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Citations sur La vérite sur l'affaire Savolta (6)

Nous déjeunions et dinions ensemble par pur respect des convenances, et parce que Maria Coral trouvait commode que je choisisse le menu : la carte, avec tous ses noms en français, la déconcertait.
-- Je me demande si tu as mangé autre chose jusqu'ici que des sandwiches au chorizo, lui dis-je un jour.
-- Peut-être bien, mais au moins je ne fais pas semblant de n'avoir rien mangé d'autre que du caviar et de la langouste, m'attirai-je pour réponse.
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(...) j'admets aussi bien la morale traditionnelle que les idées nouvelles et révolutionnaires qui semblent aujourd'hui jaillir de toute cervelle qui pense un peu. A bien y regarder, elles tendent toutes à la même chose : à canaliser, à donner un sens au comportement de l'homme dans la société ; et elles ont entre elles un point commun, remarque bien : leur vocation d'unanimité. La nouvelle morale se substitue à l'ancienne, mais ni l'une ni l'autre n'envisage de coexistence possible, et toutes deux refusent à l'individu la faculté de choisir.
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Cela n’intéressait pas le commissaire de savoir qui avait tué Pajarito de Soto. L’attentat mortel perpétré contre Savolta accaparait toute son attention et presque toute son énergie. Ce n’était pas d’un simple assassinat qu’il avait à s’occuper, mais de l’ordre social, de la sécurité du pays. Vázquez était un policier méthodique, tenace et peu enclin aux examens fantaisistes. Si quelqu’un avait classé l’affaire Pajarito de Soto, c’était qu’elle devait être classée. Pour le moment, ses préoccupations étaient tout autres. D’autre part, Nemesio Cabra Gómez n’avait pas l’air d’un individu digne de confiance. Il se contenta de lui accorder une certaine considération et de faire la sourde oreille à toutes les sottises que voulut proférer l’importun.
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Y aura-t-il quelqu’un pour ‘écouter avec des oreilles qui ne soient pas celles de la froide raison ? Je sais, je sais. Par dignité, j’aurais dû mépriser les flatteries de ceux qui avaient provoqué, directement ou indirectement, la mort de Pajarito de Soto. Mais je ne pouvais pas payer le prix de la dignité. Quand on vit dans une ville démesurée et hostile ; quand on n’a pas d’amis, ni les moyens de s’en faire ; quand est pauvre et qu’on vit dans la crainte et l’insécurité, qu’on est fatigué de parler avec son ombre ; quand on déjeune et dîne en cinq minutes et en silence, en faisant des boulettes avec la mie de pain, et qu’on quitte le restaurant la dernière bouchée à peine avalée ; quand on souhaite que le dimanche s’achève une bonne fois pour que reviennent les jours de travail et les têtes connues ; quand on sourit aux receveurs en les entretenant durant quelques secondes d’un commentaire improvisé, plat et futile, alors on se vend pour un plat de lentilles accommodé d’une demi-heure de conversation. Les Catalans ont l’esprit de clan, Barcelone est une communauté fermée, Lepprince et moi étions des étrangers, à un degré plus ou moins grand, et nous étions tous les deux jeunes.
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– Cortabanyes est un grand homme, dit un jour Lepprince, mais il a un grave défaut : il éprouve de la tendresse pour lui-même et cette tendresse engendre une pudeur héroïque qui le fait se moquer de tout, à commencer par lui-même. Sons sens de l’humour est trop sec : il repousse au lieu d’attirer. Il n’inspirera jamais confiance, et rarement de l’affection. On peut être tout ce qu’on veut dans la vie, sauf un pleurnichard.
– Comment se fait-il que vous le connaissiez si bien ? lui demandai-je.
– Ce n’est pas lui que je connais, c’est son masque. La nature crée des types humains infinis, mais l’homme, depuis ses origines, n’a inventé qu’une demi-douzaine de masques.
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J.D. – Avez-vous facilement localisé Pajarito de Soto ?
M. – Je le localisai, mais ce ne fut pas facile.
J.D. – Racontez-moi comment vous avez fait.

À quoi bon ? Ce furent de longues journées de marche fatigante, de conversations réticentes, de pots-de-vin infructueux, de planques épuisantes, de filatures sans but et stériles, jusqu’au moment où je trouvai enfin la bonne piste. Je voulais réussir à tout prix, non pas tant pour me faire bien voir de Cortabanyes que pour satisfaire Lepprince, dont l’intérêt pour moi m’ouvrait les portes sur des expectatives imprévues, sur des espérances insensées. Je voyais en lui une possible issue au marasme qu’était le cabinet de Cortabanyes, à ces longs après-midi monotones et improductifs et à cet avenir médiocre et incertain. Serramadriles était ma conscience, mon signal d’alarme lorsque mon courage tombait ou que je me laissais dominer par l’aboulie ou l’abattement. Il disait que Lepprince était « notre loterie », le client qu’il fallait choyer et satisfaire, avec lequel il fallait être empressé et utile jusqu’à l’obséquiosité, efficace en apparence et loyal par intérêt, quoi qu’il en coûtât. Il me brossait un avenir sordide et haïssable aux ordres d’un Cortabanyes de plus en plus vieux, de plus en plus irritable et de plus en plus abandonné par la fortune. Il me peignait au contraire un splendide panorama du côté de Lepprince, dans les hautes sphères de la finance et du commerce barcelonais, dans le grand monde, avec ses automobiles, ses fêtes, ses voyages, son vestiaire et ses femmes, de vraies fées, et un trésor en bon argent brillant, sonnant, de cet argent qui sortait des pores de cette bête rampante qu’était l’oligarchie catalane.
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