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sur 6467 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
L'apocalypse a eu lieu. le monde est dévasté, couvert de cendres... Des cadavres s'amoncèlent sur le bord de la route. Quelques survivants s'épient, se guettent, s'attaquent, se mangent... Et parmi ces rescapés, un père et son fils errent sur la route. Ils fuient le froid et la neige des hautes montagnes. Ils veulent rejoindre la mer, et le temps plus clément pour survivre.

S'ensuit alors une longue odyssée de ce père avec son fils. Ils poussent un caddie rempli de victuailles et objets diverses trouvés par ci, par là, près des cadavres incendiés ou dans des maisons abandonnées. Et ils avancent coûte que coûte, sous la pluie, sous la neige, le jour jusqu'à la tombée de la nuit, toujours sur leurs gardes, toujours à l'affût des « méchants ». Ils ont froids, ils sont trempés, ils n'ont rien mangés depuis trois jours, mais font preuve d'abnégation et d'un courage à tout épreuve.

Je ne veux pas tomber dans l'excès de sensibilité, mais la lecture de ce roman de Cormac McCarthy m'a profondément ému. A chaque page, je sentais les larmes poindre le long de mes rides naissantes. Je suis bouleversé par cet univers décrit et par ce père qui, malgré tout, tente d'éduquer du mieux qu'il peut son fils, l'enfant. Pas facile de discerner le bien du mal dans ce chaos post-apocalyptique. Pourtant, la vie pourrait être plus facile, une balle de calibre 22 dans la tête et les voilà libérer de cet enfer. Mais le père a ce courage nécessaire pour inculquer à son fils le prix de la vie, même au milieu des cadavres brûlés, sous un paysage recouvert de cendres... Arriver à croire en un avenir, même incertain et espérer ; de toute façon, il ne reste que l'espoir pour survivre ; croire en la certitude que quelque part sur cette planète, il existe un autre enfant, un autre parent comme eux, qui font partie de la catégorie des « gentils » comme eux, pour partager ensemble le dessein des rescapés.

L'univers de ce roman est dépouillé à l'extrême. Il n'y a rien ou presque ; simplement la route, un enfant et son père, un caddie, de la cendre et toujours cette route vers le sud entourée de corps en décomposition. Pourtant avec si peu, cela donne un roman à la fois terrifiant et poignant. On ne saura rien de l'époque précédant l'apocalypse. de toute façon, on s'en balance un peu, on commence à connaître la folie et la barbarie des hommes, donc rien de bien surprenant à découvrir la planète sous le chaos... de courts chapitres, directs et uppercuts qui vous mettent en vrac tripes et intestins. le livre de l'année ? Sur le plan purement émotionnel, je vote « oui » les yeux fermés, d'ailleurs je n'ose plus les rouvrir, peur de l'avenir, peur du prochain.
Lien : http://leranchsansnom.free.f..
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Dans un univers dévasté, un homme et son fils marchent sur la route et j'ai marché avec eux.

J'ai vu le monde gris, sans oiseaux, ni verdure, avec un soleil voilé par le nuage de cendres, avec des ruines, des cadavres et des barbares cannibales.

J'ai ressenti la peur, la faim, le désespoir et aussi l'amour de ce père qui garde deux balles dans son revolver pour pouvoir mourir avec son fils.

J'ai pris "La route", un roman post-apocalyptique aux émotions intenses.
.
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Un homme et son fils sont sur La route. Il règne une atmosphère de fin du monde. Ils sont seuls. Chacun est tout l'univers de l'autre. Ils n'ont plus rien. Ils survivent en mangeant ce qu'ils trouvent dans les ruines de maisons abandonnées. Ils sont vêtus de haillons. Ils ont froid, ils ont faim, ils ont peur.

Tout au long de leur route, Ils préservent la part d'humanité, d'amour et de bonté qui est en eux. Leur bien le plus précieux. Sans cela, pourquoi survivre ? Ils veulent rester des hommes et « porter le feu ».
L'enfant est comme la parole de Dieu, un prophète. L'homme doit l'emmener quelque part, le plus au sud, vers la mer. Essayer de trouver de la chaleur et peut-être d'autres survivants qui ont gardé comme eux leur part d'humanité.

Les souvenirs du passé du père sont douloureux. Il ne faut pas se retourner sur eux. Se souvenir ce serait renoncer à lutter. L'enfant n'a pas connu la beauté et la bonté du monde passé. Il incarne l'espoir. Il se construit son monde, son culte, ses propres valeurs, guidé par l'amour que lui porte son père.

