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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Ce livre est écrit comme on pousse un cri d'exaspération, comme on tire une balle de fusil ou la chasse d'eau, comme on recouvre un cercueil d'une pelletée de terre. En y repensant pas trop à deux fois. le pitch ? Adolphe est un nabot hideux issu d'un père collabo et d'une mère juive exterminée par les nazis ; il travaille aux pompes funèbres près du cimetière du Montparnasse et se fait baiser sans ménagement par la concierge qui le submerge quotidiennement de ses 120 kilos. Vous voyez le tableau ? L'esprit de ce récit est bien résumé page 25 : « A vrai dire, je ne désirais pas grand-chose. Ma règle de conduite était simple : vivre le moins possible pour souffrir le moins possible. Pas très exaltant, peut-être, comme précepte, mais terriblement efficace ». C'est un texte obscène et burlesque, beau comme un cauchemar. On y trouve l'humanité de Gary, le désenchantement de Cioran, la cruauté de Céline et l'ironie morbide des penseurs russes qu'on résumera à ce proverbe : « malheureux ceux qui ont passé l'hiver, il y a l'hiver prochain ». Je vous le recommande, c'est idéal pour un dimanche ensoleillé, ensuqué par la bienveillance et les bons sentiments. Ce chef d'oeuvre d'humour noir m'a été recommandé par la librairie ICI que je remercie chaleureusement. Une belle découverte qui donne envie de lire « Jérôme » du même auteur. Alors oui ce livre n'est pas long, mais c'est un concentré de jubilation. Quitte à écrire un petit livre, autant que ça vous pète à la gueule (nous en reparlerons bientôt… car il y a beaucoup à dire sur le sujet).
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La lecture de Martinet m'a été suggérée par une lectrice de la famille, lectrice que je remercie ici. J'accueille évidemment les suggestions avec bonheur même si, à cet égard, il peut m'arriver d'entretenir une attitude proche de celle qu'énonce Denis Lavant en préface de la grande vie : « Car si j'aime toujours recevoir un ouvrage inconnu, je rechigne parfois à être orienté trop ouvertement dans le choix de mes lectures. Préférant par habitude m'en remettre au hasard ou au seul ricochet poétique qui fait qu'un ouvrage en répercute d'autres et ainsi de suite comme une chambre d'écho ou un jeu de miroir, à l'infini… ».

J'avais été avisé, Martinet a une plume magnifique, mais une plume noire, une plume qui chamboule, une plume qui tourmente. Dans cette grande nouvelle, Adolphe, employé des pompes funèbres, un nain à la vie misérable, à la sexualité qui l'est tout autant, au passé familial trouble, fantasme sur les visiteuses du cimetière qu'il observe depuis son appartement. Il subit les avances de l'énorme Madame C., concierge à la sexualité insatiable qui le domine. C'est cet univers glauque que Martinet évoque en nous transposant dans la tête du narrateur, cet Adolphe qui peine à se relever et qui chemine sa vie à la limite du burlesque.

Voilà une étonnante lecture et je me promets bien d'explorer davantage l'oeuvre qui m'apparaît noire et pessimiste de Martinet.
Lien : https://rivesderives.blogspo..
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Trop court, trop petit, pas seulement Adolphe Marlaud, mais cette nouvelle de Martinet. J'aurais bien aimé que le plaisir de lecture ne s'arrête pas là, mais dure plus longtemps. Peut-être qu'Adolphe, lui, ne serait pas d'accord avec cette idée de prolonger l'existence encore plus, la vie, c'est déjà assez long comme ça. Il le dit : « Vivre le moins possible pour souffrir le moins possible.» Telle est sa devise. Adolphe vit dans sa cellule, un minuscule appartement donnant sur un cimetière. Il aimerait devenir invisible, comme un fantôme. Il y arrive presque, avec ses 1,40 m (souliers à talon compris) et ses 38 kilos. Il est tellement petit qu'il sert de sex toy à la concierge de l'immeuble, madame C. Comme l'homme canon au cirque qu'il dit, on ne peut s'enlever cette image de la tête. le petit Adolphe projeté hors de madame C. On peut l'imaginer avec les lunettes, le casque d'aviateur et l'écharpe qui frétille sous le coup de projection.

