AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Le hussard bleu (43)

Tout ce qui est humain m'est étranger.
Commenter  J’apprécie          10
Entre ces deux raisons, il y avait de la place pour quelque chose de plus compliqué. C’était le besoin de trahir les héros, de me trahir à mon tour. Je violais cette Allemande, mais à la même seconde, un SS violait la femme que j’aimais le plus au monde. Ainsi tout était-il consommé.
J’ai cessé de la caresser. Je lui ai tordu un poignet. Et, sans aucun plaisir, car je détestais cette brutalité, je lui ai dit :
— Écoutez-moi, ma petite fille. Si vous gigotez, je risque de vous casser le bras. Naturellement, il faut vous débattre, sans quoi ce serait immoral et ça gâcherait mon plaisir. Mais restez dans certaines limites.
J’ai passé l’autre main sur ses grandes jambes musclées, jambes de la Baltique et des horizons gris, jambes qui me changeaient un peu de Barbizon, l’Hay-les-Roses et Saint-Germain pour m’entraîner à leur suite dans les steppes du silence. Je tournais son poignet comme on tourne les clés d’un violon. Elle ne voulait pas crier. Moi, je voulais qu’elle crie un peu. […]
Enfin, elle a commencé à hurler d’une voix monocorde tandis que je la prenais lentement, mais j’ai gardé les yeux dans les siens pour l’empêcher de se cacher à l’intérieur de ses cris.
[…]
Je l’ai prise une troisième fois. Maintenant, je ne pensais plus à ma sœur Claude, mais à Louisiane. À chacune son tour, il faut une certaine justice en amour, faute de quoi on tombe dans la passion, on se laisse pousser les cheveux, on oublie de se limer les ongles et autres infamies. Elle m’a encore mordu la main, pour me laisser un souvenir ou bien parce qu’il est agréable de faire mal. En la tenant par les cheveux, je lui ai cogné la tête contre le bord du divan.
— Comment t’appelles-tu ? lui ai-je dit.
Elle m’a répondu, comme si ses poumons jetaient des seaux d’air dans le vide, elle m’a répondu que cela ne me regardait pas. Je n’avais rien à savoir d’elle.
J’ai fait en souriant :
— Mais si, je sais déjà tout. Tu es la fille d’un général qui portes des moustaches courtes et la croix « Pour le Mérite » avec épées de diamant. Ton frère était un nazi, un chic type et les taupes en ce moment lui bouffent le ventre sous la terre d’Italie : car le ciel est doux, là-bas, mais la terre est impitoyable.
Elle m’a giflé deux fois.
— Mon frère était un garçon d’une autre espèce que la vôtre.
Je lui ai demandé s’il faisait mieux l’amour et elle m’a craché au visage pour mon plus grand divertissement. Si elle ne couchait pas avec lui, pourquoi se montrer aussi susceptible quand je parlais des taupes et de son ventre. D’ailleurs les frères des jolies filles sont tous des imbéciles. À l’avance leur vie est gâchée, ils ont un complexe d’Œdipe drôlement compliqué. Ce qu’ils ont de mieux à faire, c’est de se déguiser en parachutiste et d’aller crever discrètement.
Commenter  J’apprécie          00
L'assommant, je ne faisais que me le répéter, c'est que les goums auront foutu la chaude-pisse partout. Ce n'est pas qu'une bonne bléno, à l'occasion, n'ait son utilité. Je me rappelle, en 43, à la prison d'Angers, sans les gonos, où serais-je maintenant ? Dans une profonde fosse publique avec les regrets éternels de ma famille et la bénédiction du curé de l'endroit. Le gonze qui m'avait passé ses gonos, d'ailleurs, c'était un frère.
Commenter  J’apprécie          00
Et ce n'est pas sans doute une des moindres propriétés de l'amour que de nous rendre semblables aux océans, nous diluant dans l'infini de chaque heure , nous étalant à la surface des choses, nous troublant aux moindres mots, nous rendant enfin esclave de qui voudra, mais plus réellement que cette servitude, nous laissant face à face avec notre unique pensée qui donne à tous nos gestes l'allure des grands fonds.
Commenter  J’apprécie          00
Il suffit de lire les journaux .Sur trois colonnes , on explique pourquoi nous étions des lâches en 40 et que si on avait seulement construit des barricades, on aurait vu un peu. Les barricades ça s'élève tellement mieux en caractères d'imprimerie
Commenter  J’apprécie          00
Avidement j'ai bu trois verres de cette eau qui coule, pareille à elle-même, indifférente et sentencieuse, dans toutes les cuisines du monde et qui est un peu comme les doigts purs du Présent.
Commenter  J’apprécie          30
Longtemps j'ai proposé cette définition: " Hussard, militaire du genre rêveur qui prends la vie par la douceur et les femmes par la violence.
Commenter  J’apprécie          00
Derriere eux , suinte une sorte de brigadier, gros, mais surtout court, au visage de punaise barré d'une moustache mal venue, l'œil beigeâtre et glauque, un regard semblable à ces fonds de fossé qui ont besoin d'être curés.
Commenter  J’apprécie          00
Il faudrait se mettre à genoux devant chaque image du passé pour comprendre que le type allongé dans l’herbe, maintenant, est entré dans une heure sérieuse de sa vie, qu’il se nomme Berçac et qu’il n’est pas habitué, cette fois-ci, à ce qui lui arrive. A son tour, devant la mort, il est un pauvre petit nouveau. Il meurt dans le fracas du monde et la pureté du ciel.

