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3,45

sur 111 notes
O.K ! J'ai envie d'être ce qu'on appelle bon public. Ce livre me semble toutefois déconcertant de par son style. Comme le dit Sitam, le narrateur, plutôt que d'un roman il s'agit d'un soliloque que caractérise fort bien la citation suivante : « Coup dur sur coup dur, je m'en vais me noyer dans le langage. [...] Le presque cabé gratte encore. Les ongles remplacent la plume. La jouissance ? Un judas sur un cercueil ! La littérature c'est l'antichambre de la mort. La mort celle de l'absolu. L'écrivain cherche à griller les étapes en trompant l'ordre des choses pour aller chatouiller l'infini. C'est la seule ambition qui se respecte. Parler d'absolu avant de mourir. Des centaines de pages et parfois plus pour échouer lamentablement. Voici ma tentative… » (p. 152-153).
Le sentiment d'urgence devant la fatalité de la maladie impose l'écriture comme une évidence (« La maladie avait tout bouleversé, les choses ne suivraient plus jamais la même logique. », p. 147) pour rester « aux prises avec le réel, lui tordant le cou jusqu'à la fiction... » (p. 189) et évoquer entre autres ces détraqués dont la vie n'est que « déception sur déception. Clope sur clope. Demi sur demi jusqu'à plus RSA. » (p. 184)
Sitam entend aussi rendre hommage à des confrères dans la galère, ce qui est tout à son honneur.
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Ce livre, comme une peinture contemporaine, est plein d'images et de couleurs audacieuses.
Et, il résonne effectivement comme un endiablé morceau de jazz au rythme saccadé.
Il est original, riche et rapide.
Pourtant, en quelques chapitres, il m'a mis K.O., K.O. debout !
Décidément, je ne suis vraiment pas taillé pour ce genre de lecture, moi qui aime les longues phrases et les points virgules.
Et finalement, irrémédiablement, je n'ai pas réussi à me faufiler dans l'univers d'Hector Mathis.
Je suis resté en dehors du récit.
Le livre s'ouvre sur une rencontre saugrenue, dans le décor intrigant d'une vieille cabane de garde-chasse où résonne le saxophone d'Archibald, vieux vicomte de la campagne parisienne.
Un narrateur, à la première personne, entame son histoire ...
Mais le rythme est saccadé, l'accumulation de phrases courtes, trop souvent sans verbes, est étourdissante, donne le vertige et finit par nuire au récit.
De beaux petits morceaux de style y sont enchâssés mais semblent comme perdus dans trop de richesse et de rapidité.
Parfois même le mot donne l'impression d'avoir été artificiellement enrichi.
Hector Mathis ne donne pas à son lecteur le droit de respirer.
Il s'enfonce dans sa narration à marche forcée.
La mise en forme du texte n'arrange rien.
Et ce rythme endiâblé ne m'a pas semblé permettre aux personnages et aux décors de prendre toute leur épaisseur.
Au final, "k.o." est certainement un bon premier livre mais certainement pas un livre pour moi.
Je vais donc, à notre prochaine rencontre, le faire circuler au club Babelio des lectrices et des lecteurs de Vannes.
Il y trouvera peut-être un "bouquineur" plus avisé ...
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Je me rappelle avoir lu comme conseil dans un ouvrage intitulé "Polar : Mode d'emploi" qu'il fallait, pour un premier roman, parler d'un univers, d'un contexte que l'on connaît très bien, pour éviter d'ajouter de la difficulté, alors que le simple fait de se lancer dans l'écriture est déjà une gageure. C'est sans doute en suivant ce conseil que beaucoup de jeunes auteurs parlent un peu (beaucoup... ?) de leur vie personnelle dans leur premier roman. C'est sans doute aussi pas mal du à l'époque qui ne jure que par l'autofiction... Peut être pas exclusivement, mais c'est quand même une tendance forte.

