Dans la plupart des familles, les disputes dégénéraient généralement en pugilats, et bien souvent la police était alertée par un coup de fil anonyme. Les jeunes, eux aussi, étaient régulièrement impliqués dans un délit quelconque. Le taux de chômage était élevé, et la consommation d’alcool encore plus. Toutes les familles avaient leur délinquant. Il n’était donc pas question de faire appel aux flics : la police, c’était l’ennemi.
Il n’y avait rien de réjouissant à venir s’asseoir auprès d’un infirme et à contempler sa mine douloureuse.
Il est évident que passer sa vie dans une institution spécialisée, scotché à un fauteuil roulant, sans aucune perspective d’avenir, ce n’est pas vraiment rigolo.
Quand on veut, on arrive toujours à se débrouiller. Plus il y a d’interdits, plus il y a de moyens pour les contourner.
La peur, c’était ce qu’il y avait de pire. Toute forteresse contre la peur, même si elle devait en même temps faire obstacle au contact humain, aux amitiés et à l’amour, était la bienvenue.
Seuls ceux qui n’étaient pas obligés de vivre dans ces baraques pleines de courants d’air, équipées de fenêtres miniatures qui fermaient mal, de pièces minuscules et d’escaliers où on risquait sa peau à chaque marche, pouvaient se permettre d’être extatiques.
A seize ans, ils se prennent pour des adultes, alors qu’en réalité ce sont encore des enfants. Et on a peur pour eux.
Sa pauvre maman lui avait évidemment appris qu’on ne partait pas avec des messieurs qu’on ne connaissait pas. Qu’on ne montait jamais dans leur voiture, et encore moins chez eux.