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sur 366 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
« À chaque lecture, Proust a modifié ma compréhension du monde. Par les circonvolutions envoûtantes de ses phrases il m'a sortie de l'ignorance et de la confusion. Sa précision, sa lucidité, sa tendresse, sa grandeur comique m'ont épargné des années de mécompréhensions et d'atermoiements stériles. C'est pourquoi il m'a, chaque fois, consolée. »

Il me semble que l'ambition et l'humilité de l'autrice, son infinie reconnaissance à l'égard d'une oeuvre qui la suit partout depuis trente ans, sont tout entières contenues dans ces quelques lignes. Et c'est, à mes yeux, ce qui fait la force, la grandeur, la beauté de son livre. Un livre qui, bien qu'étayé par des milliers d'heures de lecture et de recherches, n'est pas un énième ouvrage savant prétendant apporter un éclairage érudit ou inédit sur une oeuvre qui donne lieu depuis sa parution à une glose exponentielle. Non, c'est un livre qui, partant du coeur tout en s'appuyant constamment sur l'exercice de la raison, nous donne à voir un condensé saisissant du dialogue fécond, salvateur, indéfiniment enrichi au fil du temps, qu'entretient Laure Murat avec Proust.
Issue d'un milieu, l'aristocratie, dans lequel l'implicite, le non-dit, la retenue, voire le refoulement, sont érigés en règle de vie, où l'expression des sentiments est perçue comme une faute de goût, où tout élan sensible, jusqu'aux plus intimes tragédies comme la perte d'un être cher, est converti en exercice de style, Laure Murat est parvenue à clarifier grâce à Proust ce qu'elle percevait confusément, douloureusement depuis l'enfance :
« Mon ambivalence vis-à-vis de l'aristocratie trouvait sa résolution : sensible, à l'occasion, à son sens du panache, mais aussi aux délicatesses morales de la grande politesse, je ressentais, dans le temps, un profond désarroi et même une angoisse face à son discours creux et sa complaisance passionnée pour le mensonge social. »

L'exercice de démystification méthodique de l'aristocratie auquel se livre Proust qui, après l'avoir élevée au firmament de l'esprit et de l'élégance, après avoir érigé ses membres au rang de Dieux de l'Olympe, les précipite plus bas que terre, les renvoyant à leur vacuité abyssale, n'offre pas seulement à Laure Murat une clarification salutaire, il lui en dévoile les ressorts intimes, l'irrésistible mécanique interne :
« Mais le plus sidérant, c'était que toutes les scènes lues où l'aristocratie entrait en jeu étaient infiniment plus vivantes que les scènes vécues dont j'avais été le témoin, comme si Proust, à l'image du Dr Frankenstein, élaborait sous mes yeux le mode d'emploi des créatures que nous étions. »

À partir de là s'enclenche le processus libérateur qui, en lui permettant d'identifier ce qui relève, en elle, de l'aliénation sociale et familiale, l'autorise du même coup à s'émanciper et à affirmer sa singularité. Mais dans un milieu dont l'idéologie conservatrice sacralise l'immuabilité et vitupère le changement, un milieu dans lequel il convient de tenir son rôle, l'émancipation n'est pas de mise, surtout quand celle-ci passe par l'énonciation explicite d'une homosexualité honnie. « Fille perdue » pour sa mère, subissant l'opprobre de sa nombreuse famille, il ne lui reste pas d'autre choix « que de commencer une nouvelle vie, dont l'horizon irait chaque jour s'élargissant. »

On comprend mieux, à présent, le sens de la phrase que je citais en introduction : « C'est pourquoi il m'a, chaque fois, consolée. » Mais Laure Murat ne s'arrête pas à son cas particulier. Elle élargit la focale à tous ceux pour lesquels, à travers le monde entier, « Proust, mieux qu'aucun autre écrivain, a si souvent incarné à la fois une bouée et un phare dans la tragédie. » Car « nous sommes tous et toutes inconsolables ». Chacun d'entre nous, dont la venue au monde, après nous avoir arrachés au refuge du ventre maternel, nous voue à jamais à la solitude et à l'angoisse de la mort, ressent le besoin inassouvissable d'être consolé. À commencer par le narrateur de la Recherche qui, soir après soir à Combray, attend anxieusement le précieux viatique qui ouvrira toutes grandes les portes du sommeil et du rêve, en l'absence duquel il n'y aura pas de repos possible, le baiser maternel :
« Il y a bien longtemps aussi que mon père a cessé de pouvoir dire à maman : « Va avec le petit. » La possibilité de telles heures ne renaîtra jamais pour moi. Mais depuis peu de temps, je recommence à très bien percevoir si je prête l'oreille, les sanglots que j'eus la force de contenir devant mon père et qui n'éclatèrent que quand je me retrouvai seul avec maman. En réalité ils n'ont jamais cessé. »
(Du côté de chez Swann)

Ce constat tragique, Proust en fait non pas l'objet d'une plainte complaisante, mais le coeur d'une recherche, transmuant le plomb en or, transformant une catastrophe en oeuvre d'art. Nous savons qu'il s'est véritablement attelé à l'écriture de la Recherche en 1906, un an après la mort de sa mère. Sa vie ayant désormais, comme il le confie à Robert de Montesquiou, « perdu son seul but, sa seule douceur, son seul amour, sa seule consolation », il ne lui reste plus qu'à se mettre à la tâche tant de fois différée afin d'offrir à sa mère disparue la consolation qu'il ne put lui offrir de son vivant, celle d'accomplir l'oeuvre à laquelle elle le savait secrètement promis.

