Ce tome contient une histoire complète relativement indépendante de toute autre, ne nécessitant qu'une connaissance superficielle du personnage. Il comprend les 6 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2005, coécrits par Dan Berman &
Michael Avon Oeming, dessinés et encrés par
Andrea di Vito, et mis en couleurs par Laura Villari. Ce récit a été réédité dans Thor: Ragnaroks , avec
Thor: Blood Oath & Avengers Disassembled: Thor, également écrits par Oeming.
Sur la planète de la Nouvelle Korbin, à la chambre du Grand Conseil, le grand prêtre Rogotta a pris la parole et revient sur la capacité de leur race à s'amalgamer avec des machines, sur l'avènement de Beta Ray Bill comme leur sauveur, tout en leur rappelant que ce dernier est devenu trop puissant menaçant d'usurper le pouvoir de la prêtrise et du Conseil. Or le peuple Korbin a à nouveau besoin d'un champion car Ashta, le dieu déchu, s'approche de leur planète, détruisant des royaumes entiers sur son passage. L'un des généraux présents dans l'assistance lui demande où il veut en venir. Rogotta continue : Beta Ray Bill s'en est allé pour prêter main forte à ses nouveaux dieux, ceux d'Asgard. le temps est donc venu de réveiller son prédécesseur : Alpha Ray, un être entièrement automatisé, guidé par le Conseil. Beta Ray Bill a prêté serment à des faux dieux et il n'est pas là pour défendre son peuple. le général l'interrompt : Ashta arrive dans l'espace de la Nouvelle Korbin et les tentatives pour établir contact avec lui ont échoué. Il est temps de gagner les positions de combat.
Sur Asgard, le temps de Ragnarök est arrivé et les dieux se battent contre les géants du gel et une armée de démons. Malgré tout, Thor renvoie Beta Ray Bill dans l'espace lui indiquant que cette bataille n'est pas la sienne et qu'il doit rejoindre son propre peuple. Bill s'exécute à contre coeur et retourne vers la Nouvelle Korbin. Pendant ce temps-là, les troupes ont engagé le combat dans l'espace, mais rien n'entame le vaisseau d'Ashta. le grand prêtre Rogotta prend sur lui d'ordonner la réactivation d'Alpha Ray. Bill arrive alors que le vaisseau d'Ashta a pris la forme d'une gigantesque étoile de mer avec des bras titanesques détruisant tous les vaisseaux passant à leur portée. Il s'approche et porte un coup à la surface du vaisseau, sans laisser de marque. Il est soudain attaqué par derrière, Alpha Ray vient d'être réactivé et il s'est jeté sur lui. Ils sont tous les deux pris dans le feu d'un énorme rayon destructeur émanant du vaisseau d'Ashta. Pendant ce temps-là, la guerre fait des ravages en Asgard.
Les 2 coscénaristes poursuivent leur collaboration initiée avec le Ragnarök raconté dans la série Thor. Beta Ray Bill était effectivement apparu le temps de quelques pages dans la série de Thor, et le lecteur découvre ce qu'il est devenu ensuite. Il ne faut pas longtemps au lecteur habitué de l'univers partagé Marvel pour comprendre qui peut être ce destructeur de mondes qui a l'apparence d'un dieu pour le peuple qui le contemple. Il suppose donc que l'enjeu de cette minisérie sera de se défaire de cet encombrant glouton, mais en fait deux personnages viennent occuper le devant de la scène : tout d'abord Alpha Ray comme ennemi jetable (le lecteur aurait dû s'attendre à ce qu'un créateur relève le défi contenu dans un nom contenant la deuxième lettre d'un alphabet grec), puis Stardust le héraut du ravageur de mondes. Ce dernier commet une grosse bourde qui libère un ennemi autrement puissant, et finalement le dernier épisode propose une alternative à Thor, en ramenant l'action sur cette bonne vieille Terre. Les coscénaristes ramènent donc un personnage créé par
Walter Simonson en 1983, dans l'épisode 337 de la série Thor. Ils le dépeignent comme un guerrier expérimenté, sans attache personnelle, sans famille, avec un sens de l'amitié et de l'altruisme qui l'amène à aider Thor, puis à défendre son peuple contre ce ravageur. Il se bat pour la survie de son peuple, et sa seule amitié (en dehors des asgardiens) va à l'intelligence artificielle du vaisseau spatial Skuttlebutt.
