L'humanité, à la fois affolée des conséquences de ces actes et infatuée d'elle-même, se croyait à l'origine d'un nouveau temps géologique.
Comprendre en profondeur la tradition, c’était aussi savoir l’interpréter au mieux.L’ancien se plaisait à rappeler que les racines connaissaient une dégénérescence toute naturelle.Il leur fallait faire place à d’autres afin que la plante subsiste et se perpétue.
La journée avait été longue, et la nuit promettait d'être courte. Le Conseil tenait une de ses assemblées nocturnes au cours desquelles les affaire du Continent étaient abordées sur le plan de l'éthique traditionnelle. Cette terminologie avait été choisie pour éviter le recours au terme de spiritualité qui s'appliquait aujourd'hui à tout et son contraire. Il arrivait, comme en ce moment, que les membres ne siègent pas sous leur apparence diurne, révélant leur vrai visage. En tant que mokonzi [chef d'état de Katiopa], Ilunga prenait part à certaines de ces réunions, mais il ne faisait pas partie de l'ennéade des Conseillers. Il se trouait là, cette nuit, en compagnie d'humains faisant corps, pour l'occasion, avec la dimension de leur être se rapportant à une force de la nature. p. 114.
"Elles refusaient que ces étrangers fassent l’objet d’un rapatriement forcé, mais se satisfaisaient de les voir mordre la poussière, faire l’expérience de l’infériorité, de l’invisibilité, du silence. Ce n’était pas le comportement le plus charitable, mais c’était ainsi, le passé avait laissé des traces. Sans se l’avouer, on se réjouissait de voir les maîtres de l’ancien monde réduits à leur plus simple expression humaine, passés de premiers à derniers. Cette petite revanche n’avait pas encore duré assez longtemps pour que l’on en soit repu. Le mokonzi devait tenir compte de cela."
Revendiquer, faire entendre sa colère en public, c'était admettre qu'on entretenait avec les autres une relation, même viciée. Se cantonner à des espaces communautaires, c'était tourner pour jamais le dos à ceux dans lesquels on refusait de voir ses semblables.
Ces mots disaient le refus de se laisser enterrer vivants.
Boya n'était pas de celles qui se sentaient incomplètes sans une présence masculine permanente à leurs côtés. Elle n'était ni obsédée par la nécessité de trouver un compagnon, ni emmurée en un lieu supposé la protéger du chagrin. La femme s'épanouissait dans cette aisance intérieure quand le souffle bleu d'Ilunga l'avait enveloppée. C'était un cadeau de la vie, une porte ouverte sur de nouvelles expériences. Leur présence dans cet endroit improbable, la manière dont ils s'y étaient rendus, le confirmaient. Qu'il n'y ait aucune ombre au tableau aurait sans nul doute retiré une partie de sa saveur à cette histoire. Elle était à la fois donnée et à faire, comme ce grand saut qu'ils exécutaient ensemble dans le premier rêve où l'homme lui était apparu.
On voulait être libre sans opprimer quiconque.
Pour liquider un peuple,on commence par lui enlever la mémoire. On détruit ses livres,sa culture,son histoire. Puis quelqu’un lui écrit d’autres livres, lui donne une autre culture, lui invente une autre histoire. Ensuite ,le peuple commence à oublier ce qu’il est, et ce qu’il était.
Et le monde autour de lui l’oublie encore plus vite.
Il n'y avait pas de détritus au sol, cette architecture offensait assez la terre, en plus de polluer l'atmosphère.