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sur 384 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
« 1904, c'est l'année où Proust commence à fréquenter l'hôtel Murat, propriété de mon arrière-grand-mère, Cécile Ney d'Elchingen (1867-1960), mariée à 16 ans au prince Murat » écrit Laure Murat.

Proust a dépeint et éclairé le fonctionnement de l'aristocratie avec des mots si justes, qu'à la lecture de la Recherche, « ce fut un choc » pour l'autrice.
Elle trouva là le décryptage - et donc une véritable compréhension - du monde de son enfance. « La fiction et la réalité, le roman et l'histoire, la littérature et la vie » se retrouvaient soudain mêlés. Proust lui permettait de « relire le réel sous un autre jour. »

Ainsi, en s'appuyant sur une lecture « socialement orientée » de l'oeuvre de Proust, Laure Murat, historienne et professeure de littérature, nous livre sa vision de l'aristocratie, « monde de pures formes », polarisé sur son « art de vivre ». Et c'est précisément ce que j'ai aimé.

Par ailleurs, Laure Murat, éprouva un « deuxième bouleversement, aussi déterminant », en rencontrant avec Proust, le premier écrivain qui prenait « l'homosexualité au sérieux ». de quoi, consoler l'autrice du « Tu incarnes à mes yeux l'échec de toute une éducation morale et spirituelle » lancé par sa mère, lorsqu'elle lui annonça qu'elle vivait avec une femme.

Alors oui, peut-être, par manque de références proustiennes, ai-je raté quelques passages mais « Proust, roman familial » ne nécessite pas d'avoir lu Proust. Il donnerait plutôt envie de le lire, tant il est éclairant et son écriture, fluide.
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Famille de fiction.

Laure Murat entretient un rapport particulier avec A la recherche du temps perdu. L'oeuvre de Proust mentionne ses arrières-grands-parents, et plus généralement parle du milieu d'origine de l'autrice, l'aristocratie.

Je ne suis qu'au début de mon cheminement dans A la recherche du temps perdu, mais cet essai a été un véritable plaisir à lire. Laure Murat parle de Marcel Proust, mais aussi et surtout de son milieu d'origine, l'aristocratie. Issue de la noblesse d'Empire par son père et de la noblesse d'Ancien Régime par sa mère, l'auteure compare le mode de vie de sa famille aujourd'hui, avec les observations de Proust au début du XXème siècle. Laure Murat en arrive au même postulat que Proust : ça brille mais ça sonne creux.

En effet, vue de l'extérieur l'aristocratie a quelque chose de fascinant. Les bonnes manières, les beaux atours, le Tout-Paris font rêver. Laure Murat montre l'envers du décor. Les dorures ne sont qu'un leurre, l'aristocratie ne vit que par et pour les apparences. Se cultiver ? Une perte de temps. Faire des études ? C'est bon pour les roturiers qui doivent travailler. La désillusion de Proust vis à vis de ce milieu transparaît à travers le narrateur de la recherche. La courtoisie des aristocrates fait ressentir un sentiment d'infériorité aux roturiers qui tentent d'approcher ce milieu.
Cela n'est pas un hasard. Les nobles sont l'incarnation de l'entre-soi. Il est quasiment impossible d'intégrer ce monde.

En parallèle, Laure Murat montre son enfance et son adolescence dans ce milieu étouffant. En tant que femme elle n'est que quantité négligeable. Elle ne peut pas hériter et transmettre le nom de la lignée. La lecture de Proust lui a permis d'ouvrir les yeux et de s'émanciper de son milieu. Il lui faudra assumer son identité sexuelle et partir à Los Angeles pour enfin commencer à vivre.

Bref, cet essai est non seulement une grille de lecture de Proust, mais aussi un témoignage sur l'aristocratie française.

Lu dans le cadre du Grand Prix des Lectrices de ELLE 2024.
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je ne trouve pas les mots adéquats pour décrire mon enthousiasme pour ce livre qui est qualifié d'essai et qui vaut tous les livres d'autofiction que j'ai pu lire ces derniers temps.

Laure Murat descend d'une lignée de princes de l'empire par son père et d'une noblesse de l'ancien régime par sa mère, Ines d'Albert de Luynes. Elle est rejetée de la famille, surtout de sa mère, quand elle avoue son homosexualité. Un jour en regardant « Downtown Abbey » elle a une révélation, elle comprend que sa famille est construite sur une apparences et qu'il ne faut jamais montrer les efforts (les siens ou ceux des domestiques) qu'il faut faire pour tenir son rang. le naturel ? c'est ce qui demande le plus d'efforts quand il ne doit être ni une expression de ses sentiments, ni une affirmation de sa personnalité. La plongée dans sa famille, lui fait mesurer à quel point seules les apparences sont importantes, il faut tenir son rang et ne jamais se comporter « comme une domestique ! » . Toutes les déviances n'ont aucune importances si elles sont cachées, et en recherchant l'histoire de sa famille Laure se rend compte que sa grand-mère maternelle doit être en réalité une enfant que son arrière grand-père a fait à une nièce. Mais inutile de chercher à savoir ce qui ne sera jamais mis au grand jour.