Quand on compare la vie du personnage principal du roman et quelques éléments biographiques de l'auteur, on comprend qu'on est en face de ce genre de premier roman. C'est assez étonnant comment l'auteur glisse quelques indices plus ou moins flagrants que c'est le cas (le personnage s'appelle Sitam... Lisez ma chronique dans un miroir et vous comprendrez où je veux en venir...) et comment il tente aussi de brouiller les pistes, notamment quant au contexte spatio-temporel. Par exemple, il évoque clairement des événements s'apparentant aux attentats de Paris de 2015... mais invente une actualité où ceux-ci se généraliseraient rapidement à toute l'Europe. Ou il situe une bonne partie de son roman dans la banlieue où lui-même a grandi, mais la surnomme tout au long du récit, la grisâtre, sans jamais dire plus précisément de quel lieu il s'agit. le roman dans le roman et la mise en abyme sont plutôt bien réussis et renforcent cette identification personnage-auteur.

L'ambivalence se retrouve jusque dans le style où la langue s'apparente à un argot de titi parisien des années 50, pourtant plongé dans une époque bien contemporaine. Cela donne un récit agréablement fouillis où on goûte clairement la musicalité mais où on flotte un peu entre réel et réalité. On est trop proche de notre monde pour s'envoler vraiment, trop baroque pour arriver à vraiment s'accrocher. L'expérience est loin d'être mauvaise, c'est un produit avec des vrais morceaux de littérature à l'intérieur mais j'aurais aimé parvenir à plus m'attacher à des personnages touchants mais qui semblent parfois manquer de chair. Archibald, Capu, Benji ne semblent demander qu'à nous émouvoir mais je me suis retrouvé à un certain moment plus spectateur qu'impliqué.

Il reste de vraies jolies promesses pour un premier roman d'un tout jeune homme qu'on sent meurtri par son époque et son histoire et qui cherche encore le meilleur moyen de nous inviter dans son monde. Gageons que je pousserais sans doute à nouveau la porte de cet univers puisque deux autres livres sont venus garnir ses étagères et que j'ai bien envie de voir comment il a négocié le virage de la confirmation, en se renouvelant tout en gardant sa voix singulière.
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Je n'ai pas été mise K.O. par cette lecture car je suis restée en dehors. C'est le principal reproche que l'on peut faire à Hector Mathis.
Il nous donne à voir ou à entendre mais on n'est pas pris aux tripes, embarqués ; comme avec Calaferte par exemple, qui, dès la première phrase, vous ferre et ne vous lâche plus que cela vous plaise ou non. Et alors vous émergez de votre lecture complètement déboussolés, transformés et le monde n'est plus comme avant. Il vous a contraint à le suivre et vous le détestez et l'adorez pour cela.
C'est un peu ce que j'espérais en entamant ce livre.
J'ai toutefois aimé cette lecture qui comporte de beaux passages comme
« Qu'est-ce que c'est beau l'horizon quand il bave ses couleurs jusqu'au délire. On commettait comme une indiscrétion à ce moment précis. Ce ciel-là on n'étaient pas censés le voir. On était entrés sans frapper, au moment le plus délicat.(…) On ne parlait pas, on laissait résonner les couleurs… »
Je dirais peut faire mieux, plus percutant, plus charnel, laissant des traces, réveillant de vieilles blessures mal cicatrisées. J'attends le prochain…
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GUÈRE PLUS O.K. QUE K.O.

Être un jeune homme de vingt-quatre ans, "sortir" de la banlieue (sous-entendue : parisienne, puisqu'il est connu que, définitivement, il n'est de bon bec que de Paris et de "vraie" banlieue, sans avoir à citer laquelle, que d'Île de France), avoir été parolier et écrire du rap mais croire, encore, en la force du livre, sans pour autant crier au "courage", comme il est habituel de le faire, souvent par facilité, souvent parce qu'on a rien d'autre à dire (comme si l'expression d'un art devait absolument ressortir et avant tout de cette qualité-là), on peut tout de même estimer cela méritoire. D'autant qu'il y croit, Hector Mathis, à la pérennité de l'oeuvre écrite, à sa primordialité, quand bien même la musique est de tous ses environs, qu'elle aussi est affaire de style et, bien plus encore, de rythme ; il y met du sien pour nous montrer, nous rappeler comme cet acte lui est essentiel, viscéral, inhérent et constitutif de tout son être. Urgent. Rien moins. Et à condition de prendre ce texte pour ce qu'il est en large part, quoi que jamais totalement : un roman intensément intime sans être forcément auto-biographique. du moins, jamais tout à fait.

