Ça suffit Suzy !

Les hurlements hystériques d'une cinquantaine de filles couvraient toute tentative de conversation intime. Elles enterraient la vie de célibataire de l'une d'entre elles en se déchaînant sur un strip-teaseur. Un string en strass s'envola dans les airs, accompagné par un rugissement d'approbation.

Heureusement, le maquillage des yeux était intact. Suzy entreprit de réparer les dégâts. En premier, la poudre pour arranger son teint un peu... chamboulé. Le rouge à lèvres ensuite, en bâton, pas en pinceau, parce qu'elle n'aimait pas se compliquer la vie, et puis une touche de gloss pour donner un peu de volume. Le gloss, évidemment, c'est un cauchemar si on envisage d'embrasser quelqu'un parce que a) tous les hommes font la grimace à cette idée, et b) s'ils parviennent à surmonter leur dégoût, ils se retrouvent systématiquement avec les joues tartinées.

Le rêve de Jaz était de devenir célèbre, alors c'était devenu le rêve de Fee. Mais au lieu de croire à la chance, comme le reste du groupe, qui pensait qu'être remarqué et signer pour un label, c'était un peu comme le coup de foudre, ça pouvait arriver par hasard, Fee avait envoyé des démos des six meilleures chansons de Fireball à tous les directeurs artistiques de toutes les maisons de disques de Londres.

J'avais dix-neuf ans. Les gens ne devraient pas être autorisés à se marier quand ils ont dix-neuf ans et une seule idée en tête : emmerder leur mère. Ils devraient se marier pour du beurre. Comme les enfants qui jouent à la marchande, avec des billets de Monopoly, des fruits en plastique et des caisses enregistreuses à trois touches qui font « ding » quand le tiroir s'ouvre.

Elle venait de passer six mois à envier les gamines en minijupe qui s'accro-chaient aux basques de Jaz et disparaissaient un peu trop souvent à l'arrière de la camionnette avec lui, et savait désormais que ce qu'elle avait raté pendant tout ce temps était aussi agréable qu'elle l'avait imaginé.