"Laisse moi le faire, chef. Après, tu pourras me virer pour insubordination. J'encaisse toute la faute, pas de problème.
- Pas de problème ?
- Je démissionne après de toute manière."
Hagen regarda Harry pendant un bon moment.
"D'accord. Pars." Puis il se remit en marche.
Harry lui emboîta le pas. "D'accord ?
- Oui. En réalité, ça l'était depuis le début.
- Ah ? Pourquoi ne l'as-tu pas dit tout de suite, alors ?
- J'ai trouvé agréable d'avoir l'impression de décider."
"Acceptez le conseil de quelqu'un qui sait. Laissez tomber. Il ne faut pas que ça vous ronge. L'injustice, c'est comme la météo. Si vous ne pouvez pas vivre avec, déménagez. L'injustice n'est pas une pièce de la machine. C'est la machine.
Il les regardait, appuyé à la rampe au premier. Il était grand, brun, et portait un peignoir en soie. Elle vit la belle cicatrice épaisse se détacher en blanc sur sa poitrine. Il sourit. Elle entendit sa respiration accélérer. Ce sourire. Il éclairait son visage, le cœur de Lene, la pièce entière plus que n'importe quel lustre en cristal.
Lorsqu'ils sortirent, le Pélican rejoignit Harry. Elle chassa d'un mouvement de tête ses nouvelle dreadlocks.
"Tu es peut-être meilleur que je ne pensais, Harry. Mais quand tu exposes tes théories, ça ne ferait pas de mal que tu ajoutes un "je crois" par ci par là." Elle sourit et lui fila un coup de hanche moqueur.
Harry apprécia le sourire, mais ce coup de hanche...
Harry regarda Bellman. Il ne pouvait que l'admirer. Comme on admire un cafard qu'on fait disparaître dans les toilettes, mais qui remonte toujours. Et encore. Jusqu'à ce qu'il ait conquis le monde.
Un peu d'air. Pas assez. Son cerveau devait déjà souffrir du manque d'oxygène, mais il se souvenait parfaitement des paroles prononcées par son père à Lesja pendant les vacances de Pâques. Dans une avalanche où vous pouvez respirer un peu, vous ne mourez pas du manque d'air, mais d'un excès de CO2 dans le sang. Olav Hole : "Sous la neige, tu es comme un requin, tu meurs de ne pas pouvoir bouger. Même si la neige est assez légère pour qu'un peu d'air passe au travers, la chaleur de ta respiration et de ton corps créera vite une couche de glace autour de toi, qui empêchera l'air d'arriver et la toxicité du CO2 de ta propre respiration de sortir. Tu fais ton propre cercueil de glace, tu comprends ?
Elle posa le front dans ses mains. "Je t'ai trahi, Harry. Je ne sais pas quoi dire. Si ce n'est que la trahison vis à vis de moi-même est encore pire.
Ils en ont tué huit cent mille en quelques semaines, en 1997. Les Hutus sont tombés sur leurs bons vieux voisins et les ont assassinés à coup de machette rien que parce qu'ils étaient étaient tutsis. A la radio, la propagande disait que si tu étais marié à un Tutsi, c'était ton devoir de Hutu de le tuer. Coupez les grands arbres. Beaucoup de gens ont fui par cette route... Joe tendit un doigt par sa vitre baissée. "Les cadavres étaient empilés, à certains endroits c'était impraticable. Une bonne période pour les vautours".
- L'amour est une machine à tuer, murmura Harry.
La phrase sonna plus durement que Harry ne l'avait souhaité, comme s'il voulait la remettre à sa place parce qu'elle... parce qu'elle quoi ? Parce qu'elle était belle, appréciait les mêmes choses que lui et lui prêtait les pantoufles d'un homme à qui elle faisait mine de ne pas penser.