Mais reprenons.

K.O., c'est, avant toute autre chose, l'histoire de Sitam, un jeune un peu pommé, un peu artiste (dans l'âme), un peu sans le sous et qui, son désir de littérature mis à part, se fiche éperdument des représentations et obligations de notre monde "post-moderne", conchie ses poses et ses rêves bourgeois, aime rien moins que l'errance, la gratuité des relations - et son corollaire : l'absence d'attachement total, définitif, du moins en apparence -, la liberté - jusqu'à un certain point -.
Mais K.O., c'est aussi le roman d'une - longue - fuite. Fuite devant les remous que vivent nombres de pays d'Europe (on nage dans une vague ambiance d'apocalypse mal définie quoi que, semble-t-il, générale), sans qu'on en sache beaucoup plus ; fuite du coeur de Paris dont on apprendra au détour d'une phrase que les bombes y ont fait entendre leur souffle de mort et que les forces de l'ordre y pullulent ; fuite de la banlieue - "La Grisâtre " - devant les risques de poursuites judiciaires inopportunes, après que son ami barman ait pris une balle des mains de sa maîtresse oublieuse et alcoolisée ; fuite dans un autre pays, un lieu dont on ne connait pas la langue (la Hollande), une capitale dont il ne sait aucune règle, où il ne connait personne en dehors de sa "môme" qui l'a accompagné-là ; fuite de soi-même et de ce que les éventuelles racines peuvent dire de vous (à commencer par les mots, inéchangeables désormais) et vous renvoyer à la trogne. Fuite de l'autre, l'aimée, l'aimante, "la môme", comme on disait "la môme Piaf" au temps jadis, en ces temps si lointains où une môme, c'était déjà plus qu'un flirt mais moins qu'une épouse, avec toute la tendresse (un rien paternaliste et sexiste) en dedans, mais qu'il va abandonner par peur de lui, de ce qui vient de lui tomber dessus, oui, c'est vachard, un truc dont on sait qu'on ne guérira jamais, à quelques vingt piges. D'ailleurs, ce coup de semonce médical (un rien ridicule, hors contexte. Et d'ailleurs assez maladroitement, naïvement conté, derrière le besoin de s'essayer à du Kafka hospitalier, comme s'il s'agissait d'un nouveau Château en blouses blanches - l'hommage est visible. Trop -), ça va être le point de départ de son ultime fuite : celle au cours de laquelle il abandonne môme, ami blessé retrouvé, relation de travail forte d'avec un imprimeur libertaire, intellectuel et apôtre résolut du jeu de mot et de la charade à tiroirs (avec, en prime, une plongée dans les classiques du genre dont l'auteur aurait pu se passer sans dommage : "Vic tue Ail", et compagnie). Cependant, cette fuite terminale lui permet aussi de se retrouver en compagnie d'Archibald, un de ces derniers "mange-poussière" que l'embourgeoisement généralisé n'a pas encore atteint - n'atteindra jamais -, un "détraqué" comme Sitam, saxophoniste cacochyme ayant loupé sa carrière (et sa fille) mais pas totalement aveugle puisqu'il sait comme la place du jeune littérateur en herbe n'est pas ici, perdu dans le parc d'un château aux fausses et baroques féeries en ruines et que le jeune homme surnomme de manière générique "le domaine" (une autre interprétation de l'Extension du domaine de la lutte ? La filiation ne plairait peut-être pas à son auteur mais, à une génération d'intervalle, les points communs sont évidents).