« Proust se doutait-il seulement qu'en échafaudant son roman il inventait un secours plus puissant que la tendresse d'une mère absente ? (…)
Il n'endort pas nos douleurs dans les volutes de sa prose, il excite sans cesse notre désir de savoir qui, en séparant l'enfant de sa mère, nous affranchit plus sûrement du malheur que tous les mots de la compassion.
À ce titre, il ne serait pas exagéré de dire que Proust m'a sauvée. »

Un merci particulièrement reconnaissant à Hélène (@4bis) qui, la première, a attiré mon attention sur ce livre.

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J'avais envie de découvrir ce roman depuis un moment , ayant obtenu le prix Médicis, cela m'avait un peu refroidi, un récit philosophique , qui était, est et restera un monde littéraire loin de ma zone de confort. Je me suis laissée envoûter par ce récit. L'auteure nous entraîne dans un monde hors norme, elle nous immerge , dans le personnage de Proust, et retrouve une part de sa vie, issu d'une famille d'aristocrate très connu,deux familles rivales la famille Marat,et celle des Luynes, au 19 éme siècle. Elle se retrouve dans le personnage de Proust, particulièrement dans son oeuvre " La recherche du temps perdu" . Elle a vécu dans ce milieu où Proust tenait un rôle majeur. Un personnage qui a compté énormément, pour elle , tout le court de sa vie. Cette "Recherche" cette "Quête", et pour elle une sorte d'exécutoire, elle se dévoile sans fioriture . Au fil de ses recherches , elle découvre la véritable face du personnage . L'auteure fait une analyse très pointue, avec beaucoup de délicatesse, de passion, de recherches richement documentées et nous livre un essai magistral. Elle se retrouve reniée par sa mère, lorsqu'elle apprend son homosexualité, représentant une déchéance de son éducation, elle devient une paria une petite pointe d'humour, lorsque son père , grand aristocrate prend pour la première fois un bus, ce dernier parle au chauffeur comme s'il prenait un taxi. L'auteure met en avant ce milieu aristocratique, totalement répugnant, cruel, à ses yeux Ayant lu " A la recherche du temps perdu" m'a facilité la lecture, car cet essai est assez complexe à lire, il faut rester concentré. Contrairement à mes à priori du début , je suis laissée transporter dans ce récit enrichissant , L'auteure use d'un vocabulaire puissant, utilise les bons mots, elle les place là, où il faut, quand il le faut, un petit coté qui donne du piment à la lecture. Un roman, autobiographique, un témoignage poignant un essai philosophique, que je vous recommande."Proust l'a sauvé"
Il faut toujours essayer, en tout cas pour ma part, découvrir d'autres horizons littéraires , Je viens de le faire et j'ai été conquise.
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Aristocratie code

Proust l'a sauvée. Grâce à la fiction il su faire éclater la réalité. Celle de Laure Murat.
Bannie de ce monde aristocratique par sa propre mère pour qui elle représentait l'échec de toute une éducation spirituelle et morale, Laure Murat a une révélation vers l'âge de vingt ans. La lecture de la Recherche lui a permis de mener à bien sa propre quête et pouvoir enfin s'émanciper d'un monde rongé par l'incompréhension.
Un monde hermétique, où règnent l'implicite et le paraître et intransigeant avec ceux qui s'écartent des normes sociales et sexuelles.
Marcel Proust, ce "petit journaliste que l'on plaçait en bout de table" lorsqu'il était invité aux fastes de l'hôtel Murat a beaucoup observé et beaucoup noté. Laure Murat a ainsi pu trouver les clefs de ce monde énigmatique et vide de sens en se positionnant comme une lectrice de sa propre vie.

A la fois récit autobiographique, essai littéraire et historique, ce texte nous ouvre les portes capitonnées du monde de l'aristocratie et nous permet d'envisager la lecture de l'oeuvre d'un écrivain qui impressionne sous un angle nouveau. Mais par dessus tout, il constitue un véritable plaidoyer sur le pouvoir de consolation de la littérature.

