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“J'ai peur, leur dis-je, que cette folie de guerre autour de moi me projette dans un autre monde, c'est le moins qu'on puisse dire, celui de la mort.”
Folie, guerre, mort....et la ville d'Alep, que Noriz Malek refuse de quitter .
Sous forme d'une écriture fragmentaire, en courts uppercuts littéraires, témoignage directe d'une ville où la frontière entre la vie et la mort n'existe plus.
Je laisse la parole à l'auteur, car je n'ai pas assez de mots pour exprimer ce que je viens de lire,
“les gens qui se font tuer sans raison.”,
“des hommes cagoulés qui lui couraient après et qui avaient poussé autour de nous comme des champignons vénéneux.”,
“Et parfois, à d'autres moments de la journée, tu te vois encerclé par deux chars grondant dans une rue bondée et chacun d'eux tente de t'écraser avant l'autre.”
“Le silence est total que déchirent seulement, par intervalles, des tirs d'armes automatiques.”,
“CHER lecteur : Ce qui se passe dehors crève l'oeil de la nuit.”.....
Je vous laisse découvrir le reste. Une très belle prose, bien que “belle” soit un adjectif inapproprié dans ce contexte horrible et poignant. L'auteur en accentue l'absurdité par l'usage de l'artifice du fantastique. Et pourtant, dans cet enfer sur terre, il réussit à y insérer un reste d'humanité, une lueur d'espoir avec l'amour et un « seau de yaourt ». Donc tout n'est pas perdu tant qu'existent des poètes comme Noriz Malek !
Inutile de vous dire , Lisez- le ! , si le fond et la forme vous intéresse.

“Je suis convaincu qu'un jour la lumière jaillira à nouveau de l'obscurité qui s'est abattue sur nous…”

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Cinq étoiles parce que je ne peux pas en mettre davantage.

De notre côté du miroir, le conflit syrien c'est surtout la crise migratoire, l'exode massif des migrants, la traversée de la Méditerranée, la route des Balkans. On parle rarement de ceux qui sont restés au pays. Parmi eux, Niroz Malek, écrivain et poète syrien d'origine kurde, issu de la communauté yézidie, est né à Alep en 1946 et n'a jamais quitté sa ville. Pour lui, rester là n'est pas tant une question de courage. Paradoxalement, c'est plutôt une question de survie : "Comment pourrais-je quitter ma maison, m'éloigner de mon bureau ? [...] Est-ce pour sauver uniquement mon corps ? Tu sais que derrière moi, dans ce bureau, ce ne sont pas des livres, des bibelots et des photographies que je laisserais, mais mon âme. le corps pourrait-il survivre sans âme ? Ai-je poursuivi. C'est pour cela que je ne partirai pas de chez moi, car il n'y a pas de valise assez grande pour contenir mon âme". Alors il est resté dans sa maison, et continue à écrire pour témoigner, pour résister face à la barbarie, pour tenir le coup devant la folie et le désespoir. Ce livre est un ensemble de saynètes très courtes, quelques pages tout au plus, dans lesquelles la violence aveugle empêche toute vie normale. Personne ne sait, quand il sort de sa maison pour faire des courses ou prendre l'air, s'il en reviendra vivant. La mort peut surgir de partout, d'un chasseur bombardier, d'un sniper sur un toit, d'une rafale de mitrailleuse tirée depuis l'un des innombrables barrages par un soldat ou un milicien arrogant qui n'est pourtant lui-même qu'un cadavre en sursis. Hantés par la mort et la peur, les textes sont très souvent oniriques, comme pour permettre à l'esprit de se réfugier dans l'imaginaire et échapper ainsi à une réalité atroce. Les souvenirs aussi sont un abri où duper la douleur : devant un bistrot détruit par une explosion, on se rappelle des conversations sans fin avec les amis ; devant l'abattage des arbres du jardin public (parce qu'il n'y a plus d'autre bois pour se chauffer), on se rappelle les générations d'adolescents qu'on a vus graver leurs noms sur les troncs. Réaliser alors que les jours heureux appartiennent au passé, mais nourrir un espoir fou : "Je suis convaincu qu'un jour la lumière jaillira à nouveau de l'obscurité qui s'est abattue sur nous".
L'écriture de Niroz Malek est simple et sobre; point n'est besoin de pathos pour rendre ce texte déchirant et bouleversant. Pour supporter ce quotidien insupportable, il s'adresse souvent à "celle qui se trouve au loin" et lui parle d'amour. Quelle force d'âme a-t-il trouvée/conservée pour invoquer, face à cette sale guerre aussi absurde que cruelle, la poésie et la lumière de Chagall et de van Gogh, ou la musique de Beethoven ?
Respect.