Peut-on réparer ce monde ? Demeure-t-il un espoir quelque part sur cette planète agonisante. ? Pourquoi continuer à avancer sur cette route de désespoir, de désolation, de ténèbres ?

C'est une longue route qui nous emmène au plus profond de nous-mêmes. Elle est douloureuse.
On garde espoir, car l'amour du père pour son fils ne vacille jamais. Il porte son fils et son fils le porte. Ensemble ils gardent espoir. Les dialogues sont courts mais intenses. Il faut peu de mots, car il reste peu de vie, peu de choses à transmettre. Il ne reste que le feu que le petit garçon porte en lui, l'essentiel, ce qui représente l'humanité.

Comment survivre sans espoir ? L'enfant représente le dernier éclat de lumière, la dernière lueur d'espoir. Et son père survit pour porter cette lumière, pour qu'elle ne vacille pas.
« l'homme levait les yeux en pleurant et il le voyait là debout sur La route qui le regardait du fond dont ne sait quel inconcevable avenir, étincelant dans ce désert comme un tabernacle. »
Le style est épuré, comme l'est cette vision d'un monde apocalyptique. La tension est constante. On tremble avec ce père et ce fils. On sombre aussi dans le désespoir. de ces dialogues courts et de ces descriptions de paysages sans vie, se dégagent de multiples réflexions philosophiques. La foi, l'espoir, le sens de la vie, l'homme, le bien et le mal.




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Enfin, je viens de lire le roman post-apocalyptique de Cormac McCarthy. Depuis le temps que ce livre était dans mes étagères à prendre la poussière. Heureusement les critiques de Caro29 et Bartzella m'ont donné envie de lui donner sa chance, car ayant déjà vu le film, cet univers particulièrement sombre ne m'attirait pas vraiment.

*
Dans une Amérique ravagée par un immense feu, un homme et son enfant, tentent de survivre en marchant vers la côte, empruntant une route déserte, recouverte de cendre. Dans l'histoire, ils n'ont pas de nom, on les appelle simplement "l'homme" et "le petit".
Ils ne possèdent pratiquement rien. Leurs maigres possessions sont conservées dans un chariot.

Il n'y a pas vraiment d'intrigue, leur combat paraît vain dans un monde déjà mort, devenu un enfer pour une raison que l'on ignore. Un sentiment d'impuissance et d'absurdité m'a étreinte tout au long de ma lecture.
Peut-il y avoir un dénouement heureux dans un univers aussi morose et déprimant ?

« le froid et le silence. Les cendres du monde défunt emportées çà et là dans le vide sur les vents froids et profanes. Emportées au loin et dispersées et emportées encore plus loin. Toute chose coupée de son fondement. Sans support dans l'air chargé de cendre. Soutenue par un souffle, tremblante et brève. Si seulement mon coeur était de pierre. »

*
Cette longue route vers le sud est particulièrement angoissante.
Le monde est figé, immobile, brûlé, grisâtre, recouvert d'un dépôt cendreux que le vent emporte.
La race humaine a pratiquement disparu.
Le ciel est vide, la mer est vide, les forêts sont vides.
Tout est mort, l'herbe, les arbres, les champs, l'eau.
Tout est monochrome, exempte de couleurs.
La neige qui tombe est grise, le ciel est gris, l'océan est gris acier.

« le noir dans lequel il se réveillait ces nuits-là était aveugle et impénétrable. Un noir à se crever le tympan à force d'écouter. Il était souvent obligé de se lever. Pas d'autre bruit que le vent dans les arbres dépouillés et noircis. Il se levait et titubait dans cette froide obscurité autiste, les bras tendus devant lui pour trouver son équilibre tandis que les mécanismes vestibulaires faisaient leurs calculs dans son crâne. »

*
Cette route est d'une tristesse infinie.
Le désespoir et la solitude sont très présents, disséminés entre les lignes, mais les deux personnages avancent sans se retourner.
Affronter le froid, la pluie, l'épuisement, la faim, l'incertitude, le découragement, la peur.
Faire l'économie des mots, aller à l'essentiel.
Rester en vie et continuer à vivre coûte que coûte.
S'accrocher à la vie avec l'énergie du désespoir.

