« Tu sais ce que le prophète a dit ?
- A propos de quoi ? Il a dit beaucoup de choses.
- de la guerre contre les mécréants.
- Non.
- Qu'après la victoire tout
ce que tient ta main droite t'appartient. Alors elles sont toutes à toi. »
« Ma malakat aymanukum » possède plusieurs traductions, dont les deux suivantes : « ceux que ta main droite possède » (M.H. Shakir) ou « ceux qui sont tes esclaves » (N.J. Dawood). Ce que possède ta main droite t'appartient, tu en disposes à ta convenance.
A Paris, Karim et Charlotte mènent une vie heureuse, faite de complicité et de simplicité, et bientôt, leur famille va s'agrandir. Charlotte est enceinte de six mois, et le jeune couple s'apprête à accueillir une petite Isis (en hommage à la déesse égyptienne adulée de son peuple), dont la naissance est attendue avec impatience et excitation. Charlotte et Karim forment un couple particulièrement heureux et libre, ils s'aiment sans contraintes, ils aiment être ensemble oui, mais ils n'hésitent pas non plus à s'accorder des moments plus « égoïstes », Karim avec ses copains et Charlotte avec ses copines, et, en cette chaude soirée estivale, Charlotte ne manque pas à la règle. Ce soir, c'est terrasse avec les filles, apéro et rires jusqu'à pas d'heure.
Tout vient à point qui sait attendre, dit la maxime…
Tout vient à point ou ne vient pas. Isis ne verra jamais le jour, et Karim ne verra plus jamais Charlotte. Pourquoi ? Parce que sa route a croisé celle d'Aurélien, un jeune paumé qui s'est converti à l'Islam et qui s'est fait enrôler par des Islamistes. Avec ingéniosité, intelligence et ruse (Ô combien leurs tactiques sont révoltantes, tant elles passent entre les mailles du filet), Aurélien a finalement trouvé un sens à sa vie, en mettant fin à celle des autres, en se sacrifiant pour le pardon d'Allah, comme on le lui a promis, il a trouvé la Lumière et mis fin à son calvaire sur Terre, lui qui était délaissé de ses pairs, sa mère, ses anciens copains d'école, dont Karim faisait partie.
Pourquoi ? Et comment survivre après ça, après cet acharnement de haine intangible pour des convictions absurdes, de prêches perfides et fallacieux ?
Karim n'a plus rien à perdre, puisqu'on lui a tout pris. La seule volonté qui lui reste c'est ce désir ardent de vengeance, au nom d'Isis et de Charlotte. Mais rien ne se passe à Paris, tout se déroule dans les hautes sphères de l'Etat islamique, en Syrie, et pour venger les siens, Karim va devoir adhérer aux dogmes qui ont détruit sa vie, côtoyer les hommes qui ont amené Aurélien à devenir martyr au nom d'un Dieu qu'il ne connaissait pas, aider les ennemis, les traîtres, travailler à leurs côtés et les aider dans leur quête d'une toute-puissance prétendument méritée et, dans ce périple qui le poussera dans tous ses retranchements, Karim aura pour seul but de rencontrer l'homme qui dirige tous ces soldats, loin des champs de bataille, loin des conflits sur le terrain, loin des corps démembrés, loin des femmes esclaves, loin des massacres, loin des horreurs de cette guerre.
Je ne saurais vous décrire ce roman, il faut le lire et le vivre ; il ne s'agit pas d'un simple roman, d'un livre qu'on lirait comme ça, pour passer le temps, pour se détendre, non ; on plonge dans un drame, corps et âme, et on avance, avec Karim, on progresse pas à pas, avec angoisse, dans le quotidien de sa lutte acharnée. J'ignorais tellement de choses, qu'il s'agisse des techniques de communication des djihadistes, des génocides qu'ils commettent, des prouesses technologiques dont ils usent.
Pascal Manoukian a écrit un roman qu'il faut lire, un roman profondément humain, terriblement humain malheureusement, qui perturbe, dérange et démange.
En découvrant Karim et son parcours, vous découvrirez ô combien « ce que tient leur main droite leur appartient ».