La charité chrétienne, la mansuétude des siècles de civilisation tombaient d'elle comme de vains ornements révélant son âme aride et nue. Ils étaient seuls dans un monde hostile, ses enfants et elle. Il lui fallait nourrir et abriter ses petits. Le reste ne comptait plus.
Elle disait "nous" à cause de ce sentiment de pudeur qui nous fait, vis-à-vis d'un malheur, feindre des maux semblables aux siens (mais l'égoïsme déforme si naïvement nos meilleures intentions que nous disons en toute innocence à un tuberculeux au dernier degré : "Je vous plains, je sais ce que c'est, j'ai un rhume dont je n'arrive pas à me débarrasser depuis trois semaines").
"Grâce à cette place de secrétaire, ils s’étaient tirés d’affaire jusque-là et, comme elle le disait : "Il ne faut pas demander l’impossible, mon pauvre mari !" Ils avaient toujours connu une vie difficile depuis le jour où ils s’étaient sauvés de chez eux pour se marier contre le gré de leurs parents. Il y avait longtemps de cela. Elle avait encore des traces de beauté dans son maigre visage. Ses cheveux étaient gris. L’homme était de petite taille, l’air las et négligé, mais par moments, lorsqu’il se tournait vers elle, la regardait, lui souriait, une flamme moqueuse et tendre s’allumait dans ses yeux – la même, pensait-il, oui, vraiment, presque la même qu’autrefois."
"Il avait cinquante ans et ses propres jeux. Il était selon les jours un Maître des Cieux ou un pauvre auteur écrasé par un labeur dur et vain. Il avait fait graver sur sa table à écrire : "Pour soulever un poids si lourd, Sisyphe, il faudrait ton courage." Ses confrères le jalousaient parce qu’il était riche. Lui même racontait avec amertume qu’à sa première candidature à l’Académie française, un des électeurs sollicité de voter pour lui avait répondu sèchement : "Il a trois lignes de téléphone !""
"Sur les traces de ma mère et de mon père, pour ma soeur Elisabeth Gille, pour mes enfants et petits-enfants, cette Mémoire à transmettre, et pour tous ceux qui ont connu et connaissent encore aujourd’hui le drame de l’intolérance.
Denise Epstein"
La lâcheté, dans toute sa splendeur
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je ne puis croire qu'il y ait une différence essentielle entre elles et moi. Elles ont beau me décevoir (elles se montrent si grossières, si mesquines, si vous saviez !), je persiste à chercher en elles une lumière. Oui, ajoutait-elle en levant vers lui ses yeux qui se remplissaient de larmes – elle pleurait facilement -, oui, Notre Seigneur ne serait pas mort pour ces âmes s'il n'y avait eu en elles quelque chose…
Ce n'est pas qu'ils soyent méchants. Ils connaissent pas la vie.
« Il met des gants blancs pour exercer ses droits de conquête. »
« La force prime le droit. » (p. 330)