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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
J'ai choisi de ne pas lire dans l'ordre présenté les douze textes de ce recueil, de commencer par les plus courtes afin de m'imprégner de la « façon » Némirovsky et de lire en ayant une idée de la vie de l'autrice afin de profiter d'une richesse de narration, miraculeusement sortie de l'oubli. Aussi je place dès maintenant une courte biographie, plantant un décor compliqué, singulier et tragique.

D'origine juive ukrainienne, Irène Némirovsky est née en 1903 à Kiev. Enfance dorée sans amour. Toute la riche famille fuit la Russie à la révolution et s'installe dans le sud de la France. Elle écrit et connaît le succès dès son premier roman, David Golder (1929), puis avec le bal (1930). Après l'exode, elle se réfugie dans un village du Morvan avant d'être arrêtée par les gendarmes français, puis déportée et assassinée à Auschwitz, l'été 1942. Agée de treize ans, sa fille aînée, Denise, emporte dans sa fuite une valise contenant une relique douloureuse : le manuscrit ultime de sa mère, Suite française, qui ne sera publié qu'en 2004 (prix Renaudot). Depuis les rééditions et éditions posthumes s'enchaînent et une nouvelle notoriété vient couronner le talent littéraire d'une autrice au terrible destin. Cette autrice nous permet de mieux comprendre le XXème siècle et surtout d'accéder à la détresse d'une femme, d'une artiste dans la tourmente des exils et des tentatives de s'en sortir par l'écriture.

Echo : Cette très courte nouvelle de 6 pages est une des plus belles. Comme un écho de l'enfance. On y sent toute la détresse et l'humour qui met à distance certaines réminiscences douloureuses. Son père, qu'elle admirait, avait eu peu d'intérêt pour elle, occupé par ses affaires, souvent en voyage ou à jouer des fortunes au casino. Pourtant elle l'adorait et l'admirait. Il s'agit ici, d'un petit garçon mais c'est Irène que j'ai vue. Et quelle chute, une des plus réussies du recueil.

La voleuse : mise en scène de trois générations de femmes et des vies brisées par l'incompréhension, le manque d'amour. La petite fille butée, tenace, c'est Irène ?

Les vierges : cette nouvelle, titre du recueil, est très réussie. Une histoire de femmes, comme souvent dans ces courts récits. La condition des femmes décrite ici : la violence comme communication de Camille ou le morne célibat d'Alberte, de Blanche, de Marcelle. N'est-ce pas la vie de ses parents qu'elle met en scène à travers le récit de Camille ?

Magie : Cette nouvelle décrit, de belle façon romancée, l'ambiance alors qu'Irène a 15 ans et qu'en janvier 1918, les Némirovsky gagnent en traîneau la Finlande puis s'installent dans un hameau avec d'autres russes qui attendent comme eux de voir quelle tournure prendront les événements. Neige, solitude des exilés de la révolution russe, jeux et séances de spiritisme, coups de feu dans le silence, la guerre civile sévissant aussi dans cette région. « Les cartes », questionnent également le destin qui est maléfique. La menace est là et le bonheur fuyant, toujours ! Et « Les revenants » évoquent des souvenirs bien lointains de l'enfance...

La peur : trois pages et quelques lignes pour dire l'absurdité des armes, de la guerre. Superbe ! « La grande allée » aussi sur le même thème.

L'inconnue : une célébrité piégée. le calcul des arrivistes, l'amour comme piège tendu dans l'ombre. Effrayant !

L'ami et la femme : curieuse histoire de cette femme punie pour ne pas être restée fidèle à son ami décédé. Les clichés, les préjugés, misogynes – mais pas seulement – reflets de l'époque et de sa classe sociale, éclatent ici et dans l'ensemble de l'oeuvre de cette autrice. Elle interroge rarement la réalité, elle la dépeint seulement telle qu'elle la voit, une sorte de naturalisme, pas du tout social, elle qui a aussi publié chez Gringoire ou Je suis partout, des publications collaborationnistes d'extrême droite.

Ces nouvelles sont de qualité inégale, mais toutes nous disent beaucoup de la vie d'Irène Némirovsky. C'est une autrice qui sait peindre ses personnages, avec humour, ironie bien souvent ! Un miroir est tendu vers ce passé qui traverse la Russie, la guerre, la haine de classes sociales fortunées, la solidarité parfois des petites gens. Elle avait écrit plusieurs scénarios de films, sans succès. La nouvelle « film parlé » – dans un style différent des autres –, illustre ce travail de préparation d'une oeuvre à écrire ou un film à tourner et elle met en avant cette soif d'amour maternel qu'elle n'a pas eu.
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