L'autre révélation de Laure Murat, elle se trouve dans l'oeuvre de Marcel Proust, d'abord parce que nombre de ses ancêtres ont servi de modèle aux aristocrates décrits par Proust. Je pensais avant de lire ce livre que c'était surtout de cela qu'elle allait nous parler, et je n'étais pas très tentée par cette lecture, j'y voyais une sorte de Bottin mondain. Mais c'est tout le contraire, elle reconnaît à cet auteur le fait qu'il a su décrire le vide de ces personnalités qui à force de ne vouloir que paraître ne sont le plus souvent que des coquilles vides. Elle est mieux placé que quiconque pour faire un sort à celui que l'on méprise parfois pour être un auteur « mondain ! » alors que justement il a su montrer qu'il n'y avait pas grand chose derrière ces façades de « bons goûts ». Ensuite, elle était bien placée pour comprendre comment Proust décrit l'homosexualité et elle retrouve encore une fois le poids du jugement de sa propre famille : ça ne se dit pas ! même si tout le monde sait que ça se fait, bien sûr. Elle enseigne aux États-Unis, dans une université californienne et elle fait découvrir Proust à des étudiants qui vivent à l'heure des textos et sous le soleil de la plage. Si loin leur semblent-ils de ce monde du début du XX° siècle français. Mais je suis certaine qu'elle sait leur montrer qu'il suffit de rentre dans cette oeuvre pour s'y retrouver, car il s'agit bien encore une fois d'un auteur qui décrit « l'humaine condition »

Vous retrouverez dans son livre des extraits de la Recherche, toujours parfaitement choisis : vous n'oublierez l'attitude de la Duchesse de Guermantes lorsque son ami Swann vient de lui annoncer que, s'il ne vient pas à Florence avec elle, c'est qu'il ne lui reste que quelques semaines à vivre, elle lui dit de venir dîner un soir parce que là elle n'a n'a pas le temps de lui parler mais, le temps, elle le prend pour remonter changer de chaussures que son mari trouve inapproprié avec la robe qu'elle a choisie ! ! ! (j'ai recopié ce passage dans les extraits)

On lui doit donc beaucoup à cette écrivaine, d'abord de partager avec nous sa passion pour Proust et ensuite de démystifier l'aristocratie française. Je doute que celle des autres pays soit très différente ! Mais en France, il y a eu la révolution, mais cela n'empêche pas les nobles d'aujourd'hui de se parer des titres de prince/princesse, duc/duchesse …..
Lien : https://luocine.fr/?p=17511
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Un livre touchant, qui nous retrace sa vie à travers les romans de Proust. Proust un classique pourtant peu lu de par sa longueur va en toucher plus d'un dans ce récit. Moi la première, ce livre m'a conquis et je n'attends plus que lire les livres de Proust. Un récit personnel mais captivant qui va nous ouvrir les portes de la pensée aristocratique. Ce qui rend ce livre aussi très intéressant c'est la diversité des sujets qu'il aborde. Un magnifique travail !!
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Une jeune femme étouffe dans son milieu; les rituels de l'aristocratie: ne pas montrer ses sentiments, mépriser ceux qu'on juge inférieurs...être hétérosexuel!
Elle fuit à 19 ans et l'étude de la Recherche va l'aider à mettre à distance cette classe sociale dans laquelle elle était immergée.
Une lecture intéressante de Proust et un regard "sociologique" sur les aristocrates.
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L'aristocratie, le “pouvoir des meilleurs”. Laure Murat est née dans une famille de ce milieu, une famille issue des grands de France, plus très riches, mais qui font comme s'ils l'étaient. À vrai dire, ils font comme si pour tout. Rien n'est dit, rien n'est montré. Sa famille, surtout sa mère, la rejette quand elle dit qu'elle est homosexuelle. de l'autre côté de l'océan, elle raconte sa rencontre avec Proust, qui déconstruit dans sa Recherche, au fil de 3000 pages (selon les versions), cette aristocratie qu'il ne regarde ni d'en haut ni de loin, mais avec un oeil bien à lui. Dans cet essai, Laure Murat entremêle et analyse sa vie et la vie présentée dans les romans de Proust, telle qu'elle l'a vécue enfant, sans savoir qui existe vraiment et qui est un personnage de la Recherche. C'est un essai magnifique, sans apitoiement et qui éclaire avec finesse l'oeuvre de Proust… que je sens que je vais bientôt lire. Magnifique.
Lien : https://redheadwithabrain.ch..
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Nous sommes si nombreuses.x à nous retrouver dans ce portrait qu'il faudrait autant de pages que dans la Recherche pour énumérer nos noms...
C'est la première fois que je lis quelque chose d'aussi frontal sur l'aristocratie, nul besoin de révolution, ni de couper des têtes, les mots suffisent et ô combien quand ils sont alliés au talent...
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Laure Murat ne serait donc qu'une énième parmi d'autres à s'atteler à la tâche. À cela près que son approche de la lecture du grand oeuvre de Proust passe par sa singularité de femme dont l'orientation sexuelle l'a exclue de son milieu, et le lui a fait comprendre. Un cheminement qu'elle nous explique avec un talent susceptible de donner envie à quiconque de lire ou relire Proust. Car finalement n'est-ce pas ce que nous espérons tous, qui nous enchante, nous émeut, nous console, nous grandit, donne un sens à notre vie de mortel lorsque nous le découvrons au détour d'une lecture ? Trouver la réponse à nos interrogations, sur nous-mêmes, sur notre environnement familial et affectif, sur notre rapport aux autres et au monde.