C'est drôle et triste à la fois. La souffrance massive percute le pauvre Adolphe tout en finesse, presque en douceur. Martinet décrit avec subtilité les désillusions de la vie. La douleur se vit au quotidien, il n'est pas nécessaire d'en faire tout un plat. Il me semble que l'on puisse résumer la situation des personnages de - cette grande vie - par le passage suivant : « Je parle de drame, mais ce n'est pas le mot qui convient. Il n'y a pas de drame, chez nous, messieurs, ni de tragédie, il n'y a que du burlesque et de l'obscénité. On n'est pas heureux, mais on se marre bien.»
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Un excellent petit livre, très drôle, très noir.
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J'ai souvent du mal à convaincre mes amis lecteurs et lectrices de se lancer dans cette colossale aventure que constitue la découverte de "Jérôme", roman de Jean-Pierre Martinet, écrivain si injustement méconnu -j'en pleurerais presque-, auquel sa courte et chaotique existence n'aura par ailleurs pas laissé le temps d'être prolifique.

Aussi suis-je ravie de vous présenter aujourd'hui ce texte dont le format, celui d'une nouvelle, permet une incursion facile dans l'oeuvre de cet auteur que laisser plus longtemps sur les rayons de votre librairie ou de votre médiathèque de quartier serait un grand tort, voire un crime de lèse-littérature.

Il y met en scène, comme il en a l'habitude, de ces êtres que leur laide banalité rend invisibles, dont l'existence, vide de beauté, de compassion, vide même de désespoir, se dilue dans un morne néant de médiocrité intensément vaine.
"Il n'y a pas de drame, chez nous, messieurs, ni de tragédie, il n'y a que du burlesque et de l'obscénité".
Adolphe Marlaud, le narrateur, est un nabot, généralement comparé à une punaise ou à un cloporte (ce qui ne le gêne pas vraiment, puisqu'il éprouve pour ces petits insectes une certaine sympathie), dont la tête d'avorton maussade présente un teint jaunâtre révélant une mauvaise hygiène de vie. C'est un individu passif, soumis, grotesque, fait de cette matière qui dans certains contextes engendre des monstres...

Il vit entouré par la mort, puisqu'il travaille dans une entreprise de pompes funèbres dont le patron lui accorde en guise d'attention un méprisant dégoût, et que son appartement, sis dans un immeuble décrépit de la triste rue Froidevaux, donne sur le cimetière Montparnasse. Son père y est enterré, et Adolphe entretient scrupuleusement la tombe de cet homme pour lequel il éprouvait une profonde admiration, et qui l'a élevé seul. Sa mère fût en effet déportée à Auschwitz sur dénonciation de son époux, zélé fonctionnaire de Vichy, alors qu'Adolphe n'avait qu'un an...

Son quotidien de solitude est ponctuée par la liaison qu'il entretient avec Madame C., sa concierge, femme gargantuesque qui a réussi à lui mettre le grappin dessus, et lui impose des ébats qu'il qualifie "d'acte répugnant" (je vous laisse découvrir pourquoi, cela fait partie de ces détails qui donnent aux romans de Jean-Pierre Martinet leur dimension unique, à la fois drôle et terrifiante...). Mais c'est finalement la première femme à lui manifester un peu de tendresse, alors il se laisse faire.

Il y a du Céline dans la manière irrévocablement pessimiste dont l'auteur dépeint l'abjecte mesquinerie de cette triste humanité : évoluant dans une atmosphère de décrépitude, de saleté, d'odeurs fortes et nauséabondes, les êtres qu'il met en scène, pitoyables, misérables, suscitent autant de pitié que d'aversion.

Compte tenu de son format, on est loin, dans "La grande vie", de la densité ou du souffle d'un "Jérôme", mais il peut constituer une bonne introduction à l'oeuvre de ce grand écrivain, en vous donnant un aperçu de son univers si singulier.

Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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