La première règle de vie, la seule dans bien des cas, était d'accepter de porter tous les fardeaux que l'existence convoyait jusqu'à eux. Ils étaient des endurants. Pas des conquérants.
Celles qui n'avaient que des filles les faisaient filer droit. Elles leur apprenaient à vivre comme elles l'avaient fait elles-mêmes.Les dents serrées, le dos bien rigide, l'espérance vaincue. Les filles se marieraient, enfanteraient, se tairaient. Leur vie passée à ruminer des rêves irréalisables s'écoulerait à grands flots d'amertume muette.
La fierté ne s'enseigne pas aux peuples !Les indiens d'Amérique ne savaient ni lire ni écrire !
Cependant, ils ont préféré mourir plutôt que se soumettre.
En Afrique, le vide n'existait pas. Même les déserts étaient habités.Il y avait toujours quelqu'un, quelque chose de vivant.
De son point de vue, la vie entiere des Africains se passait a échapper a la mort. Ils ne semblaient meme pas se rendre compte qu´elle les environnait. Elle était dans les cours d´eau au fond desquels proliféraient des vers. Ces derniers causaient des ulceres qui rongeaient les chairs des enfants. Elle était dans l´eau de boisson, dans les mares qui stagnaient aux abord des habitations, envoyant des nuées de moustiques couvrir le monde a la nuit tombée. La mort était partout dans la misere insalubre de l´Afrique. La mort était partout dans l´ignorance des populations. Et la mort était dans les tradiions. Dans ces comportements nécrophiles qui impliquaient souvent la conservation des cranes des trépassés. Dans les pratiques de sorcellerie, ou des potions étaient fabriquées avec de la poudre d´ossements humains ou avec des visceres. Dans certains rituels qui pouvaient parfois finir en bains de sang, et personne ne s´émouvait outre mesure devant le déces de cette femme qui n´avait pas été suffisamment endurante, suffisamment femme, pour retenir les flots de sang répandus lors de son excision. La mort avait fait de l´Afrique son royaume. Il suffisait de voir les nuées de mouches qui couvraient de leur ombre des territoires entiers pour n´en pas douter, la mouche était gardienne de la mort. Il semblait cependant a Ayané que l´etre africain qui méprisait cette mort multiforme, dansant et riant sur son dos, courbait l´échine devant elle sitot qu´elle s´incarnait dans des chefs. Ele prenait forme humaine, tenait le chasse-mouches, arborait le chéchia en peau de panthere, et sévissait tout son soul.
La nuit est un calice rempli de sang, et les ténèbres s’accrochent au ciel.
Tout ce temps elle n'avait fait qu'effleurer l'Afrique, la supposer... Et se refuser à elle.
si donc la lumière qui est en toi est ténèbres,quelles ténèbres.
Si le soleil est carnassier, la nuit est homicide.
Confessons la faute ! Prenons -en notre part . Je le dis et le redis ! Il est temps de reconnaître que nous avons participé à notre propre saignée Si nous n'admettons pas les noirceurs du passé, saurons-nous nous défaire de celles qui nous étreignent encore si vigoureusement ? Voici ce jour nos fils en route pour la guerre Voici qu'une fois de plus, et sans prendre la mer, ils sont privés d'amour et de lumière Tandis que nous quémandons la culpabilité de l'Occident, à qui nos enfants demanderont-ils réparation ? p.208