« Proust se doutait-il seulement qu'en échafaudant son roman il inventait un secours plus puissant que la tendresse d'une mère absente ? Que son oeuvre, en proposant un exercice continu de dessillement, y compris en soi-même, livrerait une grille de compréhension et de déchiffrement du monde à la fois souveraine et dynamique, subtile et pénétrante, pour des millions de gens dans le monde ? Que tout un chacun sortirait étonnamment augmenté de cette lecture, tant il est vrai qu'une « erreur dissipée nous donne un sens de plus » ? Proust n'endort pas nos douleurs dans les volutes de sa prose, il excite sans cesse notre désir de savoir, cette libido sciendi qui, en séparant l'enfant de sa mère, nous affranchit plus sûrement du malheur que tous les mots de la compassion. »
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Voici une nouvelle approche de l'oeuvre de Proust, écrite par une spécialiste, professeure à l'Université de Californie, à Los Angeles, et de surcroît, Princesse Murat ! « C'est original comme prénom » lui dit, sérieusement, un notaire. Elle acquiesce !

Pourtant c'est une vraie de vraie princesse, comme celle au petit pois, descendante de la noblesse, la vraie, celle de l'Ancien Régime, et croisée avec celle de l'Empire. Mais elle ne rêve que d'une chose : échapper à son milieu, aux conventions étroites, aux apparences hypocrites de « ce monde de formes vides ». A vingt ans, elle rompt définitivement avec sa famille et l'aristocratie, afin de vivre pleinement et ouvertement son homosexualité, et de se livrer à la littérature.

Les personnages de la Recherche lui sont familiers, littéralement, leur généalogie se mêlant à la sienne propre. Proust, « ce petit journaliste » a mangé à la table de sa grand-mère, tout au bout ! Et si son oeuvre est connue et citée dans sa famille, combien l'ont lue, mis à part son père ? Celui-ci est d'ailleurs le seul à trouver grâce à ses yeux, en raison de sa candeur d'un autre siècle et de son amour des lettres. Sa mère, par contre, enfermée dans sa morgue, ne songeant qu'aux apparences, paraît dénuée d'humanité. Elle rejette sa « fille perdue » sans jamais lui témoigner la moindre tendresse, même dans son enfance. Quand elle présentait ses enfants, elle disait des deux aînées « Voici mes filles », du benjamin, « Voici mon fils », et de Laure, « Ça, c'est le numéro trois » !

Quand elle s'attaque à la lecture de Proust, à l'âge de vingt ans, Laure prend vraiment conscience de l'inanité de son milieu social. Monde superficiel, vaniteux qu'elle connaît d'expérience mais que Proust lui révèle par mille anecdotes. Elle est décillée, et, non seulement elle comprend enfin la réalité du monde dans lequel elle a vécu « un exil intérieur », mais elle découvre aussi « le pouvoir d'émancipation de la littérature ». Et voilà que par son écriture claire et incisive, elle partage une analyse fine et passionnante de l'oeuvre…même si elle craint d'ajouter encore de la glose.

La Recherche comporte peut-être « trop de duchesses » comme l'a proclamé Gallimard à l'époque en refusant le premier manuscrit, mais il y manquait une princesse pour nous ouvrir de nouvelles portes !
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Laure Murat est issue d'une grande famille de France. Noblesse, ascendance prestigieuse, châteaux et domaines, aristocratie… un monde où paraître est primordial, les codes omniprésents et intangibles et où la forme l'emporte sur le fond. Une famille que Proust, fréquentait et dont nombre de représentants servirent de modèles pour les personnages de ses romans.

Laure Murat est également ouvertement homosexuelle et cela lui valut le bannissement familial.

Dans cet impressionnant essai biographique, elle parle d'elle, de sa famille et de Proust. Et ce petit journaliste du bout de la table sert ici de révélateur. A l'instar d'un bain photographique qui dévoile les ombres et la lumière, la recherche éclaire les propos de Laure Murat sur ce monde vide.

Un livre émouvant, drôle, accessible et érudit, éloquent et engagé. le livre marquant de 2023 !
Lien : https://www.noid.ch/proust-r..
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