Roman du désenchantement, roman de la fuite face au temps présent, invariablement moche et violent, face aux engagements pour soi-même ou pour les autres, roman d'une révolte sans révolution possible, ou l'aigreur le cède souvent à une forme de politiquement correct de l'incorrect qui refuse de se voir tel : les envolées contre les bourgeois, contre nos souffreteuses démocraties, contre la vulgarité et la médiocrité ambiantes, la "modernitude" technologique, l'idée que nous en sommes à la fin d'un monde - DU monde ? - dont il ne resterait plus qu'à rédiger l'épitaphe (je reprends les propres mots de Sitam/Mathis en verlan) sont très certainement sincères et, pour une large part, nous les partageons... Mais elles sont exprimées avec une telle naïveté - niaiserie ? - qu'elle finissent souvent à plat ou, pire encore, parfaitement hors contexte et sans grande profondeur car donnant généralement dans l'expectoration malhabile, dans l'expression un rien convenue d'un mal être qui peine à se définir pour ce qu'il est réellement : l'impossibilité fondamentale à être dans cet univers désenchanté. Roman du Je (du moi-je) comme ultime fin - même terne, déprimé et sombre - de tout, O.K. pourrait presque passer pour une auto-fiction, n'était que cela se déroule dans des temps qui ne sont pas tout à fait les nôtres - voire ! Car en étirant un peu le propos, l'Europe qu'Hector Mathis décrit, sans détail précis, ce pourrait-être celle de l'après Charlie Hebdo, cette Europe qui oscille entre peur horrifique à l'égard du terrorisme, réel ou "ressenti", et reprise en main liberticides des gouvernants sous prétexte, véridique et fallacieux à la fois, de la lutte contre les précédents cités -, un texte dans lequel les proches, supposés ou de passage, de Sitam n'en sont, finalement, que les faire-valoir très flous, aux visages et aux psychologies très peu définis, quasiment interchangeables, comme si ce soleil terne qu'est le narrateur n'avait plus assez de force pour éclairer les reliefs de ses semblables avec la force d'une lumière intérieure en sursis, tellement pâlichonne et auto-centrée.

Certes, il ne se passe pas grand chose au cours de ces quelques deux cents pages tenant autant du road-movie sans cheminement réel (puisque notre narrateur finit par tourner globalement en rond) que du roman grisâtre - à l'instar de cette banlieue elle-même très floue - à défaut d'être noir. Mais, en soi, cela n'est aucunement la marque d'un mauvais ouvrage. On peut exprimer une foultitude de choses, être passionnant, bouleversant parfois, avec un personnage totalement immobile, par le biais d'une oeuvre contemplative, onirique, dense ou en ne décrivant qu'une seule et même action jusqu'à en atteindre l'acmé. La littérature contemporaine est pleine de chef-d’œuvres de ce type-là. Pour cela, il faut aussi du style. Mieux : un style. De fait, Hector Mathis mise beaucoup - tout ? - sur le sien, sur cette langue mi-verte, mi-blette (parce que cherchant absolument ses racines dans un argot antédiluvien) qui, il est vrai, surprend plutôt agréablement au cours des trente premières pages mais qui finit par devenir trop évidente, trop attendue, redondante, systématique au fur et à mesure où l'on avance dans cette absence d'avancée. C'est vrai, cette langue est très travaillée, très construite derrière ses perceptibles et, souvent, intelligentes déconstructions. Tout cela est très référencées et l'on y sent de manière permanente l'hommage à quelques grands anciens - tellement. Trop. - à quelques uns des auteurs de son Panthéon intime : Céline, bien évidemment. Mais aussi le méconnu (bien qu'en vogue dans certains milieux depuis une petite dizaine d'année) Jehan Rictus, poète des miséreux et du parler populaire. On pourrait aussi déceler, mais c'est une simple hypothèse, une certaine connaissance du cinéma réaliste et populaire de l'entre deux guerres, au moins en ce qui concerne les passages dialogués. Il faudrait, nous explique la presse, y reconnaître la violence sensuelle et lumineuse d'un Louis Calaferte, mais nous n'avons pu nous y résoudre, tant il est difficile de retrouver ici les fulgurances de l'auteur de Septentrion ou de la mécanique des femmes. Quant à Louis-Ferdinand Céline, cité plus haut et, indubitablement, le premier des inspirateurs d'Hector Mathis... Il écrase tant le jeune écrivain de son génie atrabilaire et aigre que cela en devient parfois gênant. Il y le jazz, enfin, dont il est question presque page après page, à la manière d'une litanie destinée à faire venir sur le texte sa force brute, sauvage et sa poésie endiablée, dont on peine pourtant à ressentir l'intensité élémentaire, car ce n'est pas tout d'invoquer sempiternellement les Mannes, encore faut-il savoir leur donner un visage... Et c'est un long chemin pour y parvenir vraiment.

