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De mai à juillet 2019, Sandra Lucbert assiste au procès des dirigeants de France Télécom, le « Nuremberg du management » comme l'appelle un internaute du Figaro. « Parfois, Didier Lombard s'endort pendant le récit d'une pendaison. Il digère. » « Cette histoire de suicides, c'est terrible, ils ont gâché la fête. », regrette-t-il. « On n'a pas si souvent l'occasion de voir à nu la guerre des classes. » Avec rage et détermination, elle va décortiquer la novlangue managériale à l'oeuvre et l'organisation du travail qu'elle dissimule et défend.
(...)
Cet exercice de salubrité public s'avère d'une terrible puissance subversive et instructive.

Article complet sur le blog :
Lien : https://bibliothequefahrenhe..
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Le procès de France Télécom n'a pas eu lieu ou plutôt il a bien eu lieu 10 ans après la vague de suicides et le harcèlement moral qui a sévi au sein de cette entreprise en mai 2019 mais en lisant "Personne ne sort les fusils", on a l'impression que l'on est passé à côté.

Pourquoi ? Parce que les dirigeants prévenus, plein d'arrogance, qu'on interroge longuement, ne voient pas où est le problème.
Pire, l'un d'entre eux déclare : "Cette histoire de suicides, c'est terrible, ils ont gâché la fête." Il n'y aura donc pas de pardon face aux 39 salariés qui se sont portés partie civile et encore mieux de remise en cause de cette organisation transformée en véritable machine à produire du "flow" pour reprendre les mots de l'écrivaine.
Quel message la justice donne-t-elle quand la peine maximale encourue est de 15 000 euros et un an de prison avec sursis quand Olivier Barberot, DRH, gagne 540 000 euros par an!

Le parti pris du livre de Sandra Lucbert c'est celui de décortique la langue managériale, celle apprise dans toutes les écoles de commerce, celle qui traduit notre monde ultra-libéral, celle qui nomme les salariés des collaborateurs mais qui les placardisent quand ils ne produisent plus assez.

