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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Je tiens à remercier Martine Magnin qui m'a confié son roman, le Baiser de Gustav, pour lecture et avis. J'avais déjà beaucoup apprécié sa plume dans 15 nuances de mères et c'est avec curiosité que je me suis plongée dans ce roman dont le titre et la couverture font référence à un tableau de Gustav Klimt du début du XXème siècle.

L'écriture est polyphonique : une narration omnisciente et factuelle alterne avec le JE onirique de Lucie, victime d'un attentat dans le métro parisien alors qu'elle revenait d'une exposition autour de son peintre préféré en compagnie de son père ; depuis, la jeune femme est plongée dans le coma, dans une constante opposition entre elle et « les autres ». Parmi ces autres, il y a sa famille et le personnel soignant. le rapport antagoniste « Lucie/les autres » deviendra progressivement « les autres et Lucie » au fur et à mesure de son long processus de réveil.
Martine Magnin évoque avec brio et poésie l'expérience de mort imminente de Lucie et avec une profonde lucidité teintée d'humour et d'humanité, les réactions de son entourage ; elle dépeint avec précision, détail et humanité la manière dont les proches des victimes sont inégaux devant la douleur ainsi que l'ambiance particulière d'un service de soins intensifs dans un hôpital.
Les personnages sont à la fois surpris dans la posture que l'on attend d'eux, mari effondré mais soumis aux réalités quotidiennes entre enfants en bas âge et travail, soeur dévastée mais très présente, meilleure amie dévouée… Il y a une empathie réelle pour ce qu'ils affrontent avec leurs moments de force et de faiblesse. Mais il y a aussi une mère « excentrique et incertaine », « givrée », « spectatrice d'elle-même » qui redirige le malheur sur sa personne et usurpe la douleur de tous. Quant aux soignants, certains débordent d'humanité tandis que d'autres font leur travail, sans plus.
L'ensemble est minutieusement ressenti par Lucie, du fond de son coma et au fil d'une perception distanciée. Elle s'éloigne et revient, entre passé et présent, dans un univers poétique, surnaturel où les morts lui apparaissent et l'accompagnent tandis que son esprit vagabonde, erre et que son subconscient prend le pas sur son état inconscient.
Dans ce roman, Martine Magnin a su éviter l'écueil du pathos ; si l'émotion est naturellement présente, l'humour et l'autodérision ne sont jamais loin, exutoires pour aller de l'avant.
Elle a même instillé un soupçon de mystère dont je ne parlerai pas pour ne pas trop divulgacher…

Mais le plus intéressant dans ce livre est bien la mise en abyme dans le récit de l'oeuvre picturale de Gustav Klimt, d'abord par petites touches déroutantes puis de manière de plus en plus explicite et de relier les tableaux au récit proprement dit. Personnellement, j'adore quand la fiction romanesque devient un lieu fertile, mais aussi paradoxal, de réflexion sur l'art… et mon horizon d'attente est assez ambitieux.
Ce peintre symboliste, figure de proue de l'art moderne autrichien, m'était inconnu ; quelques recherches m'apprennent vite que c'est un représentant majeur de la scène artistique viennoise, qu'il a réalisé de beaux décors, paysages et portraits considérés comme novateurs et singuliers à son époque. Il est connu notamment pour sa période dite dorée et a provoqué des réactions contrastées à cause notamment de l'érotisme de ses oeuvres où la vie et la mort s'entremêlent. « le Baiser » (1906-1908) est un de ses tableaux les plus connus : il représente un homme et une femme enlacés, dans un décor plutôt abstrait de couleur or. Cette oeuvre est censée représenter l'harmonie amoureuse, fragile et éternelle.
Lucie perçoit peu à peu le monde par le prisme des tableaux de Gustav Klimt, les moments confortables ou privilégiées prennent la couleur or de certaines de ses oeuvres. Pour le lecteur, elle s'apparente à « La belle dormeuse », composition inspirée de la mythologie et chargée d'érotisme… Pour elle, c'est « comme un kaléidoscope fou de tons dorés et sensuels, de motifs floraux souples, de silhouettes longilignes et courbes » sur lequel elle se projette et qui transcende la réalité de son état comateux.

Mon enthousiasme n'a cependant pas été égal tout au long de ma lecture : des digressions vers des histoires en marge de celle de Lucie, bien que touchantes et dignes d'intérêt en tant que telles, les détails physiques des étapes de son coma et des soins qui lui sont apportés, très réalistes et factuels…, un ensemble de petites choses ont pu peser sur mon ressenti. J'ai alors fait des pauses dans ma lecture, laissé Lucie et ses proches pour quelques jours réfléchir sans moi à leur avenir.
L'écriture de Martine Magnin est maîtrisée, fluide ; elle sait raconter la vie sans fioritures, avec naturel. Tout sonne juste, jusque dans les dialogues et les introspections. Elle a un réel talent pour mettre en mot des évènements qui pourraient arriver à tout le monde, à immerger ses lecteurs dans les réalités vécues par les victimes d'attentats et leurs proches. J'ai toutefois buté sur quelques longueurs vers la fin que je ne peux pas développer ici sous peine de trop en dévoiler.

Ce roman a été une belle surprise ; sur le thème de l'art dans la vision romanesque, il a satisfait mes attentes. Ainsi que l'auteure elle-même le dit dans ses remerciements : « sans Gustav Klimt, ce coma aurait perdu tout son charme ».
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L'Art nouveau est un mouvement artistique innovant qui attire mon attention dans certaines créations . Et voilà que je me retrouve avec un livre bien intrigant , “Le baiser de Gustav “ par Martine Magnin , paru aux éditions Pierre Philippe , dont le titre et l‘illustration sont une référence au célèbre peintre symboliste autrichien Gustav Klimt.