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Laure Murat ne serait donc qu'une énième parmi d'autres à s'atteler à la tâche. À cela près que son approche de la lecture du grand oeuvre de Proust passe par sa singularité de femme dont l'orientation sexuelle l'a exclue de son milieu, et le lui a fait comprendre. Un cheminement qu'elle nous explique avec un talent susceptible de donner envie à quiconque de lire ou relire Proust. Car finalement n'est-ce pas ce que nous espérons tous, qui nous enchante, nous émeut, nous console, nous grandit, donne un sens à notre vie de mortel lorsque nous le découvrons au détour d'une lecture ? Trouver la réponse à nos interrogations, sur nous-mêmes, sur notre environnement familial et affectif, sur notre rapport aux autres et au monde.

« Proust se doutait-il seulement qu'en échafaudant son roman il inventait un secours plus puissant que la tendresse d'une mère absente ? Que son oeuvre, en proposant un exercice continu de dessillement, y compris en soi-même, livrerait une grille de compréhension et de déchiffrement du monde à la fois souveraine et dynamique, subtile et pénétrante, pour des millions de gens dans le monde ? Que tout un chacun sortirait étonnamment augmenté de cette lecture, tant il est vrai qu'une « erreur dissipée nous donne un sens de plus » ? Proust n'endort pas nos douleurs dans les volutes de sa prose, il excite sans cesse notre désir de savoir, cette libido sciendi qui, en séparant l'enfant de sa mère, nous affranchit plus sûrement du malheur que tous les mots de la compassion. »
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Après sa floraison parme, avez-vous déjà observé les graines du cyclamen ? Resserrées dans des petits sacs comme des bourses fichées au terme d'une tige dont les ressorts assureront la projection, elles seront capables de prospérer bien plus loin que le plant qui les aura portées. Mais pour que cette expédition vers un ailleurs propice ait lieu, il faudra la complicité d'un soleil accommodant, d'un sous-bois humide, le temps de quelques saisons favorables, et auparavant, la formidable diligence d'une pousse qui sait d'elle-même comment donner à son essor les sinuosités nécessaires à la diffusion de ses rejetons. L'alliance d'une conjoncture et d'un héritage.

C'est le cyclamen et son mode d'exploration qui me viennent en tête pour décrire ce qui m'arrive avec la lecture de Proust. Ce même potentiel de démultiplication du sens et cette même conspiration explosive de mon environnement pour que je sois projetée vers l'ailleurs.

En revenant à la Recherche, je savais bien que je n'en serais pas quitte aisément. J'espérais d'ailleurs le contraire : en être l'enchantée prisonnière… mais ne ressassons pas ce premier désappointement ! Concentrons-nous plutôt sur les réflexions que m'ont valu cette lecture et les échos qu'elle continue de diffuser en moi. Comme s'il était impossible de rester seulement déçue et que si La Recherche et moi avions un problème, l'ensemble des torts ne reposait pas sur le seul livre. - de quelle honnêteté je fais preuve ! –

Je pensais plaisanter en écrivant que ce serait vous qui m'aideriez à apprécier ma lecture, comme l'entourage du narrateur lui permettra de trouver le sublime aux oeuvres qu'il était désespéré de ne pas apprécier d'abord, mais ça commence à fonctionner vraiment ainsi ! Quel sortilège !

Toujours est-il que non content d'accumuler les remarques visant à me faire réfléchir, les critiques inspirées des copains à propos d'A l'ombre des jeunes filles en fleur, les avis nuancés et avertis d'amis dont j'affectionne particulièrement le regard, l'univers m'aura aussi mis entre les mains ce Proust, roman familial. (En l'espèce, l'univers aura pris les traits d'une amie chère qui, ayant l'occasion de se procurer ce livre, aura immédiatement pensé à me l'offrir, chanceuse inouïe que je suis.)

A la croisée entre l'exploration littéraire, l'autobiographie et l'hommage, Proust, roman familial m'a rappelé, par sa forme Quand tu écouteras cette chanson de Lola Lafon. Il s'agit à chaque fois de faire résonner le parcours singulier de l'autrice avec ce qu'une oeuvre littéraire peut offrir. D'éclairer par une recherche documentaire érudite les liens entre conscience collective et réception particulière.

Laure Murat, par ses ascendants, est la quintessence de l'aristocratie française. Par ses choix de vie, son orientation sexuelle, la manière dont elle se livre, dont elle se nourrit de littérature, elle en est l'antithèse. Et cela s'explique, selon elle… grâce à la Recherche du temps perdu !

Chapitre après chapitre, elle raconte certains souvenirs d'enfance qui ne dépareraient pas dans une reconstitution historique savoureuse, décortique le fonctionnement de l'aristocratie, cet échafaudage qui ne s'appuie sur rien, ce monde où l'apparence, les mots, ont remplacé le réel et le corps. Et elle montre comment Proust en révèle la vacuité, comment il fait en sorte d'introduire le mouvement, de remettre au centre ceux dont étaient tus les moeurs homosexuelles, dynamitant ainsi cet édifice vide fait de postures, rendant à l'individu sa place de sujet, ramenant l'universalité en lieu et place du néant. Ainsi, elle raconte comment sa lecture de la Recherche lui aura permis de franchir « le confort trompeur de l'enceinte infertile » dans lequel elle avait été élevée et d'être réellement vivante. Wahou !

