Ces Femmes de Heart Spring mountain sont toutes incroyablement attachantes.
Robin MacArthur donne voix à chacune lors de ce roman choral, où leurs histoires s'enchainent dans de courts chapitres placés à différentes époques.
En 2011 en plein ouragan Irène, Bonnie va se promener au bord de la rivière, dans le Vermont ; elle est sous l'emprise de la drogue et disparait. Sa fille Vale, part à sa recherche, et rejoint la maison familiale où vivent la vieille Hazel et sa tante Deb. Elle y reste quelques mois, pendant lesquels elle se nourrit de l'histoire familiale : elle découvre ainsi qui fut le père de Bonnie, qui n'a jamais connu ni père ni mère ; sa mère, Lena, est morte peu après l'avoir mise au monde. Les chapitres consacrés à Lena sont les seuls narrés à la première personne, comme si l'on découvrait ses carnets. Lena était une jeune femme fascinante, qui vivait avec sa chouette dans une cabane au fond des bois : une femme éprise de liberté, en communion avec la nature comme l'étaient les Algonquins qui peuplaient autrefois le Vermont.
En cherchant sa mère, Vale explore le passé familial, inextricablement lié aux terres où vit et a vécu sa famille. Ses recherches lui permettent de comprendre où sont ses racines et la rattachent elle aussi à ces terres ancestrales. On la voit évoluer au fil du roman : la découverte des secrets de famille lui permet de mieux connaitre sa mère Bonnie et de mieux se connaitre elle-même ; elle semble trouver sa place sur les terres familiales.
Dans ses recherches, Vale découvre également les politiques de spoliation et d'acculturation menées par l'état envers les autochtones à différentes époques.
Robin MacArthur revient souvent sur ce génocide, et cite des extraits de No word for time : the way of the Algonquin people, livre de chevet de Lena, redécouvert par Vale : « Deb s'assied devant la table. « Dis-m'en plus sur ce livre que tu lis. » Alors Vale lui parle de No word fot time et de la présence au monde. (…) du fait que, selon Pritchard, le passé est contenu dans le présent, et l'avenir aussi. Elle lui confie qu'elle ne cesse de penser à Marie, son arrière-arrière-grand-mère. A ce qui s'est perdu au fil des générations : le tressage des joncs, les plantes médicinales qui poussent à portée de main, tout ce qui nous donne un sentiment d'appartenance. »
Robin MacArthur semble nous dire qu'en perdant ce lien avec la nature tel que le vivaient les autochtones, nous sommes entrés dans une période de dérèglement climatique que nous aurions pu éviter. Car ces ancêtres étaient « des modèles à suivre pour mieux se conduire en ce monde ».
Une voix masculine s'élève également dans le roman, celle de Stephen, fils de Hazel, mari de Deb, fasciné par Lena. Stephen se construit difficilement au milieu des secrets de famille, et à la différence de Vale n'aura pas pu trouver les clés lui permettant d'élucider ces secrets.
La construction en courts chapitres confère beaucoup de rythme au roman, qu'il devient de plus en plus difficile de lâcher au fil de la lecture. La musique est très présente dans le roman car les personnages y attachent tous de l'importance. La musique est présente également dans l'écriture et le rythme du roman, admirablement bien retranscrits en français par
France Camus-Pichon.
Ce roman est un grand coup de coeur, et je sais que ses personnages vont m'accompagneront longtemps, comme les fantômes des disparus qui hantent ces pages.
Je suis ravie de rencontrer bientôt
Robin MacArthur grâce à #LéaMainguet du #PicaboRiverBookClub et à terres d'Amérique !