« Là où tout était brûlé et réduit en cendres devant eux il n'était pas question de faire du feu et les nuits étaient longues et sombres et froides plus que tout ce qu'ils avaient connu jusqu'à présent. Froides à faire éclater les pierres. A vous ôter la vie. Il serrait contre lui le petit qui grelottait et il comptait dans le noir chacune de ses fragiles respirations. »

*
Cette route est terrifiante, oppressante et même glauque.
Les dangers sont omniprésents. En la parcourant, ils sont à la merci de hordes qui n'hésitent pas à tuer .

« Il l'avait entraîné à rester tapi dans les bois comme un faon. »

*
Vous l'aurez compris, cette route est particulièrement terne, sinistre, étouffante, piégeuse. Pour eux qui rêvent d'un futur plus clément, cette route est symbole d'espoir.

Ce que je retiens également, c'est cette lumière que j'ai décelée au milieu de toute cette noirceur.
Cette lumière, c'est celle de cette magnifique relation père fils. Chacun soutient l'autre par la force de son amour.
L'amour de ce père pour son enfant n'a pas besoin de mots. Il a beaucoup de gestes tendres envers son fils. Loin d'être dépourvu de sensibilité, il est, malgré tout, prêt à recourir à la violence et à tuer pour protéger son enfant.
L'enfant m'a touchée aussi. Frêle et apeuré, il n'apparaît pas armé pour faire face à la violence de ce monde qui a perdu toute humanité. Il n'a connu que ce monde de désolation, et pourtant, il fait preuve de sensibilité, de générosité et de compassion.

« Tu voulais savoir à quoi ressemblent les méchants. Maintenant tu le sais. Ça pourrait se reproduire. Mon rôle c'est de prendre soin de toi. J'en ai été chargé par Dieu. Celui qui te touche je le tue. Tu comprends ?
Oui.
Il était assis, encapuchonné dans la couverture. Au bout d'un moment il leva la tête. On est encore les gentils ? dit-il.
Oui. On est encore les gentils.
Et on le sera toujours.
Oui. Toujours.
D'accord. »

*
Cormac McCarthy a une prose particulièrement originale.
J'ai aimé son écriture simple, très directe, épurée, économique en ponctuation. J'y ai même trouvé de la poésie.

Souvent intégrés dans la narration, les dialogues sont concis, vont à l'essentiel. Les propositions coordonnées sont comme des fragments de leur vie quotidienne, une juxtaposition de gestes mécaniques, répétitifs, d'une profonde monotonie, mais essentiels, vitaux.

Ce style d'écriture aurait pu amener une certaine lourdeur au texte, mais je l'ai perçu différemment. Il contribue, au contraire, à renforcer cette atmosphère lourde et oppressante. On ressent ce froid permanent, ce monde dépouillé et effrayant, et ces cendres qui se déposent partout.
Il marque aussi le courage, la persévérance et la ténacité des deux personnages.

« Les nuits étaient mortellement froides et d'un noir de cercueil et la lente venue du matin se chargeait d'un terrible silence. Comme une aube avant une bataille. La peau du petit était de la couleur d'une bougie et presque transparente. Avec ses grands yeux au regard fixe il avait l'air d'un extraterrestre. »

*
« La Route » est une histoire déprimante, certes, émotionnellement éprouvante, oui, j'en conviens. Mais elle est aussi profondément humaine, émouvante et poignante. J'en ressors particulièrement émue.

En créant un univers post-apocalyptique impressionnant, Cormac McCarthy a écrit une oeuvre très forte, certains diront un chef d'oeuvre. Je ne sais pas, mais ce qui est sûr, c'est qu'il ne faut pas hésiter à emprunter cette route et à vous faire votre propre avis.
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Homo homini lupus est !

"Les nuits obscures au-delà de l'obscur et les jours chaque jour plus gris que celui d'avant. Comme l'assaut d'on ne sait quel glaucome froid assombrissant le monde sous sa taie." (P9)

Toujours être sur ses gardes
Toujours regarder derrière soi
Toujours avoir peur
Toujours s'inquiéter
Toujours se méfier
Toujours continuer
Toujours marcher
Toujours y croire
Sans cela c'est la mort
D'accord !

Homo homini lupus est !

"Le froid et le silence. Les cendres du monde défunt emportées ça et là dans le vide sur les vents froids et profanes. Emportées au loin et dispersées et emportées encore plus loin. Toute chose coupée de son fondement. Sans support dans l'air chargé de cendre. Soutenue par un souffle, tremblante et brève. Si seulement mon coeur était de pierre." (P16)

Un monde sans règle
Devenu un état de nature
Atrocité
Barbarie
Bestialité
Cruauté
Insensibilité
Sauvagerie
Une humanité perdue
Celle qui reste à la dérive

Homo homini lupus est !