Le décalque entre le monde figé de son enfance et les descriptions piquantes de Proust est confondant. Quand on a d'illustres ancêtres, quand on habite encore dans les lieux qui ont fait L Histoire, qu'on ne fraie qu'avec ceux qui le savent et vivent leur existence à cette aune, il est facile de multiplier les correspondances entre son histoire familiale et les personnages de la Recherche. Fiction et réalité historique, biographique, se mêlent en un imbroglio permettant de questionner le terme de chacune de ces réalités. de laisser la littérature dynamiter L Histoire et de révéler le scandale d'un monde qui n'était que signe vide.

La démonstration est exemplaire mais ce qui m'a plu aussi, c'est, qu'elle va plus loin. Point n'est besoin d'avoir des ancêtres parmi les plus proches de Napoléon ou descendant en droite ligne de Guillaume le Conquérant pour connaître le poids d'un milieu qui assigne. L'histoire particulière de Laure Murat, c'est celle d'Annie Ernaux, qu'elle cite souvent aussi, celle de tous ceux qui auront risqué de périr étouffés sous les codes quels que soient la classe sociale ou les tabous que ce derniers protègent. le mérite de la littérature, et de Proust qui est celui qui le fait le mieux aux dires de Laure Murat, n'est pas seulement celui de la description efficace ou de l'évasion, il est celui d'une mise à distance, d'une déconstruction efficace. Celui du dessillement qui permet ensuite la consolation, cette « substance active », « l'embryon d'une énergie prospective et féconde ».

Reste, pour revenir sur mes préventions, que Laure Murat parle très peu de l'obsession proustienne pour le passé. C'est un sacré tour de force d'ailleurs : d'un roman déjà nostalgique d'une période révolue au moment où il est écrit et qui fait écho aux heures glorieuses de sa famille, elle n'extrait que l'intelligence, l'énergie et l'exploration « sous le signe du « constant échange », du « lien mouvant », de l' « attache » permanente, interactive, entre le sensoriel et le spirituel, le corps et l'esprit, afin de rendre l'expérience totale de notre relation au monde. » On peut donc passer outre l'agacement contre les ratiocinations, ressassements onanistes d'une mémoire en boucle et chercher – trouver ! – autre chose dans la Recherche ?

Ainsi, à lire Laure Murat, et vous, les amis qui découvrez, lisez ou relisez sans cesse Proust, il faut croire qu'il existe un chemin pour trouver le sien dans la Recherche. Ce serait dommage de ne pas persévérer à le chercher.
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Je termine ce roman qui m'a été prêté, et que j'ai lu avec plaisir et réflexion. J'ai l'impression d'énoncer un lieu commun en affirmant qu'il m'a donné envie de reprendre la Recherche, d'aller directement à la source. N'est-ce pas tout le pouvoir de fascination de cette oeuvre, que de se répandre par le pouvoir d'attraction des mots d'autres lecteurs ?

Je me sens moins déconfite de m'être arrêtée, il y a longtemps, au troisième tome de la Recherche, ayant lu que la moitié des lecteurs ont décroché après Un Amour de Swann, et un bon tiers encore après le deuxième ou le troisième tome. Avec son approche spécialisée et pointue, aussi bien qu'aimante et émue, Laure Murat sait nous convaincre que la lecture de Proust est aussi pour nous. Lire Proust, c'est plus facile qu'on ne croit, selon elle.

Ainsi, par la qualité de son évocation, nous abordons différentes facettes de l'oeuvre : le Proust lié à l'aristocratie de son temps, visiteur des Salons et divers lieux de réjouissances du gratin mondain, mais aussi le clandestin des lieux de rencontre pour hommes, avec mineurs le plus souvent, l'enfant à jamais épris de sa mère, et surtout, l'auteur volontairement reclus pour mener à bien son travail d'écriture, faisant émerger les souvenirs de strates oubliées de sa mémoire, recomposant une réalité qui seule compte, celle de la littérature, ou l'expérience transmuée en oeuvre d'art.

Nous apprendrons également que Proust creusa la tombe de l'aristocratie, en questionnant non pas tant sa légitimité que son pouvoir réel, et surtout en mettant à jour ce qu'elle taisait, en amenant au centre les personnages de la marge, ceux qu'elle ne voulait pas voir, ou qu'elle ne pouvait tolérer qu'en les faisant taire. Pour un peu, l'auteur culte du XXème siècle deviendrait presque une icône du grand mouvement arc-en-ciel, bien qu'il eût ses propres limites, en ce qu'un coming-out n'était pas sa tasse de thé. Il était même, dirait-on aujourd'hui, littéralement homophobe.

