Citations sur L'Auberge de la Jamaïque (83)
Et les orages et les temps les avaient si bien noircis que si, par aventure, le printemps s’égarait en un tel endroit, aucun bourgeon n’osait se transformer en feuille de crainte de mourir de froid.
S’il nous était permis de citer Shakespeare […], d’étranges sermons seraient prononcés demain en Cornouailles.
Elle avait prié pour que sa mère lui fut longtemps conservée, pour que la ferme prospérât. Elle avait obtenu la maladie, la pauvreté, la mort. Elle était maintenant seule, prise au filet, un réseau tissé de brutalité et de crime ; elle vivait sous un toit qu’elle haïssait, parmi des gens qu’elle méprisait ; elle foulait une lande désolée, hostile pour rencontrer un voleur de chevaux et un assassin. Pour ce Noël, elle n’offrirait à Dieu aucune prière.
Ce jour-là, peu de nuages projetaient leur ombre et la lande se déroulait devant elle, prenant, sous le soleil, une couleur de sable. Un courlis solitaire se tenait, pensif, près du ruisseau, contemplant son reflet sur l’onde ; puis, pointant son long bec dans les roseaux avec une incroyable rapidité, il frappa la terre molle et, tournant la tête, il se dressa sur ses pattes. S’élevant alors dans l’air, il jeta son cri plaintif et partit vers le sud.
They left her then, with her face in the shingle, the breakers sweeping towards her not twenty yards away ; and as she lay there helpless, the breath knocked from her and her screams of warning strangled in her throat, she heard the cry that had been hers become the cry of others, and fill the air with sound. The cry rose above the searing smash oh the sea, and was seized and carried by the wind itself ; and with the cry came the tearing splinter of wood, the horrible impact of a massive live thing finding resistance, the shuddering groan of twisting, breaking timber.
Et cette jeune fille de vingt-trois ans était assise sur son lit, vêtue d'un jupon et d'un châle, sans autres armes que son cerveau pour affronter un homme qui avait deux fois son âge et plusieurs fois sa force et qui, s'il soupçonnait ce soir-là qu'elle avait observé ses faits et gestes, lui encerclerait le coup d'une seule main et, le pressant légèrement entre le pouce et l'index, mettrait fin à ses questions.
Elle ne parlait que pour émettre un flot d'absurdités sur le grand homme qu'eût été son mari si la malchance ne l'avait pas poursuivi. Toute conversation normale était impossible, et Mary prit l'habitude de la laisser dire et de lui parler aussi doucement qu'à un enfant, mais tout cela éprouvait ses nerfs et sa patience.
Joss Merlyn criait de toutes ses forces et le bruit était assourdissant. Lorsqu'il était ainsi, Mary ne le craignait point : ce n'était que fanfaronnade et comédie. Ce n'est que lorsqu'il baissait la voix jusqu'au murmure qu'elle le savait redoutable.
Une fatalité semblait s'attacher à la famille Merlyn, qui déjouait leurs bonnes résolutions et leurs efforts pour mener une vie décente. Ses annales étaient trop sombres. "Il ne sert de rien de lutter contre les mauvais instincts", disaient la mère de Mary, "ils arrivent toujours à prendre le dessus. On a beau se défendre, on n'est jamais vainqueur. Si deux générations vivent convenablement, cela peut parfois épurer le courant, mais, bon gré, mal gré, cela recommencera à la troisième génération."
Tante Patience, à sa façon, était une criminelle. Elle les avait tué par son silence. Son crime était aussi grand que celui de Joss Merlyn, car elle était femme, et lui était un monstre. Il était lié à elle, et elle le tolérait.