"Sur cette route il n'y a pas d'hommes du Verbe. Ils sont partis et m'ont laissé seul. Ils ont emportés le monde avec eux. Question : Quelle différence y a-t-il entre ne sera jamais et n'a jamais été ?" (P35)

Cormac McCarthy écrit
François Hirsch traduit
Une poésie sauvage
Une prose qui transpire la peur
Des paragraphes courts et oppressants 
Pour prendre aux tripes
Des dialogues minimalistes
Peut-être bien
Mais que dire quand il n'y a plus rien
Et que l'homme est devenu un loup pour lui-même ?
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Voilà. Je referme tout juste ce livre à la couverture blanche.
Le propos du livre est très clair, mais nécessaire: Après l' apocalypse, ce sera trop tard. Il ne restera rien, ou si peu...Libre à vous, si vous êtes encore en vie, de vouloir continuer de survivre. mais à quel prix?
Dans le bouquin de Cormac Mac Carthy, le temps s'est dilué dans un immédiat de cendre et de mort.
Quelqu'un a baissé l'interrupteur et la lumière ne reviendra pas.
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DANS UN MONDE DE CENDRES ....
L'auteur a jugé nécessaire de déclarer et répéter que la route n'étais pas un roman de science-fiction ..
De façon tellement forte qu'on l'a cru et que si vous le cherchez .. : vous le trouverez à littérature étrangère ..
C'est de la science-fiction ... plongez-vous vous dans les romans de J C Ballard et vous en aurez la confirmation !
( on peut donc écrire de la science-fiction inconsciemment !! mince c'est fou !! )...
L'apocalypse a eu lieu et peu importe sa cause : humaine ou divine pas de réponses sur la causalité à espérer du récit ...
Un père et son très jeune fils sont sur une route déserte et dangereuse ils s'en écartent peu tout est noir . .
Tout ce qui vit semble destiné à mourir .. boites de conserves .. famine ... méfiance .. risques variés ...
La crainte faire de mauvaises rencontres et surtout de demie mauvaises rencontres ponctuent le récit avec cette question lancinante :
la confiance est-elle possible et souhaitable , est-elle une solution ? ...
Dans un contexte pareil quel présent et quel avenir peuvent avoir un sens ?
Il y a assez peu d'action et c'est une monotonie poignante qui domine , caractérise et nimbe tout .
La charge émotionnelle est très forte .
Le père protège et tente de préserver l'enfant qui réagit comme un enfant et là il y a beaucoup de finesse , de douleur et certainement pas assez d'espérances car c'est de toutes les façons impossible d'en avoir ...
On peut difficilement donner son avis sur ce texte intense sans trop " spoiler " .
La lecture en est une vraie ascèse , à cause de la monotonie ... à cause de ce qui est arrivé ...
à cause de ce qui risque d'arriver et à cause de ce qui arrive ....
Il n'y a rien d'autre dans ces lignes que le tableau d'un monde pathétique , tout est fini et , tout continue comme avant
d'une curieuse façon l'homme restant fidèle à lui-même .
Y a-t-il un moyen de se sauver ? de survivre ? l'égoïsme est-il devenu vital ? la vie en société est-elle encore possible ?
est-elle une solution et un recommencement ?
La fin que je ne veux pas dévoiler répond peut être à ces questions ?
Ce n'est pas un livre pour se distraire c'est un livre pour ressentir et réfléchir .

C'est bien . c'est pénible et c'est douloureux
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Angoissant.
Quelque part dans le temps, quelque part sur la route, tout est gris. le ciel, le sol, l'eau, le soleil, les vêtements, la peau. Dans toutes les teintes de gris. Tout est mort depuis longtemps, faune comme végétation, mais la cendre continue de tomber. Dans le froid, la pluie, la neige, l'humidité, où que le regard se pose, le décor est gris. Sale. Pourri. Détruit. Corrodé. On ne sait pas ce qui s'est passé.

Sur la route, deux personnages dépourvus de noms. "Il" c'est le père, "le petit" c'est son fils. Tous deux avancent sur la route et se cachent dès que quelqu'un approche, bivouaquant à l'écart, à l'abri des arbres morts et des regards avec le peu de ressources qu'ils possèdent. le monde tel qu'il est devenu est des plus dangereux, mieux vaut éviter tout contact avec autrui, si jamais autrui il y avait. Nulle part, il n'y a âme qui vive. On dirait un monde vide. Triste. Gris. Leur but; quitter le nord froid pour rejoindre un sud peut-être un peu plus clément, qui sait. Ils ne savent pas ce qu'ils vont trouver là-bas. À l'aide d'une carte en lambeaux, ils sillonnent la route vers le sud. La route, on n'en connaît pas le point de départ ni le point d'arrivée. C'est la route, point final. Un lieu sans âme, fil conducteur seulement.

