AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,69

sur 65 notes
5
4 avis
4
4 avis
3
0 avis
2
1 avis
1
0 avis
Jean, 14 ans, dépenaillé, crasseux et boutonneux, vaque à ses occupations dans l'imprimerie où il a été recruté pour faire les sales boulots, lisant à ses heures perdues tous les livres qui lui tombent sous la main, perdu dans des fantasmes érotiques qu'il nourrit en épiant les voisines, des femmes mûres de préférence. Car l'été est chaud, très chaud dans ce village des Alpes de Haute-Provence de l'après guerre, les femmes se mettent à l'aise à l'ombre des pas de portes, prennent le frais sur les terrasses, et les commérages vont bon train...

Surtout depuis que les dames du Nord, ainsi nommées car elles viennent des impasses obscures du village s'installer sur la place ensoleillée bordée d'érables, grandes commères, ont découvert que la Naine, aussi laide que méchante, est tombée amoureuse du Jean dont l'insouciance s'horrifie d'une telle malédiction...

Et quand la Sanson, sorte de sorcière que tous craignent, s'en mêle, les morts s'accumulent au passage de la maudite Naine, qui ne tire certainement sa méchanceté que de la sinistre farce que lui a fait l'existence...mais jalouse et frustrée elle sème la désolation.

Dans sa langue truculente Pierre Magnan nous régale encore une fois avec son sens aigu de l'observation des moeurs de ce temps jadis, pas si éloigné du notre sur beaucoup de points, alliant cruauté et tendresse, causes réelles et fantasmées, superstition, réalisme et fantastique dans ce récit qui emprunte beaucoup à son propre vécu. Un régal.
Commenter  J’apprécie          492
Ce livre, La naine, est-ce un roman ? Sans doute oui. Il est rempli d'étrangeté. À forte connotation autobiographique, l'auteur Pierre Magnan écrit en préambule de ce récit les mots suivants : " Tous les protagonistes de ce roman ont emprunté les traits physiques de personnages qui ont existé. Ces êtres étaient les meilleures gens du monde, absolument dénués de passion, de méchanceté comme d'imagination. Il ne leur est rien arrivé d'autre que de naître, prendre le soleil et mourir. L'histoire dont je les ai chargés, je l'ai forgée de toutes pièces. "
Ici l'auteur édifie une ville imaginaire ou qui fait semblant de l'être, aux apprentissages bien réels, sous le soleil de Provence, qui pourrait très bien être Manosque. Il invite le narrateur, un adolescent de quatorze ans à nous en approprier les rues, les coins, recoins, ses secrets, ses envoûtements et surtout ses personnages comme tout droit sortis d'un conte un peu gothique...
Nous sommes au début des années vingt, les cicatrices de la Grande Guerre sont encore dans les mémoires, à vif...
Jean, qui s'appelle en réalité Chrysostome, est embauché comme typographe dans l'imprimerie locale où il est exploité, se voyant confier les tâches les plus ingrates. Il est sale, voire crasseux, malchanceux et malhabile, un visage empli d'acné à faire peur aux filles. À ses heures perdues, il découvre la littérature, le Rouge et le Noir, Eugénie Grandet, l'Annonce faite à Marie... Il aime faire de la lecture un rempart contre le mépris, peut-être un peu comme certains d'entre nous ici...
Il découvre aussi l'érotisme en épiant quelques voisines d'âge déjà mûr qui prennent le soleil en tenue très légère derrière les paravents de leurs balcons ou de leurs jardins...
C'est l'été de ses quatorze ans, une saison brûlante à bien des égards...
Une jeune fille, naine, qu'on appelle La Naine ou bien encore Nène, laide et méchante, vendeuse de chapeaux dans une boutique qu'elle tient avec sa soeur, aime follement Jean. Mais la réciproque n'est pas vraie...
Nous découvrons cette ville mythique et mystique à travers les déambulations érotiques de Jean, sans cesse pourchassé par la naine, éperdument amoureuse, jalouse aussi de ses pérégrinations. C'est à la fois cocasse, coquin, mystérieux et douloureux à la fois..
Cette ville pleine de mystères est comme faite pour que les pas se perdent dans ses calades. Et puis tout là-haut sur la place principale, il y a les dames du Nord souvent en cercle, elles savent tout avant les autres, parfois mieux que les autres, elles semblent un peu tirer les ficelles des vies de cette ville, font, défont, refont l'histoire à coup de chuchotements... Parfois elles avancent en procession.
Il y a ici toute une galerie de portraits saisissants, à commencer par La Sanson, sorte de sorcière qui, un jour, intime au garçon l'ordre d'aimer la naine. Cette injonction est presque une menace...
Il y a l'Agassonne, il y a Germaine, il y a Gentiane, il y a l'avocate, il y a Victor et son père l'Orfeo Bellatroce et bien sûr il y a la naine, des personnages qu'ont croirait parfois possédés par une malédiction...
Ah! La naine... Tissant sa toile autour de Jean, le traquant comme un oiseau de proie. Son regard d'amour qu'elle jette parfois sur lui, implorant la pitié, mélange de douleur et de force maléfique...
Dès lors, cette ville est prête à voir se déverser sur elle tous les sortilèges possibles dans les méandres de ses rues et l'errance de ses habitants... Les vivants et les morts qui se côtoient, se frôlent sans cesse...
Et puis un jour, un cirque maudit, hanté par la tragédie, revient à cette ville...
J'ai aimé la langue, le style ample, riche de Pierre Magnan, son côté lyrique, truculent. Il y a ici une poésie du sublime et du tragique. Ce sont des mots gorgés de soleils, d'effluves et d'épines.
J'ai aimé ce roman d'apprentissage, conte cruel, fable d'une éducation sentimentale espiègle, tendre, triste, douloureuse, effleurant par moments le fantastique...
Jubilatoire !
Commenter  J’apprécie          404
L'auteur Pierre Magnan né en 1922 décédé en 2012.

