Je regardai autour de moi la campagne déjà un peu dépouillée et languissante qui s'offrait tout entière dans ses couleurs les plus estompées et ses détails les plus infimes par cette lumière si juste, si différente de l'éblouissement dévorant de l'été.
Un grondement lointain comme celui d'un train roulant parmi les cultures courait à travers la campagne endormie et en confirmait l'immensité et le silence.
A l'horizon, la terre se détachait du ciel serein par une ligne de montagnes noires.
La plaine entière s'étendait à perte de vue dans la nuit transparente, et parmi le pullulement d'ombres la lune révélait et illuminait un à un les arbres en files, les haies, les espaces vides des champs, les vignes.
Toute passion se dissout en moi par l'acide de la réflexion; manière comme une autre de la dominer et d'en détruire à la fois l'empire et la souffrance.
Le soleil faisait briller ses cheveux blonds défaits, partagés en deux longues vagues qui encadraient son visage; derrière sa tête penchée et non moins lumineux qu'elle, je voyais à travers les fenêtres ouvertes les arbres du parc et le ciel bleu.
Rien ne peut être plus difficile que la Toscane.
Et en effet l'hypocrisie, allant droit à son but sans gêne ni remords, est plus à même d'éviter les irrégularités, les défauts, les rigueurs de la vérité que ne l'est le scrupule attaché à la matière sur laquelle il s'exerce.
Tout en mangeant, je riais, plaisantais, je faisais même de l'esprit, ce qui chez moi, d'ordinaire sérieux et méditatif, semblait un trait inaccoutumé.
Je me sentais une lucidité d'esprit incomparable comme si dans ma tête, au lieu du grouillement lourd et confus de mes réflexions habituelles et contradictoires, il y avait un mécanisme net et exact, absolument au point, comme celui d'une balance ou d'une horloge. (p.144)