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Citations sur L'archipel d'une autre vie (227)

Leur quotidien, rude et simple, ne visait aucun but édifiant. Il leur fallait trouver du bon mica pour les fenêtres de leur maison et, à l'arrivée des froids les plus âpres, installer le « double vitrage », découpé dans des plaques de glace. Quand les cartouches manquaient, ils chassaient à l'arc et Gartsez finit par préférer ce tir insonore. À marée basse, les poissons piégés au milieu des rochers étaient faciles à prendre et la forêt, à l'automne, débordait de baies. Elkan préparait ce qui leur servait de pain : pâtés composés de graminées, de champignons séchés, de plantules de conifères…
Je me souviens qu'en parlant de cette vie Gartsev me confia, avec un étonnement souriant : « Je n'aurais jamais cru que l'homme ait besoin de si peu. »
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Autour, c'étaient les bombes, la crasse, le sang. Et moi avec plein d'éclats dans le ventre. J'étais en train de mourir, le médecin ne me le cachait pas… Soudain cette petite blouse blanche ! Je la regardais et je me disais : “Ça doit être pareil au paradis, on voit un visage, en est heureux, on n'as plus besoin de rien…” Et puis, j'ai guéri et… De nouveau, j'ai eu besoin de plein de choses. Argent, grades, bouffe, femmes. L'infirmière, je l'ai épousée…
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Boutov se figea, tel un taureau sur le point de charger, le rouge montant à son cou. Leur face-à-face, en quelques secondes, révéla la détestation réciproque que pouvaient ressentir un officier ayant vécu le feu des combats et un responsable du contre-espionnage furetant dans les états-majors.
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Les sujets de conversation variaient peu : épouses revêches, véritables boulets qui nous gâchaient la vie, et, à l'opposé, amantes d'une nuit, qui rendaient au monde sa vraie saveur. On évoquait aussi les exploits guerriers – par le décompte d'ennemis tués. Et les avantages comparés des métiers et des salaires. Et, pour quelques veinards, la possession d'une voiture. À quoi s'ajoutait la préférence pour une équipe de football… Une telle échelle de valeurs ne suscitait de doutes chez personne.
Oui, Svéta m'avait libéré de cette vie-là ! Je me souvenais de mes projets amoureux, de ma jalousie… Désormais, dans ce théâtre d'ombres régnait un silence débarrassé de tout mensonge.
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La révélation déchiqueta l'image de victime que je m'étais fabriquée. La vie était bien plus tortueuse. Ses masques grimaçaient, changeaient de caractère, un drame révolutionnaire se muait en une farce de cocuage. Étais-je l'enfant de communistes convaincus tombés sous le coup d'un terroriste ? Ou bien le fils d'un coureur de jupons durement châtié ?
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« Tout à l’heure, je n’ai pas voulu raconter les combats autour de Leningrad… En fait, notre unité protégeait les civils qu’on évacuait dans les camions, sur la glace du lac. Un soir, j’ai vu un fourgon, avec une cinquantaine d’enfants, disparaître dans une trouée ouverte par une bombe. Le lendemain, la glace s’était refaite et les voitures ont repris leur rotation… Depuis, je n’aime pas ces récits de soldats. On enjolive, on décrit des exploits et des victoires. La nouvelle génération écoute, puis se met à rêver de sa propre guerre… »
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« Je ne crois pas qu’il ait pris part au viol et au meurtre. Il a dû juste en entendre parler et s’est senti jaloux des salauds qui ont fait cela. Et c’est presque pire qu’un meurtre. »
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« Cela me rappelle cette histoire drôle. Un vieux juge d’instruction qui a expédié plein de gens en Sibérie part à la retraite. Son fils reprend ses dossiers et tombe sur une affaire de complot anti-Parti. En dix jours, il termine l’enquête et les “comploteurs” sont fusillés. Son père soupire : “Pauvre crétin ! Moi, j’ai gagné mon salaire pendant dix ans sur cette affaire…”
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A un moment, leur exil m’a paru incompréhensible, effrayant même. Se couper de la société, s’enfermer au milieu des glaces, sur un îlot entouré d’un océan en furie ! Refuser l’excitant spectacle de la vie, son pathos, ses rivalités ! J’avais, alors, l’âge ou la multiplicité éblouit et la variété des postures intoxique. Où changer de rôle donne l’illusion de la liberté. Où dupliquer sa personne en mille relations est perçu comme une richesse d’existence.
J’avais l’impression de vivre tout ce que Gratsev et Elkan ne connaîtraient jamais.
Et puis, sans se soucier de mon amour-propre, l’équation s’est retournée : chaque jour m’enlevait un peu plus la chance de vivre et de comprendre ce qu’ils avaient vécu et compris.
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L'évadé semblait deviner le sens de la parenthèse que nous vivions. La nuit, ses trois feux brûlaient de plus en plus proches, il jugeait notre attaque peu probable.
" Il finira par tomber d'épuisement, vous verrez, nous disait Boutov. Je ne sais pas d'ailleurs comment il tient encore debout."
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