Il situa tous ses écrits en Provence, la terre où il était né et où il rencontra Jean Giono et Thyde Monnier.

Ce livre est magistralement écrit, pour qui aime la langue française on peut dire qu'il en connait toutes les ficelles et surtout qu'il utilise un vocabulaire vraiment très riche avec des mots qui (pour certains) m'étaient inconnus (j'ai donc dû prendre mon dictionnaire) ; mais quel plaisir de lecture que ce livre qui se situe dans les années 1920/1930.

Jean, que tout le monde appelle ainsi, mais qui se prénomme Chrysostome, est à l'été de ses quatorze ans et nous fait vivre avec lui la vie d'une petite ville de Provence avec ses notables qui ont des demeures situées au soleil, et "les dames du Nord" qui vivent côté ombres.

Ces dames se retrouvent le soir sur le pas de leur porte observatrices et commentatrices des faits et gestes de tout un chacun.

Rien n'échappe aux regards affutés de ces commères.
Vraies ou fausses un tas d'histoires circulent.
On y découvre La Sanson une espèce de sorcière discrète à qui l'on prête des pouvoirs extraordinaire de vie et mort sur chacun ; la naine affreuse petite chose de 88 cm de hauteur qui va se prendre d'amour pour Jean et le poursuivra de ses assiduités jusqu'à commettre, du moins tout le laisse à penser, des actes irréparables.

Cette histoire en grande partie autobiographique,l'auteur dit :
' L'histoire .... je l'ai forgée de toutes pièces .
De même serait il vain de vouloir juxtaposer une réalité quelconque sur les lieux que je décris.
Mon personnage principal dit : "J'avais édifié une ville mythique planant au-dessus de la vraie et c'était en elle que je me consolais."
C'est exactement ce que j'ai fait.

Quelques mots désuets dont j'ai du chercher le sens :
- catharsis
-dysphorie
- l'ombre ocellée
- nos Erinyes en deuil
- le calame
- la manustupration
- coryphées du destin .