C'est un "format" d'écriture comme je n'en ai jamais vu. J'avais peur que cela me rebute. Les phrases sont construites avec peu de virgules et beaucoup de conjonctions "et" (parfois jusqu'à 4 ou 5 !) au sein d'une même phrase. Les dialogues, peu nombreux d'ailleurs, sont construits parfois comme une phrase ordinaire dans un paragraphe (le même que celui sans dialogues), incluant les deux interlocuteurs, ou comme des vers de poèmes, le tout sans tiret. Il n'y a pas non plus de chapitres. Seulement une succession de petits ou gros paragraphes.

À première vue, c'est étrange. Au début, c'est un peu agaçant mais on s'habitue vite au style. Surprenant mais l'auteur a réussi à trouver la bonne recette et façonner le tout pour que cela fonctionne. Les conjonctions "et" répétées donnent l'impression que les actions du père et du fils sont faites de façon plutôt mécaniques, machinales, un enchaînement de nécessités dans leur morne, dur et souffrant quotidien. Cela donne un certain rythme, haché, à des actions déplaisantes pour eux.

Le fait que les personnages n'aient pas de noms ne m'a pas dérangée. Cela a pour effet que l'on ne développe pas d'attachement particulier à aucun d'entre eux. On ne leur identifie pas une personnalité propre. On ne sait pas tellement à quoi ils ressemblent, ils pourraient être n'importe qui d'entre nous. Ceux qu'ils croisent également. le focus est plus sur ce qu'ils vivent et leur condition physique que sur leur apparence. Cela crée une sorte de distance, de froideur qui correspond à cet univers gris.

Puisqu'il n'y a aucuns chapitres non plus, nous avons l'impression qu'ils ne font jamais de pause. Qu'ils n'ont pas le choix de continuer à avancer, coûte que coûte. Les jours succèdent aux nuits, les nuits succèdent aux jours, ne leur laissant aucun répit entre chaque tranche de la journée. Les actions sont lentes mais je pense que cet enchaînement continuel de paragraphes contribue à faire passer l'histoire plus vite. En tous cas, on ressent peu la lenteur. Pourtant, la misère, elle, frappe de plein fouet et on sent qu'elle est toujours là. La tension, aussi !

En fait, j'ai bien aimé ce roman pour ces petits détails particuliers qui en font toute l'essence. Ces détails sont plus une force qu'une faiblesse, en tous cas dans ce roman-ci. Je ne pense pas que cela marcherait bien tout le temps ou dans n'importe quel livre. Et même s'ils ne sont que deux, qu'ils parlent peu et qu'ils tentent de survivre au jour le jour en avançant un pied devant l'autre, je ne l'ai ni trouvé long ni ennuyeux. C'est l'histoire d'un père et de son fils qui tentent de survivre un jour à la fois dans un monde dévasté, froid et hostile, ni plus ni moins. Peu de moments joyeux en perspective pour eux. Un climat où personne n'aimerait se retrouver. C'était d'un réalisme effrayant. Espérons ne jamais connaître ce monde-là !

J'avais déjà vu le film et c'est avec ces images en tête que la progression de ce petit roman s'est effectuée. Bien apprécié les deux. Un environnement dont on ignore la cause mais où on subit toutes les conséquences. Un très bon divertissement en tous cas, qui passe vite et qui fait froid dans le dos. À lire sans faute !

LC THÉMATIQUE DE DÉCEMBRE : LE RETOUR DE L'HIVER
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Il y a quelqu'un qui nous regarde, Papa.
Oui.
Tu ne me crois pas.
Si mon fils. Je te crois.
Il nous observe de là-haut.
Oui. Je sais.
Au début, je croyais que c'était un oiseau.
Oui.
Il n'y a plus d'oiseaux, n'est-ce pas ? Que dans les livres ?
Oui seulement dans les livres.
Il est au-dessus de nous, il a de grosses lunettes et je vois son doigt qui semble nous poursuivre.
C'est un lecteur. Il suit notre histoire avec ses mains qui vont et viennent sur les pages du livre. À l'endroit où nous marchons.
C'est à cause de lui que nous sommes ici ?
Non, bien sûr.
Tu es vraiment sûr ?
Oui. Il ne faut pas avoir peur.
Tu dis toujours ça.
Je sais.
C'est un gentil ou un méchant ?
Je pense que c'est un gentil, mais il faut toujours se méfier.
Comment tu sais ?
Je le sais. C'est tout.
Il va nous suivre jusqu'au bout de notre périple ?
Sans doute, oui.
Et après ? Que fera-t-il ?
Après ce sera une autre histoire.
Laquelle, Papa ?
Je ne sais pas. La sienne, celle des autres. D'autres histoires.
Alors la nôtre va finir un jour ?
Ça va aller.
Je sais.

