Voici une nouvelle approche de l'oeuvre de
Proust, écrite par une spécialiste, professeure à l'Université de Californie, à Los Angeles, et de surcroît, Princesse Murat ! « C'est original comme prénom » lui dit, sérieusement, un notaire. Elle acquiesce !
Pourtant c'est une vraie de vraie princesse, comme celle au petit pois, descendante de la noblesse, la vraie, celle de l'Ancien Régime, et croisée avec celle de l'Empire. Mais elle ne rêve que d'une chose : échapper à son milieu, aux conventions étroites, aux apparences hypocrites de « ce monde de formes vides ». A vingt ans, elle rompt définitivement avec sa famille et l'aristocratie, afin de vivre pleinement et ouvertement son homosexualité, et de se livrer à la littérature.
Les personnages de la Recherche lui sont familiers, littéralement, leur généalogie se mêlant à la sienne propre.
Proust, « ce petit journaliste » a mangé à la table de sa grand-mère, tout au bout ! Et si son oeuvre est connue et citée dans sa famille, combien l'ont lue, mis à part son père ? Celui-ci est d'ailleurs le seul à trouver grâce à ses yeux, en raison de sa candeur d'un autre siècle et de son amour des lettres. Sa mère, par contre, enfermée dans sa morgue, ne songeant qu'aux apparences, paraît dénuée d'humanité. Elle rejette sa « fille perdue » sans jamais lui témoigner la moindre tendresse, même dans son enfance. Quand elle présentait ses enfants, elle disait des deux aînées « Voici mes filles », du benjamin, « Voici mon fils », et de Laure, « Ça, c'est le numéro trois » !
Quand elle s'attaque à la lecture de
Proust, à l'âge de vingt ans, Laure prend vraiment conscience de l'inanité de son milieu social. Monde superficiel, vaniteux qu'elle connaît d'expérience mais que
Proust lui révèle par mille anecdotes. Elle est décillée, et, non seulement elle comprend enfin la réalité du monde dans lequel elle a vécu « un exil intérieur », mais elle découvre aussi « le pouvoir d'émancipation de la littérature ». Et voilà que par son écriture claire et incisive, elle partage une analyse fine et passionnante de l'oeuvre…même si elle craint d'ajouter encore de la glose.
La Recherche comporte peut-être « trop de duchesses » comme l'a proclamé Gallimard à l'époque en refusant le premier manuscrit, mais il y manquait une princesse pour nous ouvrir de nouvelles portes !