Widdershins, tome 3 : Le pacte brisé

Pas d'allié. Pas de refuge. Pas de foule où disparaître. Aucune idée de l'endroit où elle devrait aller, ni, quand bien même, de l'itinéraire à suivre pour y parvenir.
Certes, elle avait connu des situations plus critiques. Mais pas récemment.

- Olgun ? [...] Comment se fait-il que la moitié des gens que je rencontre essaient de me frapper ?
Une pause.
- Oui, oui, je sais, tu n'as pas besoin de me le dire. Parce que l'autre moitié ne me connait pas encore assez bien. Ha, ha, ha ! Très drôle. Fais-moi penser à t'abandonner dans un panier sur le perron d'un orphelinat.

Dis-moi, Olgun, je me demande : les dieux ont-ils une raison particulière de ne pas donner un cerveau à tout le monde ? Est-ce que c’est censé être drôle ? Ou y a-t-il simplement eu rupture de stock à un moment donné ?
(p. 221)

- Arrêtez de me regarder comme si j'étais folle.
- Pourquoi, c'est censé être un secret ?

Dis donc ! Je n’y suis pour rien si tu n’étais pas prêt ! Tu n’as qu’à pas laisser la divinitude de cet endroit te ralentir. En quel honneur devrais-je attendre que… Bien sûr que si, ce mot existe ! La preuve, je viens de l’employer !
(p. 16)

Ce fut assez. Une rage sans bornes remplaça la douleur dans le hurlement de Cyrille, qui trancha d'un coup sec la gorge de son adversaire.
Le jeune homme resta un long moment debout, vacillant. Une seule pensée, d'une étonnante lucidité, lui traversa alors l'esprit: Je viens de tuer mon premier homme. Son sang me dégouline sur le visage et la poitrine, et pourtant je n'éprouve rien. Sans la douleur et l'horreur, il en aurait été tout autrement, sans doute.

Surtout ne pas pleurer... Interdit. Et si je pleure, mes larmes vont geler sur mes joues.
Si je pleure, il va falloir que je continue a me rappeler pourquoi.

- Vous en êtes sûre ?
- Sûr que j'en suis sûre !
- Vous n'êtes pas en train de me mentir ?
- Bien sûr que si !

- Subtilité ! Ca vous dit quelque chose ? haleta Cyrille. C'est pourtant vous qui en avez parlé en premier, j'en suis certain !
[…]
- J'ai essayé d'être subtile, je vous assure !
- A d'autres ! Vous lui avez planté une dague dans le fessier, tout de même !
- Il allait vous tirer dessus ! Je me suis dit que ce serait plus discret qu'un coup de pistolet !
- Pour la discrétion, on repassera !
- Mais comment aurais-je pu imaginer qu'un homme pouvait pousser un cri aussi aigu ?

Le festin était réservé aux aristocrates, qui chipotaient, picoraient ou s'empiffraient sans en avoir l'air (un talent que Widdershins n'avait jamais maîtrisé) selon leur caractère et les exigences de leur organisme.