Avec
Triste vie, on connaissait
Chi Li, auteure connue pour être une figure de proue du néo-réalisme chinois ...
Revoici dame
Chi Li avec
Tu es une rivière.
Et c'est pas plus gai que
Triste vie, l'auteure ne renie pas son étiquette : Lala se retrouve veuve à trente ans, affligée de 7 gamins et c'est la dure et sordide vie de cette famille de la Chine profonde qui nous est contée ici, du début des années 60 à la fin des années 80.
En chinois, l'idéogramme qui signifie population représentait (avant la simplification de l'écriture) ... une bouche à nourrir !
La prose de
Chi Li est toujours aussi simple, claire et fluide (les 200 pages défilent presque aussi vite que le minuscule
Triste vie).
Elle convoque d'un ton très égal les menus soucis et les grand drames, les brosses à dents et les puces ou les poux, les amours folles et les morts cruelles. Bref, la vie, toute la vie et rien qu'elle.
Comme dans l'opuscule précédent, on retrouve ici aussi les enfants au centre du roman (et il y en a !). Ils ne sont pas qu'un décor et les relations parents/enfants sont décortiquées sous le scalpel de
Chi Li, et c'est plutôt rude.
Dans cet intéressante histoire de la famille de Lala, c'est aussi plus de trente ans de l'histoire contemporaine chinoise qui défilent avec les années de la Révolution Culturelle et la ruralisation forcée, tous ces événements qui n'en finissent pas de hanter la littérature chinoise.
Des événements sur lesquels
Chi Li porte un regard presque nostalgique, comme d'ailleurs on avait déjà pu le relever dans
Triste vie.
Des événements vus par le petit bout de la lorgnette, depuis une petite ville de province (une écume qui témoigne ainsi de la violence de ces vagues de fond qui ébranlèrent ce pays gigantesque et son milliard d'habitants).
L'écriture facile et rapide de
Chi Li accentue le mouvement : le torrent de la vie emporte tout sur son passage, certains se retrouveront abandonnés sur la rive, d'autres finiront noyés ou brisés sur les rochers, mais le flot tumultueux poursuit inexorablement son chemin, emportant avec lui ceux qui auront survécu.
La rivière de la vie c'est aussi l'histoire récente de la Chine : un pays démesuré et son innombrable peuple qui auront dévalé en moins de trente ans la route chaotique que nous avons mis plus d'un siècle à parcourir.
Comme celle de la vie, cette rivière-là n'aura pas été un long fleuve tranquille.
Triste vie prolonge ce flot en décrivant « la suite », les années 80/90, l'industrialisation et la modernité.