On the brinks

Après ça, seules deux choses étaient certaines. Premièrement, quand un doigt nu vous fouillait le cul, c'était la Verrue. Deuxièmement, Dieu cessa d'exister à partir de ce jour.

« T'as toujours pas pigé, hein, Hippo ? dis-je, installé sur le dos, les yeux collés au plafond.
_ Pigé quoi ? Que vous êtes tous une bande de fêlés ?
_ Non. Loin de là. Fais attention et apprends. Premièrement, on n'a rien à foutre de ce que pensent les gens de l'extérieur. Nous sommes des types qui cherchent à survivre; pas eux. Deuxièmement, pendant les trois derniers jours, on a pu s'échapper, seulement par la pensée, bien sûr. Mais c'était quand même s'échapper. Et ça, grâce à l'Incroyable Hulk. Alors colle-toi ça dans le cul et assieds-toi dessus ! »

Le dimanche , avant le lever du soleil, il m'arracha d'un profond sommeil. « Amène-toi, gamin Grouille-toi de t'habiller. On s'en va. »
Ça faisait deux semaines qu'il me promettait une balade en voiture dans un endroit exceptionnel. Mais je ne le croyais pas. Je me disais qu'il me racontait des craques. Or là, j'y étais, serré dans sa petite voiture, déjà pleine de trois de ses potes.
C'était génial. Je me fichais de l'endroit où on allait, ou de l'exiguïté de l'habitacle qui m'empêchait de respirer : le seul fait d'être en voiture, c'était déjà le paradis.
Quand on est enfin arrivés à destination, il a dit : « Dehors, gamin. On y est.
_ Comment s'appelle cet endroit ? » j'ai demandé, des fourmis plein mes jambes flageolantes.
Il a rigolé. « Derry. On va rejoindre la manif pour les droits civiques. »