C'est ici qu'il faut parler du "roman familial", car Laure Murat sait ce qu'est l'aristocratie, elle a vécu en son sein, sans questionnement d'abord, protégée par "le château-fort" et le récit familial, puis écartée car elle voulait vivre son homosexualité au grand jour et que sa mère ne voulait pas en entendre parler, d'où sa rupture et son exil. Il faut lire ces pages sur les manières du grand monde, le vide enrobé par les formes, sur la répétition ad nauseam de la généalogie, mais aussi sur une certaine liberté de ton, une désinvolture cultivée, un amour des livres comme pouvait l'incarner son père. C'est touchant et fascinant, car sans être qualifié pour, qui peut accéder à ce milieu d'entre-soi par excellence ?

Pourquoi alors ne pas accorder le 5/5 à ce livre inclassable, entre essai littéraire et auto-fiction, qui fait un sans faute quant au style ? J'ai deux raisons : je n'aime pas lire sur un auteur avant de le lire moi-même, d'une part. D'autre part, j'ai une légère suspicion envers Laure Murat d'ambiguïté morale relative à son statut de noblesse : certes, elle ne manque pas d'auto-dérision et d'esprit critique, mais elle reste Princesse après tout dans l'état-civil. Mais surtout, elle se donne le beau rôle, la vérité pour elle est le mouvement, la fluidité, contre l'immobilisme et le conservatisme hérités de son milieu. Si sa façon de vivre avait été acceptée par sa caste, aurait-elle ainsi tout remis en cause, aurait-elle rompu avec un mode de vie qui devait bien comporter quelques avantages ? Ne demandait-elle qu'une acceptation de son individualité, l'expression d'une compréhension maternelle, ou était-elle d'emblée prête à aller plus loin, à rompre avec tout un milieu qu'elle estime toxique par ce qu'il lui a coûté ?
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Il était une fois une princesse qui ne s'est pas mariée, qui n'a pas eu d'enfant, et qui, pour comble, est devenue gauchiste, féministe et homosexuelle.

La princesse déchue doit son salut à Marcel Proust.

Proust, roman familial suggère que c'est Proust qui a composé le roman familial de Laure Murat, et c'est d'une certaine façon la vérité, car en tant que chroniqueur de gazette mondaine, Marcel Proust était de toutes les fêtes du microcosme aristocrate, de la fin du XIXème au début du XXème, où figurait en bonne position les arrière-grands-parents de l'autrice.

À force d'en entendre parler, dès sa tendre enfance, Laure Murat considère le grand écrivain comme quelqu'un de sa famille, qui plus est comme un ange gardien, qu'elle honore par les mots de la fin de son ouvrage.

« À ce titre, il ne serait pas exagéré de dire que Proust m'a sauvée ».

Marcel Proust lui a décillé les yeux et permis de faire sa résilience face à la cruauté du rejet de sa famille quand elle a fait son coming out : « Tu es une fille perdue», lui crache à la figure sa mère avant de se mettre à pleurer, comble de l'ignominie pour une noble !

« À l'aristocratie est souvent rattaché le mot de prestige. […]. Personnellement, je préfère le « proustige ». […] Je ne m'arroge en rien le prestige de Proust parce qu'il aurait décrit le monde où je suis née, mais je loue sa magie à m'en avoir sortie, en authentique proustigitateur ». (p.16)

Les personnages de "À la Recherche du Temps perdu" sont inspirés de réels aristocrates, sans oublier de nombreux membres de la dynastie Murat – Luynes, croisement de la noblesse d'empire (Napoléon) et de la noblesse de sang. L'intérêt de Laure Murat va au-delà de l'évocation pure et simple de sa famille, et s'étend à l'aristocratie toute entière que Marcel Proust dépeint merveilleusement, comme des errants voltigeant dans leur bulle, en constante représentation.

« Limité au surgissement de noms familiers dans le cadre d'un roman, le trouble de ma lecture serait resté anecdotique. Mais le plus sidérant, c'était que toutes les scènes « lues » où l'aristocratie entrait en jeu étaient infiniment plus vivantes que les scènes « vécues » dont j'avais été témoin, comme si Proust, à l'image du Dr Frankenstein, élaborait sous mes yeux le mode d'emploi des créatures que nous étions. Il mettait en mots et en paragraphes intelligibles ce qui se mouvait sous mes yeux depuis que j'étais née ». ((p.78)

Ces chevaliers d'un autre temps se doivent d'évoluer comme des notes dans un morceau de musique, la moindre fausse note est vécue comme un drame sans nom. C'est tout un ensemble de codes qu'ils doivent appliquer au pied et à la lettre.

Il faut respecter l'élocution aristocratique, « l'accent de classe ».