En partenariat avec les éditions du Serpent à Plumes/La Martinière (que je remercie pour l'envoi et le mot d'accompagnement), via une opération Masse Critique de Babelio.
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Merci aux éditions La Martinière et à Babelio qui à travers l'opération masse critique m'ont permis de croiser « le promeneur d'Alep ».

Syrie, rebelles, armée Syrienne, barbus, Kurdes, Iran, Russie et au milieu de tout ça Alep. Et au milieu de tout ça des hommes, des femmes, des enfants, qui vivent chaque seconde en se demandant où tombera le prochain obus, quelle cible atteindra la prochaine balle du snipper d'en face, combien de temps encore à « vivre » ? Il y a ceux qui partent vers des horizons où ils ne sont malheureusement pas les bienvenus et puis il y a ceux qui restent. Niroz Malek est de ceux là.
Le promeneur d'Alep, quel titre!!! Il résonne comme une provocation à la folie des hommes, comme un appel à une résistance pacifique, comme un renoncement au fatalisme. Il fait allégeance à la vie.
Un titre est souvent trompeur…
Souvent oui mais là, non. On est en plein dans la protestation, dans la lutte, juste parce que l'auteur est là, parce qu'il reste par choix. Un combat sans armes gagné d'avance car même la mort ne met pas ce genre d'homme à genoux. Il n'y a pas d'héroïsme, juste de la dignité malgré la peur.
Niroz Malek est ce promeneur. Il va nous faire visiter ses émotions et sa ville à travers un passé décomposé. Si la mort règne apparemment sans partage sur la ville, même si c'est difficile à dire, l'impression est trompeuse car il reste toujours quelqu'un debout.
Au fil des pages les vivants déjà morts côtoient les morts encore vivants dans le souvenir. Passé et présent se mêlent, rêves et cauchemars embrasent les braises toujours chaudes de la vie d'avant.
Une vie d'avant comme une résurrection, l'espace d'un instant, où les lieux renaissent de leurs cendres, où les anciennes conversations animées avec les amis viennent bousculer fugitivement la routine des bombes. Une vie d'avant pour s'enivrer d'un souffle de liberté. L'ivresse est forte, la gueule de bois est rude. A chaque image sortie des combles de la mémoire de l'auteur succède la triste réalité et soudain le café rempli de vie n'est plus que ruines fumantes, le car de ramassage scolaire qui l'emmène à l'école n'est plus que carcasse carbonisée, victime d'un attentat de plus. A chaque évocation répond la destruction, la disparition.
J'avoue que l'écriture ne m'a pas transporté, la traduction peut être. A chaud, j'ai aimé moyen car je ne m'attendais pas à ce genre de promenade mais une fois décanté… je me rends compte que l'angle choisi par Niroz Malek pour dire son quotidien, ses peurs, ses espoirs, est original et atteint son but. On repense à ce livre dans les jours qui suivent la lecture, enfin de mon coté j'y ai repensé. Il laisse une empreinte, une respiration… fragile, comme la vie.
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Niroz Malek est né à Alep en 1946. Il est donc syrien issu de la communauté Yézidie, ses parents étaient kurdes.
Il est artiste et romancier et on lui doit huit recueils de nouvelles et six romans.
Avec « le promeneur d'Alep », il nous décrit le quotidien d'un écrivain qui a refusé de quitter Alep et qui tente d'y survivre.
On le comprend, ce recueil de très courts récits est en pleine actualité et éclaire durement dans quelle horreur vit le peuple syrien depuis l'émergence de ce conflit terrifiant. Pas un jour sans que le protagoniste n'apprenne la mort violente d'un parent ou d'un ami. Aller acheter quelques vivres, vouloir prendre un café avec ses amis constitue un parcours qui peut devenir mortel. Alep quadrillée de barrages, bombardée, survolée par des hélicoptères qui tirent à l'aveugle ou des tireurs qui abattent sans discernement les passants est un enfer. L'électricité et l'eau sont coupées sans avis, l'approvisionnement est aléatoire. Alep s'est vidée de ses habitants qui ont préféré partir à l'étranger, devenir ses fameux « migrants », risquant encore leur vie pour tenter de survivre.
Pourtant lui ne partira pas, il a trop à laisser derrière lui, non sa maison, ses livres mais son âme, écrit-il. Alors il continue de témoigner par ces petits tableaux allégoriques ou déchirants d'un quotidien absurde, d'une guerre que les habitants de Syrie ne comprennent pas, eux qui ne désiraient que vivre en paix de petits bonheurs simples.
Un livre d'une actualité criante qui nous permet de comprendre intimement qui sont ces migrants de l'humanité.
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La guerre en Syrie ? La crise migratoire ? le drame humain des réfugiés syriens débarquant par dizaines de milliers sur les côtes grecques et déjà menacés d'y être bloqués ou alors refoulés en Turquie... On en entend parler tous les jours, et on croit tout en connaitre...
Mais Niroz Malek, écrivain et poète kurde syrien vivant à Alep, survivant plutôt au milieu d'une ville détruite par la violence, nous livre une image profondément tragique et poignante de l'omniprésence de la mort dans sa ville défigurée par les barrages de miliciens, les bombardements, les combats, les massacres de femmes, d'enfants, de vieillards.
En de courtes pages poétiques, excellemment traduites par Fawaz Hussain, il nous fait vivre cette ambiance de cauchemar où le mort saisit le vif, où il est devenu impossible d'aller au bout de la rue, de prendre un café ensemble, de se promener au jardin public... Arbres tronçonnés pour faire du feu, miliciens arrogants ou voués à être bientôt tués, cafés où certains ne reviendront plus, à supposer que les lieux ne soient ni fermés ni détruits, il ne reste plus à l'habitant de la ville en ruines qu'à tourner en rond chez lui entre ses livres bien aimés, des infos télévisées terrifiantes, des appels téléphoniques dramatiquement interrompus.
La beauté des images, des rêves virant au cauchemar, des souvenirs nostalgiques des femmes aimées en temps de paix, des artistes comme Chagall ou Van Gogh qui aident à sublimer le réel, donnent à ce texte déchirant une force et une présence peu communes qui nous font ressentir au plus profond de nous-mêmes l'horreur de la guerre en Syrie et ce qui pousse hommes, femmes et enfants sur les routes périlleuses de l'exil.
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Le promeneur d'Alep est un témoignage venu en droite ligne de Syrie. Sous forme de courtes anecdotes romancées de deux ou trois pages, l'auteur nous rapporte son quotidien, imaginaire ou ultra-réaliste selon les cas, d'habitant de la ville occupée d'Alep sous les traits d'un narrateur s'exprimant sans cesse à la première personne. Les vivants cotoient les morts dans la rue, au café, au téléphone… La fine ligne séparant les deux mondes s'estompant parfois tout à fait pour rendre compte d'un état d'esprit propre au survivant d'un monde en guerre.