L'entrée de ce roman présente une courte biographie de Gustav Klimt en évoquant la complexité de ces oeuvres. Une interrogation s'impose à nous , quel est le rapport avec l'histoire ? Martine Magnin nous invite à comprendre le lien existant , une démarche que je trouve plutôt intéressante .

Le cerveau de Lucie est en pleine ébullition , son corps est inerte sur son lit d'hôpital . Elle est sujette à des sensations étranges , elle ne se reconnaît plus . La fatigue est intense et puise son temps de réflexion . Sa mémoire est trouble comme une vague dans la mer .Le sommeil est un échappatoire à toutes ses craintes qui se diffusent dans son esprit.

Dans cette chambre d'hôpital , des personnes aimantes en plein désarroi se trouvent continuellement au côté de Lucie . Son coma a induit une peur intense dans leur coeur . Dans l'attente de son réveil , le temps semble infiniment long et épuise leurs certitudes .

Lucie laisse un vide énorme dans la vie de Guillaume son mari et de ses petites jumelles , de sa soeur Clémence , et de sa meilleure amie Sohpie .

Martine Magnin nous entraîne dans une narration qui s'alterne entre les différents personnages, graduellement elle évoque un fait dramatique survenu un jour qui se voulait inoubliable , pour nous faire comprendre l'atmosphère inquiétante qui règne au départ.

En un jour merveilleux en compagnie de son père, Lucie visite une exposition au Grand Palais sur les oeuvres de Gustav Klim. Etant une passionnée de ce peintre, son bonheur est indescriptible mais sera de courte durée. Un terrible attentat a lieu provoquant des dégâts considérables ôtant la vie à son père et la laissant vivre dans l'inconnu . Elle se retrouve dans le coma avec un cerveau endommagé et un avenir incertain.

Un malaise évident tournoie continuellement , induisant des craintes du lendemain pour toute la famille . Ce combat incessant avec le néant puise tout de même des ressources inimaginables . le conflit intérieur est perceptible, c'est assez perturbant de vivre dans l'incertitude et ceci se comprend aisément.

Le baiser de Gustav”répand l'amour, sème des sourires et des larmes. Martine Magnin nous mène vers une renaissance de soi tout en évoquant les oeuvres du peintre . Une liaison apparente se peint progressivement , induisant des interrogations sur l'existence . La découverte de l'âme , du corps , est constante ,. L'écrivaine nous plonge doucement dans un processus d'exploration de soi et de l'autre . le renouvellement est profond et intense!

Une lecture agréable à lire .
Lien : http://chroniqueuse6.canalbl..
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Lucie et son papa reviennent de leur visite de l'exposition Klimt, ils sont heureux de ce moment partagé, presque volé au quotidien .
Une parenthèse qui s'achève brutalement par l'explosion d'un attentat aveugle, qui tue Jean et plonge Lucie dans le coma.
Cette parenthèse se transforme en digression pour Lucie qui flotte entre deux mondes. L'un, l'attire dans un cocon douillet et presque joyeux, l'autre essaie de la ramener à la surface de sa vie, celle d'avant.
L'auteur nous amène avec finesse dans cet univers nébuleux.
« J'ai l'impression que ma tête est comme la boîte d'un puzzle qui aurait éclaté dans l'espace, et où chaque morceau chercherait en vain son voisin…
Cette immobilité forcée est incompréhensible.
Je me concentre et tente de commander mes doigts de remuer, mais aucun n'obéit. »
En dehors de ce dernier, de beaux portraits se dessinent de l'entourage : l'univers médical, familial et amical.
Des portraits tendres, d'autres caustiques. On a de l'empathie pour le mari et la soeur. La mère nous fait rire jaune avec son égoïsme, on connait tous des gens qui quelles que soient les circonstances sont repliées sur leur nombril, entre agacement voire sentiments plus violents et pitié nous fluctuons.
Les tableaux de Klimt sont déployés sous nos yeux en mots choisis, célébrant les femmes et la vie. Les couleurs flamboient sous nos yeux, les lignes se dessinent, les sensations sont exacerbées.
Le quotidien de chacun est bouleversé, un planning s'établit avec naturel pour former une chaîne bienveillante autour de Lucie.
Chacun déploie des trésors pour faire face et aucun d'entre eux (ou presque) en sortira différent…
Le temps est suspendu, mais la vie continue. de cette incertitude chacun va tirer un fil d'une pelote de laine et repousser ses limites pour que le fil ne se rompe pas.
Dans le doute, dans cet univers inconnu les gestes banals du quotidien sont autant de ressorts qui viennent dompter les angoisses.
La narration toute en délicatesse et grâce fait bien ressentir les divers aspects de cette situation.
Si le sujet est d'apparence lourde, l'auteur y a mis beaucoup de vie, d'éclairs joyeux car rien n'est noir ou blanc.
Elle a su nuancer en permanence les situations sans tomber dans le pathos.
Elle a écrit un roman de vie, bien mis en lumière où le lecteur peut se voir endosser plusieurs rôles.
Les personnages de Martine Magnin sont autant de reflets de chacun de ses lecteurs.
J'aurais préféré une pagination avec des chapitres distincts pour ce roman polyphoniques, sans ces titres « Lucie » « Les autres » qui visuellement m'ont gênée. Mais c'est un sentiment personnel. Pour la description des tableaux de Klimt j'aurais choisi un encadré sur une page, comme les cartels dans une exposition.
Merci aux éditions Pierre Philippe et à l'auteur pour ce SP.
©Chantal Lafon-Litteratum Amor 11 août 2019.
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