Commenter  J’apprécie          221
Utilisant les lieux de sa jeunesse et des personnages qui y vivaient, Pierre Magnan invente une histoire un peu folle. On peut la situer vers les années trente ou quarante.
Une ville où tout le monde s'épie, où tout le monde sait tout sur tout le monde. Et là, vit une naine, Madeleine, qui tombe amoureuse de Jean, en réalité Chrysostome, apprenti typographe de quatorze ans. Elle mettra tout en oeuvre pour parvenir à ses fins. Superstitions et maléfices envahissent la ville.
L'ambiance est parfaitement rendue. La description des personnages est peut-être un peu longue avant qu'on ne plonge véritablement dans l'histoire. Mais tout est assez finement détaillé.
Ressort de ce roman l'importance de l'imagination qui aide à supporter la réalité quand celle-ci ne correspond pas à nos attentes.
Globalement, c'est une lecture surprenante et plutôt agréable.
Commenter  J’apprécie          203
C'est une histoire étrange et tragique, comme le sont souvent les histoires des hommes. Un conte crépusculaire peuplé de femmes extraordinaires, où les hommes sont soit des pantins, soit des ombres fugitives. Sauf le narrateur, Jean. Il a 14 ans, il est pauvre, indolent à la limite de la paresse, et a pour seules passions l'observation des femmes (et les rêves érotiques qu'elle suscite) et la lecture. Pour son malheur, il attire l'attention du personnage le plus pittoresque et le plus dérisoire de sa petite ville : une naine grotesque, risée des habitants, qui est tombée follement amoureuse de lui. Devant le dégoût horrifié de Jean à son égard, elle va faire appel aux mystérieux pouvoirs de la Sanson, terrifiante sorcière locale qui tient la population sous sa coupe. Et c'est alors que le drame va sa jouer...Avec un très grand talent et beaucoup de poésie, Pierre Magnan brosse une galerie de portraits de personnages à à la fois ordinaires dans leurs préoccupations quotidiennes, et fascinants dans leur individualité. Comme la Naine, laide, obstinée, et criminelle ; les Dames du Nord, qui commentent impitoyablement la vie de leurs concitoyens comme un choeur antique ; l'irréprochable Agassonne, prête à tous les sacrifices pour sa fille malade, et qui recèle des trésors de sensualité ; l'Avocate, vivante oeuvre d'art, aérienne, enchanteresse, qui mourra dans d'atroces circonstances ; et tant d'autres... On sent à travers l'écriture ciselée de l'auteur toute une vie d'observation de ses frères et soeurs humains. Un regard à la fois froid et distancié, mais aussi pétri de tendresse pour leurs fragilités. Il décrit aussi avec un amour profond la région de Haute-Provence où il a grandi, dure avec les hommes, mais si belle avec ses paysages séchés par le vent âpre, ses sources rares mais d'une beauté sans égale, sa terre aride qui tient amoureux ceux qui y sont nés... Avec la mort de Pierre Magnan au printemps dernier, la littérature française a perdu un grand écrivain, injustement méconnu du grand public. Peut-être avez-vous vu à la télé "La maison assassinée" avec Patrick Bruel ? Ou encore "Les courriers de la mort" ou "Le secret des Andrônes" avec Victor Lanoux ? Sachez que ces téléfilms sont adaptés des romans de Pierre Magnan, et qu'ils peinent à en retranscrire la beauté et la puissance. Alors n'hésitez plus, lisez ses livres, ils le méritent.
Commenter  J’apprécie          80
Quelle magnifique histoire!
Le livre de Pierre Magnan est l'occasion pour lui de nous dresser une galerie de portraits hauts en couleurs dans un village aux mille et une histoires pleines de superstitions.

Jean n'a que quatorze ans lorsque La Naine du village s'entiche de lui. C'est le point de départ d'une série d'événements que plus personne ne semble maîtriser.

L'entrée dans ce roman fut un peu difficile : le niveau de langage et la construction des phrases m'ont semblé compliqués. Puis peu à peu, l'intérêt a pris le dessus.

Au final, une lecture passionnante dans un univers sombre et riche. A lire !
Commenter  J’apprécie          40
Ce roman est en grande partie autobiographique , si le héros se nomme Jean , la ville où il aborde l'adolescence et ses tourments ressemble comme deux gouttes d'eau à Manosque . Petite ville étouffante , sous le regard vipérin des commères , il n'est pas facile d'y être un pauvre et par dessus le marché d'être aimé d'une naine épouvantable et pathétique qui le poursuit de ses assiduités avec l'aide d'une sorcière rurale, La Sanson. Un récit mené avec un grand talent de conteur , ds portraits virtuoses , une sensualité vibrante et malgré la cruauté de l'histoire une empathie pour ses personnages qui se débattent à la recherche de l'amour.
Commenter  J’apprécie          40
Le roman se situe entre les 2 guerres, au début du XXè siècle, dans la Provence chère à l'auteur. Comme toujours, on a l'impression d'y être, d'en respirer les odeurs, d'en entendre la musique, les voix, l'accent, la lumière, mais je n'ai pas vraiment accroché avec cette histoire d'amour entre une naine et un jeune apprenti de 14 ans. Je continue d'adorer Magnan, mais cet opus là ne restera pas mon meilleur souvenir.
Commenter  J’apprécie          40
bizarrement, c'est le premier livre que j'ai lu de Pierre Magnan. Ce n'est pas un policier, genre que j'adore, mais je l'ai découvert plus pour son ancrage en Provence... j'ai ensuite découvert son fameux commissaire Laviolette.
Ce livre est dur, mais beau !
Commenter  J’apprécie          40
Toujours dans sa Provence rurale et « bas-alpine » qu'il aime tant, Pierre Magnan nous conte une bien sinistre histoire où ses personnages n'ont pas existé mais ressemblent à ceux qu'il a connus dans sa prime jeunesse. Il affirme qu'ils sont «  absolument dénués de passion, de méchanceté comme d'imagination ». À la fin de ma lecture, il m'a fallu revenir sur cette introduction pour la relire et n'y voir que pure ironie.
Commenter  J’apprécie          20


Lecteurs (165) Voir plus



Quiz Voir plus

Les écrivains et le suicide

En 1941, cette immense écrivaine, pensant devenir folle, va se jeter dans une rivière les poches pleine de pierres. Avant de mourir, elle écrit à son mari une lettre où elle dit prendre la meilleure décision qui soit.

Virginia Woolf
Marguerite Duras
Sylvia Plath
Victoria Ocampo

8 questions
1720 lecteurs ont répondu
Thèmes : suicide , biographie , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *}