, l'auteur va nous faire voyager de la campagne profonde de l'Ohio et de l'Oklahoma, à Boston, du monde pauvre des noirs exécutant tous les sales boulots, au monde des flics sous-payés, et pourtant essentiels dans la lutte contre la montée des violences, flics jouant de la matraque ou cherchant à infiltrer les groupuscules d'opposants, communistes, socialistes, bolcheviques, en passant par celui des joueurs de base-ball bien payés mais aussi grévistes.

Humiliations et oppressions raciales, interdits sociétaux -un blanc ne s'affiche pas avec un noir, une équipe de noirs ne peuvent pas gagner un match improvisé de baseball, argent contre pauvreté, luttes de pouvoirs et tensions au sein de la société ou des familles, magouilles politiques et familiales sont omniprésents. "Vous les Américains, vous avez tout le temps le mot "liberté" à la bouche, mais moi je ne vois que des esclaves qui se croient libres. Je vois des usines qui exploitent, et les enfants et les familles"

Un livre s'appuyant sur des faits historiques avérés, un livre reportage, mais pas un livre policier, pas de traque, pas d'intrigue, pas d'enquête, un livre sur une amitié interdite entre un jeune flic blanc et un jeune noir, 750 pages de plaisir.

Lien : https://mesbelleslectures.co..
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« Un pays à l'aube », ce sont les Etats-Unis à l'aube des années 20, bien avant la prospérité, le jazz, les gratte-ciel et les lumières dansantes de New-York.
Nous sommes en 1918, le pays sort du premier conflit mondial et se trouve bousculé par les idées subversives qui ont secoué toute l'Europe. Influencés par les milieux anarchistes et bolchéviques, les syndicats se développent. de nouveaux immigrants débarquent, les grèves se multiplient et la population noire est chaque jour durement réprimée pour vouloir défendre ses droits civiques. Au sein de cette brûlante atmosphère politique et sociale, le récit débute avec le personnage de Babe Ruth, vedette mythique du baseball américain qui a réellement existé. Car en effet, Dennis Lehane, avec tout son art de la narration, mêle habilement personnages réels et fictifs. Il fait ainsi apparaître John Edgar Hoover, futur chef du FBI. Mais nous suivons surtout l'histoire de Luther Laurence, un jeune ouvrier noir, militant malgré lui, aussi généreux que désabusé ; et celle de Danny Coughlin, jeune agent de police de Boston, bien vite chargé par ses supérieurs d'infiltrer le milieu anarchiste et syndical. A leurs côtés, en parallèle de leur vie affective, nous vivons les émeutes de 1918-1919 et l'historique grève des policiers de Boston.

Roman fleuve, « Un pays à l'aube » nous conte l'Histoire à travers la petite histoire. le personnage de Luther nous fait partager la lutte des Noirs pour leurs droits civiques, le racisme et la violence subis quotidiennement. Danny nous dévoile la puissance et l'influence des hauts fonctionnaires tout en mettant l'accent sur ces simples agents de police qui jouent leur vie dans le tumulte des émeutes, pour une paye de misère... Ceux qui répriment ont très souvent les mêmes angoisses que ceux qu'ils repoussent : des conditions de vie et de travail précaires qu'ils ne peuvent plus supporter. Enfin la terrible épidémie de grippe qui frappe à cette époque est elle aussi largement décrite. Dennis Lehane nous dresse donc un tableau de l'Amérique sans concessions : peinture sociale, historique et politique, « Un pays à l'aube » nous plonge dans l'Histoire tout en suivant les craintes et les doutes, les espoirs et les contradictions de chacun. Un pays en plein tumulte qui va basculer dans la modernité.
Un livre dans la lignée de "Germinal" ou des "Raisins de la colère", un roman humaniste avant tout.
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Un bon roman qu'il est difficile de classer. Je le mettrais dans la catégorie de roman d'aventure avec un ancrage historique et sociétal important.

On apprend énormément sur Boston au début du 20ème siècle, la place (ou plutôt la non place) des Noirs dans la société, l'émergence des mouvements sociaux (syndicat de la police), la grippe espagnole, ...

Tout ceci à un rythme assez soutenu, avec un focus sur les 2 protagonistes principaux : un policier blanc de Boston et un jeune noir.

J'ai passé un bon moment avec ce livre qui se lit vite malgré ses 800 pages.

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