« Une année, une de mes soeurs avait spontanément adopté le tic d'une de ses professeures* d'école qui ajoutait des « eu » traînants à la suite de certains mots, comme dans « je suis allée à la piscin-eu » […] je vois encore la panique sur le visage de ma mère, comme si la famille groseille au complet avait pris possession du larynx de ma soeur ». (p.172)

*oh mes aïeux !

Cet « accent de classe » doit se dérouler dans un certain rythme.

« Cette musicalité un peu nerveuse, faite d'accélérations et de lenteurs étudiées pour conduire le plus sûrement à la chute, convient aux mots d'esprit et à l'art de la conversation, où il est déconseillé de s'appesantir ». (p.19)

C'est tout un apprentissage de parler pour ne rien dire ou pratiquer la langue de bois.

« Car, aussi prévisible soit-il à bien des égards, ce milieu conserve en même temps, et jalousement, le secret de sa liturgie, qui fonctionne comme des actes de langage indirect, ces énoncés qui disent une chose pour en signifier une autre ». (p.87)

« Proust écrit : « j'avais assez fréquenté de gens du monde pour savoir que ce sont eux les véritables illettrés, et non les ouvriers électriciens ». (p.32)

C'est fatigant d'être en constante représentation, rares sont les instants où l'attention se relâche, comme ce moment où le baron de Charlus, ne se sachant pas observé, sort de l'hôtel de Mme de Villeparisis.

« Dans ce passage où le narrateur observe M. de Charlus à son insu, baissant les paupières au soleil dans la cour de l'hôtel de Guermantes, vaut mieux que toutes les explications. Parce qu'il est convaincu de n'être pas observé, le baron a « relâché dans son visage cette tension, amorti cette vitalité factice », oublié d'arborer sa « brutalité postiche » pour laisser « l'aménité, la bonté […] s'étaler si naïvement sur son visage ». (p.82)

Il est formellement interdit de manifester des sentiments, sont exclues toutes circonstances atténuantes.

« « On ne pleure pas comme une domestique », répétait mon arrière-grand-mère, que la haine de l'effusion avait poussée à donner un bal à la mort d'un de ses fils, engagé volontaire, tombé pour la France en 1916, à l'aube de son vingtième anniversaire ». (p.18)

Ces aristocrates ont appris par coeur leur rôle et sont incapables d'improviser. Il faut comprendre le désarroi de la duchesse de Guermantes quand elle demande à Swan pourquoi il ne veut pas l'accompagner en Italie, et que ce dernier lui répond que le médecin lui a donné peu de temps à vivre. Cette pauvre dame est perdue car dans son « code de convenances », il n'est pas fait référence à ce qu'il convient de dire dans ce cas précis. Elle esquive la difficulté en rétorquant qu'il s'agit certainement d'une plaisanterie. (p.101)

C'est un truisme de dire que ces gens-là ne travaillent pas et sont totalement ignorants des questions pratiques et de la vie ordinaire. Laure Murat relate que la seule fois où elle a pris le bus avec son père, elle ne savait pas où se mettre quand ce dernier s'adressant au chauffeur a demandé très sérieusement : « on m'a beaucoup parlé de cette carte qu'on dit « orange ». Vous me la conseillez ? ». (p.176)

Cet atavisme les conduit à considérer comme des affaires d'état, des choses insignifiantes, comme le fait que la duchesse de Guermantes puisse porter des souliers rouges avec une robe noire.

Laure Murat nous livre, pour notre grand bonheur, son prisme de lecture de "À la recherche du temps perdu", qui correspond à sa connotation personnelle du temps comme recherche pour comprendre son histoire familiale, même si elle ne l'enferme pas dans ce carcan.

« Ce livre immense m'enchantait comme un kaléidoscope dont chaque mouvement révèle des figures et des combinaisons insoupçonnables, des mondes infinis ». (p.69)

Proust aimait à dire que chaque lecteur lisait en lui-même en lisant La recherche du temps perdu, toutefois il n'appréciait pas toutes les interprétations, d'où sa colère, quand le critique Marcel Boulenger, à propos de "À l'ombre des jeunes filles en fleur", a parlé du portrait flatteur d'une « noblesse imaginaire ».

Pour corroborer cette idée, j'ajoute qu'il s'est mis à dos beaucoup d'aristocrates, comme Mme de Villeparis qui a brûlé toute leur correspondance, où le Marquis de Breteuil qui a cessé de le recevoir alors qu'il avait eu une chambre attitrée.

Je n'ai pas encore pris le temps de partir à La Recherche du Temps perdu. Je n'aurais pas l'outrecuidance de me targuer d'avoir lu « un amour de Swan » pour le bac de français, ou « La prisonnière » suite au film « La captive » avec Sylvie Testud, car ma mémoire ne résisterait pas au moindre interrogatoire.

J'ai acheté Proust, roman familial pour l'offrir à mon mari, qui lui a lu toute La Recherche du Temps perdu en entier deux fois, et plusieurs fois partiellement. Maintenant, je me le suis accaparé et aurai plaisir à le lire et le relire quand mon amie, à qui je viens de le prêter, me le rendra.

