Le Portrait de mariage

Au rebours de diverses critiques que j'ai parcourues ici-même, je trouve qu'il y a dans ce roman matière à une belle histoire. L'héroïne pourrait être vraiment attachante (ainsi que sa servante ou sa nourrice), et la figure ambivalente d'Alfonso, le méchant duc de Ferrare, ne manque pas d'intérêt non plus. On ne lit pas tant de romans que ça qui se situent à Florence ou Ferrare à cette époque. Il y a des détails originaux, notamment tout ce qui a trait à la peinture et à la façon dont on la pratiquait alors dans les milieux aristocratiques ou bourgeois. Il y aurait eu de quoi créer des moments de vrai suspense (si si!) Les états d'âme de Lucrèce auraient pu nous toucher…. Au risque de paraître cruel, je trouve que ce qui manque à ce roman, c'est un vrai écrivain. Je suspecte cet abominable va-et-vient chronologique et géographique, devenu presque de rigueur dans les romans du 21ème siècle d'avoir été suggéré par un conseiller littéraire. C'est lui qui rompt complètement le suspense et fatigue inutilement le lecteur ; mais il semble que pour les docteurs ès narratologie modrnes il soit la marque obligée de l'écriture intelligente. le même conseiller (ou un autre) est probablement à l'origine de ce style prétendument vivant, fait de phrases hachées, au présent de narration, semées de traits métaphoriques plus ou moins osés, lequel style accrocheur se marie très mal avec d'interminables descriptions, souvent répétitives, qui sont censées donner, je suppose, une matière plus littéraire au roman. Bref, très désagréable impression de lire ce que seront dans un avenir proche les récits produits par l'Intelligence (si mal nommée) Artificielle. (Je force un peu le trait, bien sûr : mais suis-je vraiment seul à trouver nombre de ces romans à succès bizarrement stéréotypés dans la forme même?)