André Mathieu

Cette biographie est une oeuvre magistrale, étoffée et fouillée; loin des potins dont sont faits les journaux à sensation. L'auteur décortique en détail la vie et la création musicale de l'enfant prodige André Mathieu, né à Montréal le 18 février 1929. Dès l'âge de six (6) ans, Mathieu jouait et composait des morceaux de musique classique pour le piano. Il était tellement brillant qu'on l'a qualifié de "Mozart Canadien". Jusqu'au début de son adolescence, sa carrière en fut une de grande star, acclamé par tout le gratin du monde culturel et politique en France, au Québec et aux États-Unis. Avec ses cachets faramineux (1000$, pour une prestation - dans les années 30-40!!!), il était une vache à lait et subvenait aux besoins de sa famille.

À l'arrivée de l'âge adulte son étoile s'est pâlie. Quand il a pu et voulu s'affranchir du carcan familial, alors qu'il n'était plus la "saveur du jour", sa vie a pris une autre tangente; la relation toxique avec ses parents lui a aussi été fatale. Chose certaine, le talent et le génie n'ont pu prendre le dessus sur son penchant pour la dive bouteille.

Rejeté par le milieu culturel, qualifié de "has been" par la presse, le pianiste surdoué et le compositeur André Mathieu n'a jamais pu se faire une place dans le coeur de ses compatriotes non-férus de musique classique, n'atteignant jamais le pinacle de la culture Canadienne-Française (Québécoise). Ses seuls faits d'armes, rapportés dans la presse de l'époque, consistaient en les nombreux pianothons auxquels il a participé, et lors desquels il affrontait, parfois, des individus qui ne connaissaient rien à la musique, alors que lui jouait durant plusieurs (24) heures ses propres compositions, et ce, sans arrêt.

André Mathieu était un pianiste hors-norme, un compositeur talentueux et sous-estimé, mais surtout un être tourmenté qui n'a pas eu une enfance normale. Une fois adulte, il "s'est laissé dissoudre dans un mutisme éthylique", pour tenter d'assouvir son mal de vivre.

Merci à l'auteur car, grâce à son livre, j'ai pu aussi découvrir l'univers créatif d'André Mathieu. Au moment d'écrire ces lignes j'écoute une version du Concerto de Québec, qui est tout à fait sublime. On y découvre un être doté d'une grande sensibilité et un artiste avec un don pour la ligne mélodique.

Le parcours de cette étoile filante dans le firmament artistique du Québec nous permet ainsi d'allonger la liste des personnalités d'exception chez lesquelles génie et folie se sont côtoyés, allant jusqu'à s'autodétruire. André Mathieu est mort le 2 juin 1968 d'une cirrhose du foie.