Pourtant... Oui, pourtant, il y a de l'envie, du désir de bien faire (et de le faire sincèrement, avec le cœur et la tripaille), de l'intention pure et, ne le dénions pas, les prémices d'une voix dans ce premier roman, dont nous remercions au passage les éditions Buchet-Chastel, via une Masse Critique spéciale - et visiblement d'importance pour l'éditeur, vu le nombre de contributeurs - à l'initiative de Babelio, de nous l'avoir fait découvrir. Malgré des mots sans doute invariablement durs d'une critique plutôt à charge, il y a ce sentiment d'avoir - peut-être- découvert un romancier en devenir, à l'oeuvre première pétrie de bonnes intentions quoi que gâchée, presque de bout en bout, par toutes les erreurs de jeunesse possibles, les chausse-trapes dans lesquelles il s'agit pourtant de ne pas se fouler l'encrier. Ni K.O debout, ni "OK c'est génial", sans doute pour ce texte au chaos bien raisonnable une fois passée la surprise du style et de la forme ; un chaos thématique tellement fourre-tout dans lequel Hector Mathis essaie de (dé)ranger presque tout, tellement, tellement : l'amour, le désenchantement, l'art, le sexe, la musique, l'écriture et la littérature, la mort, la misère, l'amitié, l'égotisme, la maladie, l'errance, l'absence d'avenir sur fond d'apocalypse, de fiction moderne, d'auto-fiction, de roman crépusculaire, d'apprentissage... Certains des plus grands y ont mis l'entièreté de leur existence à traiter tout ce que ce jeune écrivain tente de résoudre en deux cent pages. Maladresse ou prétention, le résultat est à l'image de notre avis : en demi-teinte, et c'est, réellement, bien dommage car il y a du désir vrai chez cet Hector Mathis. Pour plagier Julien Gracq, on a ici de la littérature, sans nul doute, mais on n'a pas encore l'estomac. Espérons pour lui comme pour nous autres, humbles lecteurs, que cela lui viendra !
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K.O. est une forme de chaos, un chant écrit dans l'urgence. Si ce livre était une musique, ce serait du jazz. Mais je ne sais pas pourquoi je vous parle au conditionnel, car ce livre a une musicalité. C'est du jazz, c'est peut-être cela ma première porte d'entrée dans ce roman, parce que j'aime le jazz. À d'autres moments du récit, le phrasé m'a fait penser aussi à du slam. Si j'étais Hector Mathis, son auteur, je proposerais à Grand Corps Malade de slamer son texte au hasard des rues, d'un café, d'une place au milieu de nulle part, sur le quai d'une gare, ici ou là, ou bien ailleurs sans doute, entre l'urgence de vivre et le rêve de partir toujours plus loin.
Sitam, le personnage principal, est fou de jazz et de littérature, il tombe amoureux d'une fille que l'on nomme la môme Capu. Elle dispose d'un toit provisoire, prêté par une connaissance. Tout semble provisoire ici. L'éphémère est leur quotidien, une joie folle et merveilleuse de la vie les anime...
Mais voilà que brusquement la ville explose de partout. Nous sommes à Paris, ce sont les attentats du 13 novembre 2015. Cela ressemble à une fin de monde. L'Europe bascule... Fuir, ailleurs, au loin. Alors ils décident de fuir vers Amsterdam, tandis que d'autres guerres mugissent plus loin encore, dans des paysages urbains dont la télévision délivre un écho virtuel. C'est une forme d'odyssée moderne qui commence.
Il y a donc la môme Capu, Archibald, clochard céleste, Benji. Et aussi plein d'autres personnages hauts en couleurs...
Sitam joue avec les mots, à moins que ce ne soit ceux d'Hector Mathis, son alter ego, son double. Faut-il une virtuosité de l'écriture, un sens de la musicalité des mots, pour rendre le chaos aussi beau ?
Ce texte est une fulgurance, portée par la misère et le jazz. Une étoile filante qui vient rayer la nuit de nos départs. Nous sommes toujours en partance. Lorsqu'on naît, lorsqu'on aime, lorsqu'on lit, lorsqu'on souffre, lorsqu'on meurt aussi. C'est toujours une furieuse fuite vers la nuit qui nous ressemble. Ce roman est ce voyage. Il nous le rappelle à chaque page, comme une caresse ou un coup de poing, parfois la différence n'est pas aussi flagrante, ou plutôt les deux se mélangent harmonieusement.
