Le 1er juin 1641, le feu embrasa la toiture qui couvrait la grande nef de St.-Bavon. Heureusement la voûte avait été reconstruite à neuf, par les soins de l'évêque Triest, et elle arrêta les flammes. Néanmoins, comme le péril était imminent, comme on ne savait pas que l'incendie aurait une fin aussi prompte, le retable fut enlevé dans l'espace d'une heure.
Quand il eut repris sa place sur l'autel, son ancien trône,la foule continua de se presser alentour aux époques solennelles. Cet usage était encore observé, lorsque l'empereur Joseph Il parcourut l'église en 1785. On lui montra l'Agneau mystique, et, chose vraiment surprenante ! Adam et Ève le scandalisèrent. Le prince voltairien jugea peu décente leur nudité naïve : le lecteur de la Pucelle blâma la chaste ingénuité des vieux artistes; il s'étonna de ce qu'on laissait voir un pareil tableau à la multitude. On prit pour des ordres positifs ses remarques saugrenues et on ferma servilement les ailes. Une nuit factice enveloppa la noble image : un monarque pudibond l'avait critiquée, elle n'était plus digne de voir la lumière et ne devait plus affronter le soleil.
Un autre tableau de Jean Van Eyck eut aussi une destinée singulière. Il représentait un jeune homme et une jeune fille, contractant mariage et unis par la Fidélité : nous en avons déjà dit un mot. Cette composition allégorique tomba entre les mains d'un barbier à Gand. La princesse Marie, soeur de Charles-Quint et gouvernante des Pays-Bas, eut l'occasion de la voir chez lui : elle la trouva si belle, si brillante, qu'elle en fit l'acquisition et donna pu propriétaire, pour l'obtenir, une charge qui lui rapportait cent florins annuellement.