Cette lecture m'a été particulière difficile et troublante, le roman laissant largement entrevoir la véracité d'une guerre très actuelle dont nous connaissons les retentissements jusque dans nos pays croyons-nous protégés. Il n'est pas d'écrits sanglants ou provocateurs dans la prose de Niroz Malek. L'oppression, si elle est parfois physique, est d'avantage psychologique ici. le poids de la mort sur le quotidien y est magistralement dépeint. le narrateur, le promeneur d'Alep, vit avec la mort, meurt un peu plus chaque jour, comment savoir… La fin n'est pas encore écrite, les tirs de mortiers cisaillent encore l'air, et la paix se fait inexorablement attendre. Il n'y a que l'ici et maintenant qui semblent compter : le passé est révolu et l'avenir n'existe peut-être pas.
Niroz Malek s'attelle ici avec brio à un sujet ultra-sensible, avec humilité et simplicité, il réussit à rendre dans une langue éminemment fluide et poétique toute la douleur des pertes humaines et des perspectives cloisonnées.
Lien : https://synchroniciteetseren..
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« Nous l'avions vu s'avancer vers nous dans le café avant qu'il ne soit devenu une part de nos souvenirs. » (p. 79)

Quelle belle découverte que ce roman de Malek Niroz, un auteur que je ne connaissais pas qui, en une succession d'une cinquantaine de courts chapitres, ou pourrais-je dire de tableaux, rend compte de la vie du narrateur dans la ville occupée d'Alep, en Syrie, où les bombes n'ont de cesse de tomber, coupant l'électricité et détruisant les immeubles. En estompant tel qu'il le fait si poétiquement la frontière entre les vivants et les morts, l'auteur réussit particulièrement bien à faire ressentir la proximité constante de la mort, de même que l'angoisse de vivre dans l'attente de l'anéantissement. Absolument un de mes coups de coeur jusqu'à présent.
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Niroz Malek a choisi de ne pas quitter la Syrie, et de raconter, au jour le jour, en de brefs fragments, d'une ou deux pages, qui répondent aux bombardements et tirs quotidiens à Alep, la vie qui doit se poursuivre, pour ceux qui sont restés, envers et contre tout.