"Un salarié n'est plus un salarié, c'est un partenaire" à propos d'Uber (et on pense forcément en lisant ces pages au très beau dernier film de Ken Loach)
Sandra Lucbert souligne bien combien il est ironique d'appeler des plans visant à virer 22 000 personnes, NEXT et ACT.
Dommage qu'aussi interessante soit elle on a l'impression que l'étude de cette langue prenne le dessus sur tout, s'appuyant sur Kafka ou Rabelais .
S'installe alors pendant la lecture la désagréable impression de lire une thèse érudite de linguiste et de rester en dehors de ce procès. Lorsqu'on vous dit qu'on est passés un peu à coté de ce procès!
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Sandra Lucbert n'a pas trempé sa plume dans l'acide... d'un agent Orange, non ! Elle est bien plus chevaleresque que cela, bien plus fine lame : elle l'a aiguisée aux meilleures pierres, celles des sciences humaines, celles qui font de l'Homme leur objet comme leur fin. Et comme elle est aussi artiste, elle a polie sa plume tranchante d'éclats d'une langue littéraire rare.
Son analyse des ressorts de la domination est brillante même si elle n'est pas tout à fait inédite. Bien des spécialistes et notamment des sociologues ont déjà montré les effets du langage managérial et de la « culture gestionnaire » qui s'imposent depuis des décennies (cf. par exemple le nouvel esprit du capitalisme de Boltanski et Chiapello ou les travaux de Vincent de Gaulejac) et encore les conséquences (de même que les sous-bassement idéologiques) de l'atomisation des collectifs de travail (sciemment recherchés et imposés par des dispositifs de mise en concurrence de chacun avec chacun, cet acharnement à faire de l'homme un loup pour son prochain) de même que les techniques de fragilisation, notamment par le transfert du savoir-faire du salarié à ses outils, véritable entreprise de « déprofessionnalisation »/désarmement dans le rapport de force entre le subordonné et son employeur (cf. par exemple les travaux de Danièle Linhart ou ceux de Christophe Dejours). Mais ses « chroniques » du procès France Télécom ont ce brillant et cette force que même les études les plus savantes, les mieux menées, et jusqu'aux plus engagées ne parviennent pas à atteindre. Parce que Sandra Lucbert livre un travail d'une précision chirurgicale, découpe au scalpel la langue, radiographie les corps et leurs postures, capte les signaux faibles, déchiffre les codes, met à jour les fondations de la mécanique d'ensemble, de la Grande Machine. Elle s'est armée de toutes les sciences et sciences et sait manier le tranchant de chacune en experte, avec un art et une manière de dire qui frappe, un art de souligner qui gifle, une manière d'enfoncer la démonstration comme on le fait d'un coup de poing savant : qui doit permette de se dégager la place dans la garde de l'adversaire, porté là où ça fait mal. Personne ne sort les fusils mais Sandra Lucbert tire à mots réels, elle perfore la muraille de l'ennemi par des obus du sens, elle flingue les chiens de garde et, parvenue au coeur de la place adverse, immole les fausses idoles qui se posent en guides . Dans son combat, elle met à jour toutes les contre-vérités qui nous lient et nous bâillonnent. Ses cartouches issues des meilleurs fabriques, rabelaisienne et kafkaïenne, sont d'une puissance justicière. Et ça fait un bien fou.
C'est un livre indispensable comme me disait l'ami plus indispensable encore qui me le mit entre les mains.
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Le procès de France Telecom après la vague de suicide du personnel vu et analysé par l'auteur. Un recueil plus témoignage/essai que roman qui repasse les tristes événements et les manières on ne peut plus voyoutes et scandaleuses des DRH.
Un livre très instructif.
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Sandra Lucbert après avoir assisté aux procès des dirigeants de France Télécom constate que "personne ne sort les fusils" puisque dans la salle d'audience tout le monde parle la même langue. Impossible alors de dénoncer ce monde qui valorise la valeur financière au mépris de l'humain. Elle va chercher des comparaisons dans d'autres formes littéraires, Kafka, Bartoldi, Rabelais pour démanteler toute la logique sociale mise en oeuvre à partir de sa langue . C'est ce qu'elle appelle la LCN ( Lingua Capitalismi Neoliberalis ).
Si les fusils ne sont pas encore sortis, la langue est tranchante et dynamite les processus du capitalisme. le chef d'entreprise Michel Bon selon l'Evangile néo-libérale ne transforme-t-il pas Jésus en manager avant l'heure !
Les dernières pages fusent dans une prose poétique grinçante.
Cet essai vient de recevoir un prix hautement mérité.
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Un ouvrage qui explore une réalité sociale, politique et on peut dire historique de manière littéraire, mais pas seulement. On ne peut s'attendre à un déroulé du procès de France-Télécom, ni à une histoire à proprement parler des suicides, mais c'est plutôt une série de courts chapitres qui portent sur des thèmes récurrents, des aspects présentés, des vérités qui s'échappent à travers les mots dits ou des manières d'être de certains durant le procès. Cela m'a fait penser à l'ouvrage d'Eric Vuillard "Ordre du jour", le livre parle bien d'un fait historique comme je le disais, mais sans s'attacher à la chronologie, non plutôt à autre chose autour du sens de ce qui s'y joue. Elle présente ainsi ce qu'elle nomme la LCN, Lingua Capitalismi Neoliberalis ou Langue du Capitalisme Néolibéral, comme Victor Klemperer avait fait avec la langue des nazis, la LTI, Lingua Tertii Imperii ou Langue du 3ème Reich, ce qui permet de déposséder les gens de ce qu'ils sont ou ce qu'ils font. Elle commence par un retour sur le procès de Nuremberg. Comme en son temps Hanna Arendt s'était servi du procès Eichmann pour montrer en quoi il était révélateur de la banalité du mal, ici elle développe la bonne conscience de ces accusés qui ne comprennent pas ce qu'on leur reproche et en quoi les victimes sont les leurs. Bref un livre qui dessille sur la place et le langage du pouvoir, et surtout sur le fonctionnement du capitalisme.
https://www.youtube.com/watch?v=4QI8neQkbRI

