Une déception malgré de beaux moments et deux personnages très réussis.
Publié en 2008, en 2010 en français, ce onzième roman de
Rosa Montero, immensément populaire en Espagne, alors même que son douzième, "
Des larmes sous la pluie", qui arrive en France en ce début 2013, s'annonce comme une très belle oeuvre, d'après mon collègue Charybde 3, m'a quelque peu déçu.
Dans un Madrid contemporain, servant de toile de fond plutôt discrète (en dehors du Cachito, "l'un des bordels les plus connus des environs de la ville" et du Poblado, réputé "le quartier le plus dangereux" de l'agglomération, les fils de quatre existences vont s'entremêler au hasard des coïncidences ou du destin. Chauffeur de taxi mis psychologiquement à terre par le cancer qui vient d'emporter sa femme adorée, médecin urgentiste médiocre, désabusé, perpétuellement insatisfait et velléitaire, qui tente de s'inventer un ersatz d'existence sur le site Second Life, vieille scientifique brillantissime mais déchue depuis longtemps par un scandale qui ne pouvait en être un que sous la chape de plomb bigote du franquisme triomphant de sa jeunesse, jeune prostituée sierraléonaise, rescapée des exactions des guerres du diamant, murée dans le tunnel sans avenir imposé par le proxénète Draco, propriétaire du Cachito, tandis que rôde l'ombre d'un tueur en série, l' "assassin du bonheur", qui tue des vieillards dans les maisons de retraite en leur laissant sur le visage un sourire forcé...
Malgré de très beaux moments et plusieurs personnages authentiquement attachants et pleins d'une étrange poésie (le chauffeur de taxi et la scientifique, tout particulièrement), le roman s'épuise dans une construction par trop bancale, noyant trop vite l'intérêt porté par le lecteur aux protagonistes, se fatigue dans une narration excessivement "téléphonée" dont les péripéties pourtant annoncées comme telles sont terriblement prévisibles, et se perd dans plusieurs digressions pseudo-scientifiques qui, bien qu'intéressantes, apparaissent nettement comme d'involontaires parenthèses bavardes...
De véritables défauts gâchant donc un plaisir au départ tout à fait possible, qu'il me hâte d'oublier grâce à de meilleurs romans de l'auteur, notamment "
Des larmes sous la pluie".