La route, roman de Cormac McCarthy, est le périple d'un père et son fils, vers la mer. Plus qu'un périple, c'est une errance, une fuite...
On devine qu'une tragédie universelle hors du commun a eu lieu, ayant dévasté le monde, une sorte d'apocalypse. D'autres humains encore vivants errent parmi la neige et les cendres qui recouvrent le paysage. Parfois ils avancent avec leurs masques à oxygène comme des automates parmi les cadavres, comme des somnambules, comme des zombies surgis d'une histoire horrifique.
Le père et le fils se cachent d'eux, les craignent comme si c'étaient des hordes sauvages livrées à elles-mêmes. Ils continuent inlassablement à pousser un caddie d'objets hétéroclites. Ils sont à la recherche de nourritures pour subvenir à leurs besoins.
Le voyage sera encore long, vers le sud, vers l'océan.
La flore et la faune ont disparu. Parfois au loin on entend un chien aboyer, son cri traverse la nuit.
La vie semble s'être retirée dans l'envers de ce décor devenu sinistre. On sait peu de choses finalement de ce qui vient de se passer, de ce qui se passe, on ne connaît pas les noms des deux fugitifs. En ont-ils seulement un désormais ? Où est la mère ?
On ne connaît rien de la tragédie qui est survenue. C'est le silence apocalyptique qui règne sur ces pages épurées.
Le style est dépouillé, d'une écriture tout en retenue qui laisse deviner plus qu'elle ne dit les choses. C'est le miracle et la force de cette écriture performatrice qui sert à merveille le récit narratif et lui donne tout son sens.
Y a-t-il encore de l'espoir, de la lumière dans ces pages qui déploient des contrées d'une tristesse infinie ? Pourtant ils sont portés sur cette route par un élan qui donne à leur relation une tendresse infinie qui éclaire les mots, les pages, leurs pas.
La fragilité du père et du fils les rend touchants.
Parmi le monde qui s'effondre, c'est un reste d'humanité qui se terre dans cette relation magnifique entre un père et son fils et qui donne à ce livre la lumière qui semble s'être retirée du paysage.
Survivre, avancer, ne jamais renoncer.
Il y a aussi une sorte de dignité, une fatalité dans un cheminement devenu absurde, au milieu d'un monde dévasté, du chaos qu'il en reste, qui donne à cette errance une dimension philosophique.
Ce récit est devenu alors sous mes yeux une sorte d'allégorie.
C'est une odyssée crépusculaire parmi les décombres de la condition humaine, qui dit la vacuité du monde, qui dit la confrontation avec le mal, sans chercher à questionner, affirmant seulement son existence inéluctable.
La forme du texte invite à nous pencher au-dessus de la béance de l'humanité.
Et dans cette errance où peu à peu les rôles du père et du fils s'inversent, dans ce beau geste de la transmission, il y a quelque chose de furieusement christique qui emporte le récit.
J'ai été touché au coeur par ce roman.
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Note : 5/5
Je n'étais pas loin du coup de coeur. Oh ce roman est une pépite. Bouleversant et tétanisant.
Un père et son fils au lendemain de l'apocalypse se retrouve à arpenter une route avec un caddie. Il traverse le froid, les bois avec la peur au ventre et affamé et le danger qui rôde partout…..
Ce roman même s'il se passe en extérieur est comme un huis-clos. Deux personnes seules. Cormac McCarthy donne le stricte minimum pour que lecteur se sente seul. Entre le père et son fils pas de dialogue qui donne de l'action. On suit leur mésaventure : le froid, la faim, la peur, la salété, le décor morbide.
Un roman qui mérite amplement son Pulitzer. Et un film que je me ferais une joie de regarder en espérant qu'il ait gardé l'esprit du livre.
Une sensation de solitude parfaitement transcrit par l'auteur.
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