J'avais vu le film «
La route » il y a quelques années et je n'avais pas été tant convaincu. Je l'avais bien aimé, mais il ne m'en restait pas grand-chose.
Puis au détour d'autres lectures, le livre de
Cormac McCarthy, à partir duquel le film est basé, m'a fait de l'oeil. Je sentais l'envie de céder aux sons des critiques dithyrambiques que je lisais autour de ce livre.
Bien m'a pris de suivre ces conseils. Car «
La Route » restera gravé dans ma mémoire, dans mon coeur et dans mon âme comme un livre essentiel, incontournable. Un livre qui m'a mis KO plusieurs fois et qui m'a laissé choir en pleurs lors de ses dernières pages.
D'abord, il y a cette structure du livre sans chapitres, avec une succession de paragraphes, qui nous déstabilise quelque peu. le style est épuré, direct, descriptif, répétitif.
Instantanément, j'entre dans l'atmosphère de cette histoire.
Je me sens pris par l'ambiance irrespirable de ce monde postapocalyptique.
Cela devient de suite suffocant, dense, sans espoir apparent alors que tout en moi cherche à avancer avec les personnages pour trouver cet espoir, cette espérance dans un futur possible. Mais non, je vais finir par abandonner, tout est trop sombre, le soleil ne reviendra jamais.
Pourtant, quelque chose me maintient en vie, au fil des pages, quelque chose de puissant, de larvé, d'essence de vie qui s'exprime dans le cheminement de ces 2 personnages, l'homme et l'enfant.
Ils marchent, plutôt ils errent, dans un monde de cendre, froid, sans âmes qui vivent, ou si peu. La terre a connu l'enfer du feu, de la destruction massive, et nous sommes là, spectateurs de l'horreur d'une planète sans vie, où les quelques survivants, affamés semblent prêts à tout pour survivre. L'abomination semble alors avoir aussi pénétré de façon irrévocable le coeur et les actes des quelques rescapés de cette apocalypse.
Seul l'homme et l'enfant semblent encore maintenir debout la notion d'humain, d'humanité. Mais jusqu'à quand ?
Le père et le fils avancent vers le sud dans l'espoir de fuir le froid, à l'affût des dangers que représentent les autres et à l'affût de nourriture, de couverture, d'habit, d'outils.
Leur conversation est basique, sans fioriture, rare et à chaque fois impactante. Chaque mot de l'un ou de l'autre est un moment de répit, un moment de respiration, d'attente et de contact avec l'humain.
L'enfant toujours inquiet, franc, a besoin d'espoir, espoir de rencontre, espoir d'aider, espoir qu'il existe encore des gentils.
L'homme dans son coeur de père s'accroche à son fils pour le protéger, le nourrir. Il est plus cynique, plus désespéré. Il s'accroche à son rôle, celui qui dit que tout va bien aller. Il tient à cette histoire qu'ils sont les porteurs du feu. Y croit-il encore vraiment à cette histoire de porteurs de feu ? L'enfant oui, lui il veut y croire.
Le père est finalement plus confus, il a trop perdu. Son feu, c'est son fils, il ne lâchera rien, il assurera jusqu'au bout, jusqu'au moment où il ne pourra plus et que finalement à son dernier souffle, il pourra encore.
Qui de l'homme ou de l'enfant tient l'autre en vie ? C'est une fusion, c'est une réciproque.
Bref, ce livre immense est d'une intensité à la limite du supportable. Il nous questionne sur la vie, la mort inéluctable, sur l'absurde, sur le sens. Il y a-t-il un sens à la vie ? Sinon à quoi tout cela sert-il finalement. Quand tout semble sans issue, quelle est cette flamme, cette lueur, ce faible scintillement qui reste là, incarnée dans ces 2 personnages. Inexprimable chez l'homme. Pur chez l'enfant.
Ce livre, malgré les apparences est une ode à la vie, plutôt à la bonté qui anime la vie. Il nous rappelle que nous sommes tous porteurs de feu et c'est ce qui compte, c'est ce qui donne sens. L'apocalypse semble être la dernière tentative de nous éveiller à ça, sans rêverie illusoire.