Je m'approche de lui. Prudemment, je trempe un doigt dans son sang. Il est foncé, plein de caillots je crois, et d’une douce odeur pétrifiée. Tel était le secret de Berçac qui semblait vivre à mi-chemin entre les dieux et les officiers supérieurs de cavalerie. Je passe toute la main sur son ventre défoncé. Ma main prend cette odeur de champignon acide. Je la garde à hauteur de mon front devant moi.

Je ne comprends toujours pas, sinon que je ne saurai jamais mourir. Rien n’est plus horrible que de se mélanger à la nature, rien n’est plus odieux que la terre. Elle nous attend, elle n’est pas pressée. En une seconde je pense amoureusement aux villes, aux maisons bien-aimées, aux trottoirs, à leur douce peau goudronnée. Les villes si pudiques, si tranquilles après tout pour un garçon de mon âge.
Commenter  J’apprécie          30
Je pleure d'être venu si loin pour voir que rien n'a changé. Il y a des élèves qu'on appelle hussards et des pions au visage d'adjudants, des professeurs munis d'une cravache. Chaque peloton est une classe. Après l'heure où on épluche les pommes de terre, il y a celle où l'on tue des Allemands. Ainsi l'histoire succède-t-elle à la philo. Ça ne manque pas de spectacles. Tout est à voir et à retenir et à bien décrire ; ainsi, aujourd'hui, le sujet de la composition n'est-il pas : « vous entrez dans une ville ennemie. Quelles sont vos impressions ? » Eh bien je n'ai pas d'impressions, je n'entre pas dans une ville ennemie, mais à Saint-Malo ou à Beauvais. J'y retrouve des visages bien connus. Une habitude m'attendait encore pour me prendre par la main et me faire traverser cette vie-là. Le monde ressemble affreusement au monde. (p. 94)
Commenter  J’apprécie          10






    Lecteurs (375) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Les Amants de la Littérature

    Grâce à Shakespeare, ils sont certainement les plus célèbres, les plus appréciés et les plus ancrés dans les mémoires depuis des siècles...

    Hercule Poirot & Miss Marple
    Pyrame & Thisbé
    Roméo & Juliette
    Sherlock Holmes & John Watson

    10 questions
    5287 lecteurs ont répondu
    Thèmes : amants , amour , littératureCréer un quiz sur ce livre

    {* *}