Je vais vous faire un aveu. Je suis très touchée par ce sentiment d'étrangeté de Laure Murat.
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Famille de fiction.

Laure Murat entretient un rapport particulier avec A la recherche du temps perdu. L'oeuvre de Proust mentionne ses arrières-grands-parents, et plus généralement parle du milieu d'origine de l'autrice, l'aristocratie.

Je ne suis qu'au début de mon cheminement dans A la recherche du temps perdu, mais cet essai a été un véritable plaisir à lire. Laure Murat parle de Marcel Proust, mais aussi et surtout de son milieu d'origine, l'aristocratie. Issue de la noblesse d'Empire par son père et de la noblesse d'Ancien Régime par sa mère, l'auteure compare le mode de vie de sa famille aujourd'hui, avec les observations de Proust au début du XXème siècle. Laure Murat en arrive au même postulat que Proust : ça brille mais ça sonne creux.

En effet, vue de l'extérieur l'aristocratie a quelque chose de fascinant. Les bonnes manières, les beaux atours, le Tout-Paris font rêver. Laure Murat montre l'envers du décor. Les dorures ne sont qu'un leurre, l'aristocratie ne vit que par et pour les apparences. Se cultiver ? Une perte de temps. Faire des études ? C'est bon pour les roturiers qui doivent travailler. La désillusion de Proust vis à vis de ce milieu transparaît à travers le narrateur de la recherche. La courtoisie des aristocrates fait ressentir un sentiment d'infériorité aux roturiers qui tentent d'approcher ce milieu.
Cela n'est pas un hasard. Les nobles sont l'incarnation de l'entre-soi. Il est quasiment impossible d'intégrer ce monde.

En parallèle, Laure Murat montre son enfance et son adolescence dans ce milieu étouffant. En tant que femme elle n'est que quantité négligeable. Elle ne peut pas hériter et transmettre le nom de la lignée. La lecture de Proust lui a permis d'ouvrir les yeux et de s'émanciper de son milieu. Il lui faudra assumer son identité sexuelle et partir à Los Angeles pour enfin commencer à vivre.

Bref, cet essai est non seulement une grille de lecture de Proust, mais aussi un témoignage sur l'aristocratie française.

Lu dans le cadre du Grand Prix des Lectrices de ELLE 2024.
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Bon, voilà, on ne va pas y aller par quatre chemins comme on dit. J'ai pris une décision toute simple, Madame Murat : cette année, c'est moi (avec un peu d'avance) qui décernerai le Goncourt, MON Goncourt, pour la bonne raison que l'évidence s'impose. En effet, le plus intelligent, le plus fin, le plus délicat, le plus bouleversant, le plus merveilleux de tous ces textes, est… (roulements de tambour) : « Proust, roman familial ».
Voilà. La proclamation est faite ! Un grand bravo Laure Murat ! Vous allez pouvoir repartir avec un chèque de 10 euros (que généralement personne n'encaisse) (mais vous ferez comme bon vous semble) et un succès garanti en librairie...
Maintenant, je tente de vous dire pourquoi je vous ai attribué ce prix.
Il y a tellement de raisons que je ne sais pas par laquelle commencer.
Commençons par vous, si vous le voulez bien. Sachez que l'univers de votre famille m'a vraiment fascinée, à la fois effrayée et fascinée. Je vous l'avoue, j'avais l'impression d'être au coeur d'un roman, je veux dire d'une fiction. le cadre ? L'aristocratie : noblesse d'Empire du côté de votre père, le prince Napoléon Murat, arrière-arrière-petit-neveu de l'Empereur ; noblesse d'Ancien Régime du côté de votre mère, Inès d'Albert de Luynes, fille aînée du duc de Luynes,…
Vous voyez le plan!
Comment vit-on chez ces gens-là ?
Franchement, on m'aurait décrit le mode de vie des Sentinelles des îles Andaman que je n'aurais pas été plus stupéfaite. Personne ne travaille (et tout le monde trouve ça normal comme vous dites!), on ne parle JAMAIS de soi, on ne manifeste JAMAIS ses émotions, on se tient TOUJOURS bien, on parle correctement ET distinctement. On ne lit pas ou très peu (sauf, et il faut le souligner, vos parents qui lisaient, notamment votre père, mais je reparlerai tout à l'heure de ce magnifique et très tendre portrait que vous faites de lui). Alors, comme nous avons, à un an près, le même âge, j'ai tenté de m'imaginer grandir dans ce type de milieu peut-être un peu... étouffant (bel euphémisme), complètement hors-sol, totalement coupé du monde réel. Je pense que c'eût été bien difficile. En tout cas, la description très lucide que vous faites de ce monde m'a saisie. J'ajouterai aussi que le chapitre sur le château de Luysne (une vraie forteresse médiévale, n'est-ce pas ?) : « Tombeau pour un château » est vraiment passionnant et tout aussi incroyable...
Donc, de ce monde, il vous a fallu sortir pour exister. Vous saviez que révéler votre homosexualité allait provoquer un tremblement de terre, une catastrophe, un désastre. Et vous l'avez fait et vous avez dû partir. Cela m'a bouleversée. Parce que vous n'avez jamais revu votre famille. Les pages sur vos parents sont extrêmement touchantes. Je sais que certains journalistes vous demandent si ce texte est un règlement de comptes. Bien sûr que non. Ont-ils lu ces pages où l'on sent l'immense amour que vous portez à vos parents, la grande tristesse de n'avoir jamais vraiment connu votre mère et la douleur sans nom d'avoir perdu celui à qui vous ressemblez certainement beaucoup : votre père ?
Et Proust dans tout ça ?
J'imagine votre stupéfaction quand vous avez découvert que des noms de personnes de votre famille figuraient dans La Recherche : ainsi aviez-vous vraiment l'impression de vivre au quotidien avec des personnages de fiction ; et inversement, vous étiez à deux doigts de considérer les êtres de fiction comme des êtres de chair et de sang tellement la frontière entre réalité et fiction devenait mince. Quelle expérience singulière et bouleversante ! Notons en passant que vos arrière-grands- parents avaient effectivement connu Proust...
La lecture de Proust a changé votre vie : en effet, elle a mis à nu un monde reposant sur des conventions, des apparences, du vide. Comme vous le dites, l'aristocrate joue constamment un rôle, toujours le même rôle, il est d'une certaine façon un être de fiction. Il est faux, toujours en représentation. « Il n'y a rien de plus aliéné que l'aristocrate » écrivez-vous.
Proust vous a aidée à y voir clair dans le petit jeu des gens qui vous entouraient : il a « percé le secret de leur pantomime.» En effet, comme le Narrateur de la Recherche, complètement aveuglé au début par ce monde aristocratique, vous allez, petit à petit, mieux comprendre son fonctionnement (un peu comme Swann vis-à-vis d'Odette), un dessillement va progressivement s'opérer. Vous écrivez au sujet de Proust qu'« il nous dévoile un secret : l'échafaudage qui se monte sous nos yeux ne s'appuie sur aucun bâtiment ; c'est une structure solitaire, aérienne et sans support, ne soutenant rien qu'elle-même. » Bref, tout ce monde « repose sur du vide ». Grâce à votre lecture de la Recherche, vous avez mis des mots sur le malaise que vous ressentiez, vous y avez vu clair et vous avez pu prendre vos distances, vous libérer.
Enfin, j'ai trouvé particulièrement saisissantes les analyses que vous proposez sur la notion d'un « MOI » proustien discontinu, instable, fluctuant, changeant, notion qui a été pour vous source d'émancipation. Vous preniez enfin conscience que vous viviez prisonnière dans « l'étau de la permanence et d'une fixité mortifère », vous qui étiez élevée « dans un milieu dont l'idéologie conservatrice sacralisait l'immuabilité et vitupérait le changement. » Vous vous êtes identifiée à ce « Moi » pluriel, multiple, ouvert, riche, libre, à ce « moi » kaléidoscope, fait de strates successives, de temporalités différentes...
La littérature a changé votre vie : elle vous a libérée. Elle vous a permis de comprendre le monde où vous viviez. Elle vous a aussi donné la force de refuser ce qui vous était imposé. « Je passais d'une lecture verticale du monde, monolithe, hiérarchisée, autoritaire, héritée de l'Ancien Régime et du XIXe siècle, à une lecture oblique, plurielle, globale et en trois dimensions de l'univers. de la claustration à l'ouverture. du passé à l'avenir. » de la mort à la vie peut-être aussi.
Merci Laure Murat pour ce texte magnifique que nous porterons en nous longtemps.
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Ce roman autobiographique et essai m'a transportée. Quelle belle écriture et cette identification à Proust dans ce qu'il a détaillé de la société aristocratique à laquelle appartient Laure Murat qui nous permet de comprendre encore mieux la recherche. Comme elle j'aime particulièrement Charlus et Swann qu'elle compare à son père qui n'a jamais pu créer un livre. Ce père qui a annoté et commenté la recherche. Laure est aristocrate mais elle sort du placard et avoue son homosexualité. Proust l'y a aidée. Elle part aux Etats Unis et passe trente ans à étudier Proust. C'est lui qui l'a sauvée en acceptant de ne pas être acceptée comme elle est.

Elle ne veut pas ressembler à ses ancêtres et parents qui préfèrent le silence même si la réalité ne correspond pas à ce que cette société aristocratique peut accepter.

Proust a sauvé Laure. Dans cet essai roman multigenre je redécouvre Proust que j'ai quitté en février et qui me manque déjà.

Il s'agit pour moi d'un livre incontournable pour comprendre l'influence de la recherche sur une vie réelle.
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