Il y a une beauté du monde, quelque chose de sauvage et de violent comme l'amour, de fidèle aussi. Mais la fidélité ressemble davantage à l'amitié. Alors, disons que ce roman nous parle d'amour et d'amitié à la fois. Pas facile de conjuguer ces deux sentiments parfois un peu contradictoires. Disons qu'il y a deux êtres qui s'aiment, qui brûlent, qui partent et sont merveilleusement entourés d'amis. La générosité slame dans les mots.
Il y a aussi une beauté de l'instant présent, de l'éphémère, du temps qui passe et accroche ses derniers gestes un peu comme les branches d'un arbre qui retiennent la lumière du soir avant qu'elle ne s'enfuie de l'autre côté du ciel qui brûle encore.
Parfois, le fantastique s'invite dans le texte et c'est excitant.
L'écriture d'Hector Mathis est généreuse. Les mots chantent à foison. Nous sommes dans l'errance et c'est merveilleux.
K.O. est un premier roman. Il y a forcément des failles, des maladresses, il y a aussi un embrasement qui saisit nos doigts, nos yeux, nos oreilles, notre coeur... Le corps tangue, vacille. Nous sommes habités par ce texte.
J'ai découvert que l'auteur a déjà écrit des chansons et les a écrites en banlieue. Donc, point de hasard.
Ce roman est abordé comme une partition, quelque chose qui se veut musical et qui tient à coeur l'auteur qui connaît la chanson, donc la musique. Les mots d'Hector Mathis ne doivent pas être lus dans la tranquillité, ils doivent être clamés.
Des thèmes sont abordées comme la maladie, la mort, l'amitié, la solidarité, l'époque dans laquelle nous vivons, une odyssée moderne, féroce, poétique. C'est vrai que le texte est furieusement poétique, c'est mon impression qui prédomine.
C'est un roman qui a du style, de la nervosité, de la musicalité, il est excessif, trop mais tant mieux, c'est écrit certainement dans l'urgence comme si l'auteur était pressé, non pas d'en finir mais de partir, achever une vie et passer déjà à autre chose, vous savez un peu comme Rimbaud qui annonçait déjà dans une Saison en Enfer, l'envie de passer à autre chose, ayant visité la poésie et s'en étant lassé au bout de trois ans, celle-ci n'ayant au bout du compte pas totalement répondu à son désir de partir. Il avait alors fui pour d'autres voyages. Ici, nous ne sentons pas l'auteur lassé des mots, bien au contraire. Pour autant, j'ai senti presque la même impatience...
Il y a aussi du lyrisme qui prend le temps de venir dans ce texte écrit dans l'urgence. J'aime !
Ici la nuit, la musique et la jeunesse se mêlent au chaos.
Nous en ressortons K.O.
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Et bien pour un premier roman c'est un coup de maître !
J'ai tout aimé. l'intrigue, l'ambiance, les personnages, l'écriture, le style……
On est pris du début à la fin par l'histoire de Sitam
Fuyant tous les attentats à Paris et ailleurs, il part en Hollande avec Capu, son amour.
Il écrit, voudrait publier, se lie d'amitié avec Lariol et P'tit Max, retrouve son pote de toujours, Benji.
Sa rencontre avec Archibald est très émouvante.
Tout est musique et poésie dans les lignes, tendresse et réflexion.
C'est une belle description du monde contemporain, des relations humaines, des passions et des faiblesses.
Un roman très riche et très complet.
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Roman de la solitude, de la débrouille, de la pauvreté, du désespoir. Mais aussi de l'amitié, de la solidarité avec ces laissés –pour-compte qui deviennent des marginaux. Un couple qui fuit une ville d'attentats. J'ai aimé l'écriture façon Slam, mais j'ai trouvé l'histoire un peu juste qui m'a laissée en lisière. Jeune auteur prometteur, je pense.
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****

Sitam et Capu, amoureux transis, décident de fuir Paris, en proie aux violences et où les sirènes des ambulances les assourdissent. Ils vont voyager en banlieue, en Hollande, et faire de belles rencontres. Ne se quittant que pour gagner quelques billets, Sitam et Capu vivent au jour le jour. Jusqu'à ce que que Sitam fuit... sa vie, ses amis, son amour...

Voici un premier roman plus que prometteur !! Hector Mathis écrit avec talent et nous entraîne, au rythme de ses mots saccadés, dans les pas d'un homme perdu. Généreux et altruiste, Sitam est un écrivain en devenir, qui ne veut pas lire la pitié ou le désespoir dans les yeux de ses proches. Au risque de devoir supporter une solitude bien lourde...
Il est rare d'entendre les mots qu'on lit. Ici, la musique rythmé les pages, les phrases et nos émotions...

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Buchet Chastel pour leur confiance... ainsi qu'aux 68 premières fois qui devraient faire voyager loin ce très beau roman...
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Bagatelles pour un massacre .

K.O d'Hector Mathis, reçu le 13/8/18 dansl e cadre d'une opération "Masse critique" [ Remerciements de rigueur à Babelio et à l'éditeur Buchet-Chastel ]
Ce livre, dont je viens, in fine, de lire les 26 critiques publiées à ce jour ici, n'a pas eu de chance avec moi . Il a succédé au "Lambeau de Philippe Lançon et le début de son exploration a été brutalement interrompu par l'arrivée de "Jaco le magnifique, journal d'un pilote de la France Libre" que j'avais commandé aux éditions Heimdal et que j'ai dévoré comme un mort de faim dès son arrivée . Me remettre au défrichement de K.O ensuite tenait du pensum .
Les 26 critiques évoquées plus haut sont très majoritairement dithyrambiques et certaines entonnent même le péan . Je serai donc le mouton noir de la tribu, je n'ai pas aimé, mais pas du tout, cette "chose" qui m'a emm...nuyé grave ! Je n'avais pas éprouvé cette débilitante impression depuis une certaine Rosenthal et ses "rennes après Noël" de calamiteuse mémoire .
- Dès le début, j'ai reconnu le style, plutôt la tentative de style qui se voulait épigone de l'F Céline, ça commence "D'un château l'autre" et cela se veut de la littérature à l'emporte-pièce, pour ne pas dire "à l'estomac" selon l'expression du cher Julien Gracq mais en fait, à mes yeux, c'est de la bouillie pour les chats . Bien sûr, je m'attendais à une exploitation prétendue "littéraire" des attentats islamistes mais le résultat ici est rien moins que convaincant et l'exil batave n'arrange pas les choses, j'ai continué à m'ennuyer ferme . L'épisode hospitalier avec son suspense à deux balles pour aboutir à une "maladie inflammatoire chronique" (page 130 )--- Quelle soudaine pudeur dans un bouquin prétendu déjanté ! "Maladie auto-immune" et "sclérose en plaques, ça fait si peur que ça ?--- ne soutient pas la comparaison avec "le lambeau" . le retour en 309 n'a pas arrangé les choses,faut vous dire qu'après avoir eu une 403 comme première voiture--- excellente caisse ! ---,j'ai eu des mots avec la maison Peugeot que je boycotte depuis près de 60 ans ! Un Breton a de la mémoire et pour avoir voulu m'arnaquer sur une reprise,ils ont perdu un client tout comme le camarade Hector a perdu un lecteur avec son "Casse-pipe" en forme de "Féérie pour une autre fois" . C'est mort et pas "à crédit" ! Ne dansons pas le "Rigodon" pour autant avec ou sans "baveux ni "carotte" (comprendre"biniou" ! )
Enfin Malherbe vint, non, pardon, c'est la fin ,enfin, page 201,avec "les orteils en mie de pain" pour Sitam/ Hector (page 200 ) , les méringeoises en décubitus latéral de survie pour moi : je suis arrivé au terminus de ce "voyage au bout de l'ennui " .
Que dire des comparses, le "Guignol's band, en somme ? Archibald le clochard, pâle décalco de l'Archimède de Grangier, Capu la copine ( tu as voulu nous évoquer la poésie de la comptine "dansons la capucine" et j'ai résisté à l'envie térébrante d'ajouter une horrifique cédille ! ), le "désopilant Benji le pensionné et sa patronne à la langue bien pendue (le reste aussi d'ailleurs ).
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