Par ces fragments, souvent poétiques, l'auteur raconte la mort, principalement, la survie, également, mais aussi ce qui reste pour rendre la vie supportable à travers elles : des petits instants heureux du quotidien, empreints d'amour, d'amitié, de nostalgie, parfois d'espoir.

Malgré sa poésie, et une publication qui a désormais plusieurs années, c'est un témoignage rude à lire, évidemment, poignant, indéniablement, et, encore aujourd'hui, essentiel.
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Il y a celle qui se trouve au loin, celle qui « a laissé un très beau baiser sur [son] cou, un autre sur [sa] bouche et un troisième sur [son] épaule ». Il y a ces gens qui coupent les arbres dans les parcs et les jardins publics pour se chauffer. Il y a les amis qui sont partis, se sont dispersés et sont maintenant « des expatriés, des bannis, des migrants, des exilés ». Et « ceux qui sont morts de toutes les manières possibles ». Il y a ce garçon trisomique fauché par une rafale de mitraillette. Il y a cet amour d'enfance « tuée par la balle d'un sniper ». Il y a ce soldat qui voudrait que le poète écrive une lettre d'amour à sa fiancée. Et tout autour il y a Alep en ruine, Alep en guerre, Alep martyrisée qui baigne dans le sang.

Niroz Malek n'a pas voulu quitter sa ville. Il arpente ses rues, passe les barrages, vit avec les coupures d'électricité, le bruit des déflagrations, les murs qui tremblent après une explosion. Il vit la peur au ventre, croise des fantômes, attend le retour de sa femme emprisonnée, retrouve des connaissances au café et traverse la cité malgré les dangers.

Le promeneur d'Alep, c'est un peu Delerm sous les bombes. Une écriture minuscule, une succession de tableaux pour dire les petits riens d'une existence sous la mitraille. Ce sont les mots d'un homme traumatisé par les atrocités mais qui refuse de les décrire de façon brutale et réaliste. Son témoignage est avant tout poétique, aussi sensible que bouleversant, sans jamais tomber dans le pathos ou le larmoyant. Il décrit des ambiances, un cheminement de l'esprit perturbé par un environnement des plus anxiogènes. Et pourtant cette description du quotidien garde en permanence une petite note lumineuse, une sorte de minimalisme solaire qui traverse chaque texte et transcende l'horreur pour extirper la beauté des décombres. Comme pour apaiser les plaies béantes de la guerre avec la force de l'écriture.

Lien : http://litterature-a-blog.bl..
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Ce livre regroupe un peu plus d'une cinquantaine de textes courts, qui ont tous en commun la Syrie, Alep, la guerre. Un auteur( l'auteur ), reste dans la ville d'Alep envers et contre tout et s'évertue par la grâce de son écriture à retranscrire ce qu'est la vie à Alep.

On pouvait s'attendre à de grandes descriptions où le sang serait la toile de fond et les bombardements le décor mais, on est bien au-delà de ça. Par la qualité des textes, on perçoit tout ce qui est la guerre mais aussi la douceur de la vie "d'avant". C'est le contraste entre les deux qui donne l'ampleur des désastres de la guerre, sans que l'auteur éprouve la nécessité de jouer du sensationnel ou du pathos . Ces textes, si joliment poétiques, sur un sujet qui ne l'est absolument pas, m'ont fait ressentir la tristesse de ne pas avoir connu la douceur de la vie d'avant la guerre et le doute qu'un jour la vie revienne sur les terrasses des cafés pour que des hommes, des femmes s'y arrêtent juste pour discuter....

J'ai été émue par la beauté des textes et la noirceur de la situation, une lecture qui, sans violence , en dit bien plus qu'un entre-filet aux infos sur le conflit qui a lieu,en donnant corps et âme à ce pays que je ne connais pas .
Lien : http://theetlivres.eklablog...
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