Lien : https://www.franceculture.fr..
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Le plan NExT consistait à supprimer plus de vingt mille postes chez France Télécom. L'entreprise et ses dirigeants ont été condamnés pour harcèlement moral. Sandra Lucbert braque ses projecteurs sur la sémantique - NExt et autres dérivés - qui a avalé les postes, les salariés. Les gens.

La littérature ne sort pas les fusils.
Elle débusque les balles perdues de ce monde.

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Je ne veux en aucune manière mettre en cause ni la culture de l'auteur ni sa volonté de dévoiler en l'occurrence les pièges du langage utilisé pour traiter, juger l'affaire de France Telecom.
Pour ma part, à part un début prometteur et éclairant sur la capacité des mots (euphémisation) à dissimuler la réalité cruellement sensible du néo libéralisme au quotidien de l'entreprise, j'ai eu ensuite beaucoup de mal à suivre les références de l'auteur et me suis un peu noyé parmi les différents fils tissés ça et là. Poëtiques, auteurs ect...Et eu du mal à aller au bout.
Peut être me faudra t-il tenter de le relire
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Puissant récit sur la société capitaliste et comment elle broie les hommes, Personne ne sort les fusils revient sur le procès de France Telecom pour illustrer la terreur que fait peser ce modèle sur les hommes.

Sandra Lucbert assiste au procès de la société France Télécom de mai à juin 2019. On y juge les sept dirigeants du groupe après une vague de suicides de leurs salariés. Mis en cause dans cette affaire pour avoir organisé la maltraitance de leurs salariés, ces sept cadres dirigeants doivent répondre de leurs actes devant la justice.

C'est devant une cour de justice qu'on doit maintenant régler les affaires humaines d'un employeur. le groupe est jugé pour avoir orchestré un plan massif pour rendre impossibles les conditions de travail ainsi que la vie de 12 000 employés. Comparaît ainsi la puissance de l'économie française dans un procès que Sandra Lucbert qualifie d'impossible. Impossible car la justice est à la solde de ces groupes.
Lien : http://untitledmag.fr/rentre..
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Virer 20 000 personnes, sans plan social mais en les harcelant jusqu'à ce qu'ils partent d'eux même, ça fait des dégâts... et des morts.

Sandra Lucbert revient dans ce cours roman sur le procès des dirigeants de France Télécom ayant eu lieu en 2019 environ 10 ans après les faits. Ces derniers relèvent d'un plan massif de harcèlement de leurs employés dans l'objectif d'en pousser 20 000 au départ en 3 ans, avec pour conséquences de nombreuses vie amochées et des suicides par dizaines. Plutôt qu'un récit point par point du jugement, Personne ne sort les fusils assigne à une réflexion sur ce que porte comme signification cet évènement. Convoquant Kafka, Melville ou Rabelais, l'ouvrage étend la question à la société néolibérale.
Ayant assisté au procès, l'auteure démontre l'impossibilité pour un monde capitaliste et libéral à juger des pratiques issues de son sein. Les accusés, entourés d'une horde d'avocats, ne risquent quasiment rien. Et cet état de fait ressort dans la langue, celle du libéralisme naturalise ce dernier, le rend indiscutable. C'est ce que Sandra Lucbert met en évidence, la complaisance du récit de ce drame par une langue qui est acquise à la cause des bourreaux. « Réforme des structures du financement de l'économie. Un nom pareil, personne ne sort les fusils ». Il faut donc faire sauter ces barrières linguistiques, pour que les fusils puissent à nouveau être sortis... métaphoriquement ou non.
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