On n'est jamais sûr de rien avec la télévision : Chroniques 1959-1964

Il s’appelle Brassaï. C’est un photographe fameux, qui ne ressemble à aucun autre, un peintre en réalité, un sculpteur, qui a préféré la photographie à la sculpture et à la peinture pour de profondes raisons qu’il nous donne et qui à elles seules pourraient être l’objet d’une sérieuse étude. Mais d’abord il y a l’homme et il y a ses yeux, des yeux comme monstrueusement développés par l’usage qu’il en fait. Ils sont énormes, exorbités, prêts à sauter sur l’objet, sur la proie : à la lettre, il dévore des yeux les choses et les êtres.

À l’origine des westerns qui proposent aux petits garçons des deux mondes un type humain si rude, si brutal et si séduisant, il y a eu ceci qu’on nous montre : ces émigrants, ces lamentables exodes, ces pistes jalonnées de cadavres, cette ruée vers l’or que Charlot a rendue comique à jamais, et qui, en fait, a été féroce et criminelle - et surtout cette race indienne chassée de sa prairie et sauvagement détruite. Misérables Indiens qui n’auront pas assez survécu pour témoigner eux-mêmes de la brute que fut ce héros blanc des westerns… Et ce sont eux, les Indiens, qui feront à jamais figure de bandits.

Je n’ai aucun goût pour la harpe seule ! Elle a l’air de courir après l’orchestre qu’elle a perdu.