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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Une écriture forte ...terriblement d'actualité
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A travers les destins de Karim, Aurélien, Lila, Adam et de quelques autres plus ou moins anonymes, l'auteur dresse un tableau très sombre de l'Etat Islamique, de leurs têtes pensantes/dirigeantes à leurs exécutants. Approche et recrutement par internet, départ de jeunes volontaires ultra-motivés, combats en Syrie, implication de petits enfants (qui doivent s'entraîner à tuer en éventrant des peluches, en égorgeant des volailles...), embrigadement d'adolescentes, au 'mieux' pour être soldates, au pire pour servir de putes à qui-n'en-veut.

Pascal Manoukian n'épargne pas grand chose à son lecteur. J'avais pu le constater dans son excellent premier roman 'Les échoués', consacré au parcours de quelques migrants arrivés clandestinement en France au début des années 90.

Ce dernier ouvrage est très instructif, certes, et il montre bien le pouvoir des images et des baratins de propagande véhiculés via le net, mais cette vision apocalyptique m'a dérangée, même si elle correspond à la réalité - je n'en doute pas.
Le portrait de cette organisation terroriste est tellement terrifiant qu'il risque de rendre parano le lecteur occidental 'non averti'. L'auteur a beau souligner à quel point les jeunes recrues de l'EI sont les premières victimes, on peut craindre que certains confondent ses véritables intentions avec un discours prônant un repli franchouillo-nationaliste, un appel à une méfiance accrue à l'égard de l'islam et des étrangers (du genre 'attention, les terroristes sont partout !').

J'ai préféré les approches plus nuancées d'Ingrid Desjours dans 'Les fauves', et de Thierry Jonquet dans 'Ils sont votre épouvante et vous êtes leur crainte'.
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Comme il est difficile d'écrire sur ce bouquin tellement il m'a chamboulé !
Karim, jeune musulman non pratiquant vit avec Charlotte, ils vont avoir un bébé. Aucun des deux n'est proche de sa religion respective, laissant cela à leurs ainés ils s'en éloignent. Charlotte voulant fêter sa grossesse avec ses amies se rend au restaurant le Zébu Blanc, elle est hélas touchée mortellement lors d'un attentat. Karim est à ce moment-là avec l'iman de la mosquée. Il apprend que le tueur de sa femme est un ancien copain de CM2, Aurélien, converti. Karim décide alors de pénétrer dans les profondeurs de cette organisation terroriste.
Pascal Manoukian est un ancien reporter de guerre donc autant dire qu'il maîtrise son sujet à la perfection. Hélas sujet d'actualité.
On s'attache à Karim, on a peur pour lui et puis on espère. À travers ses yeux on découvre l'univers des terroristes et la violence qu'ils vouent envers les autres, le lavage de cerveau qu'ils imposent aux nouveaux arrivants, leur façon de penser si différente mais pourquoi ??
« Dieu est un pitbull, il ne lâche jamais. Il vous traque avec l'acharnement d'un vigile de supermarché. Ses commandements vous poursuivent comme des caméras de surveillance, elles vous rattrapent n'importe où, n'importe quand. C'est brutal, soudain. »
« Comme des lions, ils l'isolaient de son troupeau et l'épuisaient en tournoyant autour de lui, à cinq contre un. »
« Daech fait aussi la chasse aux livres, l'autre poison mortel. L'imagination est une arme dangereuse, la littérature, c'est la liberté d'inventer d'autres mondes, or il n'en existe qu'un seul comme il n'existe qu'un seul livre, celui de Dieu. »
On se rend compte que la Syrie est remplie de groupuscules islamistes qui se multiplient vite, très vite ! Ils fonctionnent ensemble avec un même objectif : tuer !
« La longue liste de leurs noms fait penser à un catalogue de série B : la Brigade de l'unicité, le Front des hommes libres de Syrie, la Conquête d'Alep, les Faucons syriens, les Partisans de la Charia, les Petits-Fils du Prophète, les Hommes libres du Levant, la Brigade de la justice, le Front pour la victoire des gens du Shâm et, bien sûr, l'État islamique en Irak et au Levant. »
L'embrigadement concerne aussi bien les hommes que les femmes, les jeunes que les plus âgés, peu importe la catégorie socio-professionnelle. Tout le monde peut être concerné il n'y a pas de règles définies.
« Dans le campement, on dirait l'Eurovision, ça parle dans toutes les langues. »
« En un vol low cost, ils sont passés de leur cage d'escalier aux ruines fumantes d'Alep, de chômeurs à tueurs. Ils arborent une kalachnikov comme d'autres la cravate. C'est leur tenue de travail. »
Nous sommes plongés dans cet univers grâce à Pascal Manoukian. Un récit qui fait froid dans le dos, qui m'a rendue triste mais confiante envers un meilleur avenir, parce que j'en ai eu besoin en refermant ce livre si sombre.
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Si vous avez lu Les échoués, son poignant premier roman, vous savez que Pascal Manoukian, ancien reporter de guerre, ne cherche pas à travers la fiction à proposer une vision édulcorée du sujet dont il s'empare. Il ne considère pas le roman comme un terrain de divertissement, mais peut-être plutôt comme une forme lui permettant de porter un regard différent sur ce dont il a pu être témoin, notamment dans son activité professionnelle, et je lui en sais gré. Après avoir dépeint la condition des migrants, il s'intéresse cette fois au terrorisme islamique. Autant vous dire qu'on n'aborde pas cette lecture avec légèreté...

Manoukian utilise comme point de départ un attentat perpétré à Paris, à la terrasse du Zébu blanc, un café du Xe arrondissement, qui n'est évidemment pas sans rappeler les terribles événements que nous avons connus en novembre 2015. Son héros, Karim, d'origine algérienne, musulman non pratiquant, est sur le point d'avoir un enfant avec la jolie Charlotte. A eux deux, ils forment un couple heureux et confiant en l'avenir. Mais Charlotte est l'une des victimes du Zébu blanc, et Karim doit faire face à l'insondable douleur. Pour rester debout, il éprouve le besoin de comprendre et de remonter à la source de ce carnage.
Par le biais d'Internet et des réseaux sociaux, il entre alors en contact avec des responsables de Daech afin de partir pour la Syrie, avec le projet un peu flou, et surtout un peu fou, d'approcher l'un des chefs de cette organisation. A la nécessité de comprendre et de toucher du doigt l'origine de ce qui a détruit sa vie se mêle un irrépressible besoin de rendre la douleur.

Je ne vous dirai rien de plus de l'intrigue magistralement menée par l'auteur. Car tout son talent est là, dans son habileté à construire une fiction qu'on ne lâche pas, en compagnie de personnages auxquels on s'attache très vite, mais qui évoluent dans un paysage que l'on sait scrupuleusement documenté et malheureusement très réaliste. Evidemment, certaines scènes sont insoutenables, précisément parce qu'on a pu voir relater des faits similaires dans la presse. Mais par le regard de son héros, Manoukian réussit toutefois à ramener une étincelle d'humanité là où tout n'est que barbarie, et l'on parvient dès lors à aller au bout de ces terribles moments.
Mais surtout, et il le doit sans aucun doute à la connaissance qu'il a acquise sur le terrain, il ne se contente pas de décrire les événements. Il explique, par un contexte économique, par un contexte géopolitique, par le constat d'un mouvement progressif mais généralisé vers une forme d'aculturation, la manière dont on en arrive à voir l'impensable exister. Il démonte avec précision les mécanismes de recrutement des terroristes. Il donne à voir l'escalade, il montre sur quels terreaux naissent la haine et la violence. Il porte un regard sans concession, mais jamais dénué d'humanité.
Il en ressort un roman d'une grande force, d'une belle intelligence, servi par une écriture fluide et efficace, élégante et juste.

Lien : http://delphine-olympe.blogs..
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Partir, c'est mourir un peu… beaucoup…

Second roman de Pascal Manoukian qui, après le merveilleux « Les échoués », roman sur les migrants, l'amitié et l'humanisme, s'attaque cette fois au périlleux sujet de la radicalisation.

Karim et Charlotte filent le parfait amour : elle est enceinte, leurs différences religieuses les réunissent au lieu de les séparer, la mosquée locale est allée jusqu'à conseiller à Karim de ne pas baptiser son futur enfant. Les familles s'apprécient. Rien ne semble pouvoir contrecarrer le bonheur en jachère entre Karim et Charlotte… à part Aurélien, récent radicalisé, qui va faire un carton sur la terrasse du 10ème arrondissement de Paris où Charlotte prend un verre avec ses amies en attendant Karim.

Ce soir-là Karim perd tout : sa vie, sa raison d'être. Alors il part. il quitte tout pour rejoindre la Syrie, Daesh et les terroristes, chercher vengeance. Il tient avec ce seul objectif : atteindre ceux qui ont favorisé la radicalisation d'Aurélien, son propre voisin dans la banlieue d'Aubervilliers.

Après avoir rencontré la mère d'Aurélien, Karim se sert de l'histoire du kamikaze pour entrer en contact avec les terroristes et rejoindre les rangs de Daesh.

Pascal Manoukian dresse bien le tableau d'une pieuvre tentaculaire qui puise dans le désarroi de ses proies les voies de la radicalisation. A travers une parole coranique corrompue et parcellaire, ils surfent sur les problèmes de société pour y apporter des réponses réconfortantes à des êtres fragilisés, à la marge, en porte à faux de leur famille, de leur vie.

Si Pascal Manoukian attire l'attention du lecteur sur les causes, il n'entrevoit pas de remèdes et c'est bien en cela que son roman manque de l'optimisme et de l'humanité qui faisaient la richesse de son précédent roman.

On s'attache pourtant passionnément au destin de Karim et des naufragés qu'il croise sur le chemin d'Alep. Sous la plume toujours aussi agréable de Pascal Manoukian, leurs vies prennent des dimensions aussi héroïques que tragiques.

Le fait que la religion musulmane, dévoyée par les terroristes, soit à même d'apporter des réponses, fausses mais réconfortantes, devrait nous interroger sur le silence abyssal des autres religions ou des contre-pouvoirs : comment et pourquoi les messages de paix des autres religions a-t-il pu perdre de sa valeur (je ne parle pas de sa force…) ?

Les pages relatant l'errance de Karim et de ses acolytes à travers les ruines syriennes sont particulièrement prenantes de justesse et de sensibilité, que ce soit à travers les histoires de Lila ou de la famille musulmane qui accompagnent Karim. Elles préparent le terrain à l'opposition frontale qui va frapper les protagonistes lors de leur embrigadement final. La violence des formateurs achèvera de tuer toute l'humanité qu'il restait dans ces âmes déjà perdues.

Il est donc juste dommage que Pascal Manoulian ne soit pas allé plus loin dans sa réflexion sur les mécanismes de la radicalisation pour essayer d'apporter des réponses aux messages de haine.

Sur le même thème, on lira aussi avec bonheur « le français » de Julien Suaudeau. Les deux romans portent le même regard sur la radicalisation, partent d'histoires similaires et dressent le même bilan d'une radicalisation sournoise, fondée sur le désarroi de ses proies, leur rejet d'une société dans laquelle ils ne trouvent pas ou plus les raisons de la sauvegarder.

Lien : http://wp.me/p2X8E2-LW
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Une jeune femme Charlotte fête sa grossesse avec ces amies à la terrasse d'un bistrot parisien. Elles sont victimes d'un jeune terroriste qui agit au nom de l'état islamique. Karim, son compagnon a tout perdu et décide de comprendre et de se venger du commanditaire de cet attentat. On va remonter avec lui les filières d'embrigadement de Daech. C'est terrifiant! Ce roman a été douloureux à lire tant il est actuel. c'est comme si quelqu'un vous forçait à regarder quelque chose que vous ne voulez pas voir! beaucoup de questions ressortent de cette lecture.
Mais ne faut-il pas être lucide pour mieux comprendre et peut-être trouver des solutions?
A méditer...
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