Citations sur Le Marin rejeté par la mer (52)
La sirène du Rakuyo retentit dans un dernier adieu secouant le port tout entier, se répercutant dans toutes les fenêtres de la ville, assaillant les cuisines où l’on préparait le dîner, les chambres d’hôtel borgnes dont les draps n’étaient jamais changés, les pupitres attendant le retour des enfants à la maison, les courts de tennis et les cimetières, plongeant tout dans un moment de malaise, déchirant sans pitié le cœur de ceux qui n’en pouvaient mais.
Pour un homme constamment enfermé dans un bateau d'acier, la mer qui l'entoure ressemble trop à une femme. Cela est évident quand on connaît ses accalmies et ses tempêtes, ses caprices ou la beauté de sa poitrine reflétant le soleil couchant.
Depuis la plus haute antiquité les femmes ont répété des paroles d’acceptation résignée du pouvoir de la ligne d’horizon, de vénération aveugle pour cette ligne azurée, des paroles prononcées aussi bien par des femmes à l’orgueil le plus élevé que par les prostituées dans leurs moments de tristesse, d’espérance vaine, d’aspiration à la liberté et qui s’expriment par ces mots : « Tu me quitteras déjà demain ».
Il ne pleurait jamais, même en rêve, car la dureté du coeur était chez lui un point d'orgueil.
Charges relevées contre Tsukazaki Ryûji :
1° m'avoir souri d'une manière servile quand il m'a rencontré cet après-midi.
2° Avoir porté une chemise trempée et expliqué qu'il s'était douché à la fontaine d'eau potable du parc, juste comme un clochard.
3° Avoir décidé arbitrairement de passer la nuit avec ma mère hors d'ici, me plaçant ainsi dans un isolement terrible.
La réaction de Yoriko devant un livre d'autographes donnait toujours une bonne indication sur son humeur. La désinvolture voisine de l'ivresse avec laquelle elle signa son nom était telle que l'on pensait qu'elle serait allée jusqu'à donner l'un de ses seins si on le lui avait demandé.
Ses seuls souvenirs de la vie à terre étaient ceux de la pauvreté, de la maladie et de la mort ainsi que d'une dévastation infinie. En se faisant marin, il se détachait de la terre à jamais.
Les pères !... Parlons-en. Des êtres à vomir ! Ils sont le mal en personne. Ils sont chargés de tout ce qu'il y a de laid dans l'humanité. Il n'existe pas de père correct. C'est parce que le rôle des pères est mauvais. Les pères stricts, les pères doux, les pères modérés, sont tout aussi mauvais les uns que les autres. Ils nous barrent la route dans l'existence en se déchargeant sur nous de leurs complexes d'infériorité, de leurs aspirations non réalisées, de leurs ressentiments, de leurs idéaux, de leurs faiblesses qu'ils n'ont jamais avouées à personne, de leurs fautes, de leurs rêves suaves et des maximes auxquelles ils n'ont jamais eu le courage de se conformer ; ceux qui sont les plus indifférents, comme mon père, ne font pas exception à la règle. Leur conscience les blesse parce qu'ils ne font jamais attention à leurs enfants et finalement ils voudraient que les enfants les comprennent.
Tout en répétant : "N'avez-vous pas froid?", Ryûji ne cessait de s'interroger lui-même : "Vas-tu vraiment abandonner? Le sentiment de l'océan, la sombre ivresse qu'entraîne le roulis incessant, le pathétique des adieux? Les douces larmes que te faisait verser ta chanson favorite! Vas-tu abandonner la situation qui t'a détaché du monde, qui t'a porté aux plus hauts sommets que peut atteindre l'homme que tu es? La nostalgie de la mort qui se cache dans ta poitrine brûlante. La gloire qui est là-bas; la mort qui est là-bas? De toute manière cela a toujours été là-bas, incontestablement là-bas. Vas-tu abandonner tout cela?"
Le coeur torturé par son combat incessant avec la houle sombre, avec la lumière sublime tombant du bord des nuages, arrêté dans des élans mais repartant audacieusement, incapable de faire une distinction entre les sentiments nobles et les sentiments vils, il mettait sur le compte de la mer ses mérites et ses défauts. "Vas-tu abandonner cette liberté lumineuse?"
Au cours de son voyage de retour, Ryûji avait découvert qu'il avait le dégoût des misères de la vie de marin, et de l'ennui qu'il ressentait. Il avait la conviction qu'il avait tâté de tout, et qu'il ne lui restait plus rien à goûter. Il n'y avait qu'à regarder. Il n'y avait plus de gloire à glaner nulle part au monde. Pas dans l'hémisphère Sud. Même pas sous cette étoile dont rêvent les marins, la Croix du Sud!
Les pères!... Parlons-en. Des êtres à vomir ! Ils sont le mal en personne. Ils sont chargés de tout ce qu'il y a de laid dans l'humanité. Il n'existe pas de père correct. C'est parce que le rôle des pères est mauvais. Les pères stricts, les pères doux,les pères modérés, sont tout aussi mauvais les uns que les autres. Ils nous barrent la route dans l'existence en se déchargeant sur nous de leurs complexes d'infériorité, de leurs aspirations non réalisées, de leurs ressentiments, de leurs idéaux, de leurs faiblesses qu'ils n'ont jamais avouées à personne, de leurs fautes, de leurs rêves suaves et des maximes auxquelles ils n'ont jamais eu le courage de se conformer ; ceux qui sont les plus indifférents, comme mon père, ne font pas exception à la règle. Leur conscience les blesse parce qu'ils ne font jamais attention à leurs enfants et finalement ils voudraient que les enfants les comprennent.