Le lecteur comprend donc vite qu'il va en prendre plein les yeux avec un récit enchaînant des combats cosmiques, et plus si affinité, avec Bill faisant un usage libéral de son marteau Stormbreaker contre tous ses ennemis. S'il a lu Ragnarök, il éprouve peut-être quelques appréhensions à savoir si l'artiste va se montrer à la hauteur d'un tel déchaînement de violence dans les combats, et s'il va savoir composer des décors cosmiques. Il constate très vite qu'en tout cas, la coloriste se lâche et s'amuse pour donner de la flamboyance aux décharges d'énergie, des camaïeux somptueux pour les phénomènes spatiaux, une très belle texture pour Stardust le héraut du ravageur. le lecteur est aux anges : il en prend plein les mirettes comme il est en droit d'attendre d'une aventure cosmique avec un combattant de la trempe de Beta Ray Bill. Il sait qu'il peut aussi compter sur l'artiste pour des personnages représentés de manière détaillée. C'est effectivement le cas pour Bill avec un corps musculeux massif, un costume un petit moins superhéros que celui de Thor, mais juste-au-corps avec une cape quand même, sans oublier le casque ailé. La forme à la fois aérodynamique et biscornue du marteau Stormbreaker est respectée dans chaque coup asséné avec force. Certes les Korbinis ont tendance à tous être dessinés de la même manière, avec quand même une différence entre femelle et mâle, mais Stardust a une apparence remarquable, ainsi que Asteroth et bien sûr Ashta.
Alors que les influences superhéros étaient un peu trop appuyées dans Thor: Ragnarök, elles sont ici moins pesantes. le lecteur se sent vraiment projeté dans un environnement d'opéra de l'espace, avec certes une race extraterrestre générique (les Korbinis), mais aussi des lieux avec un minimum de particularités, que ce soit la salle monumentale du Grand Conseil ou les autres bâtiments de la planète Nouvelle Korbini, le vaisseau du ravageur (conforme à ses apparences précédentes), la forme extérieure du vaisseau Skuttlebutt, et enfin les gratte-ciels de New York. Mais ce qui impressionne le plus est le rendu de l'espace lui-même, avec quelques astéroïdes bien placés, et l'apport essentiel de Laura Villari. Alors qu'il pourrait craindre une suite de cases avec un fond vide pour chaque séquence dans le vide de l'espace, le lecteur est pris dans les décharges d'énergie mortelles, les mouvements élégants, la force des attaques,
Andrea di Vito s'avérant un réalisateur remarquable, et un metteur en scène d'une grande intelligence spatiale pour concevoir ses plans de prise de vue, différents et pertinents à chaque fois, pour en tirer le meilleur parti sur le plan spectaculaire.
Le lecteur suit donc bien volontiers Beta Ray Bill dans ces aventures hautes en couleurs, brutales, avec un enjeu élevé : rien moins que la survie de tous les habitants de la Nouvelle Korbini, et donc de sa race. Il affronte tout d'abord un héraut sans une once d'état d'âme, suivi par une créature en provenance d'une dimension des ténèbres et prête à tout détruire comme il va de soi pour sa nature. le héros fonce dans le tas, encaisse les coups, se retrouve sur la touche de temps en temps, et repart de plus belle, sans coup férir. L'aventure avance rapidement, les coups de théâtre sont de bon aloi, et le spectacle prend aux tripes. le lecteur se laisse donc bien volontiers emmener dans cette aventure sympathique. Il découvre que de temps à autre, les coscénaristes interrompent ce fil narratif principal pour montrer ce qu'il advient de Ven un Korbini du peuple, marié à Sala qu'il aime. Lorsque les autorités de la Nouvelle Korbini comprennent que la destruction de leur planète est inéluctable, ils décident d'implémenter une évacuation de la planète pour un exode massif. Mais il faut que quelques habitants restent en arrière pour protéger la fuite du vaisseau emportant l'esprit des Korbinis. Parmi les individus sélectionnés d'office, sans leur consentement, se trouve le pauvre Ven qui voit son épouse partir. C'est un choix consenti a posteriori, Ven ayant conscience de la nécessité d'assurer cette protection. Par les yeux de Ven, le lecteur vit alors les événements à l'échelle de l'individu normal, se retrouvant dans une situation sur laquelle il n'a aucune prise : une créature qui est peut-être son dieu vient détruire toute sa planète, leur défenseur est de retour avec une force de frappe démesurée par rapport au commun des mortels. Les vaisseaux Korbini se font détruire de manière arbitraire en fonction des mouvements imprévisibles de l'ennemi qui semble tout puissant. Ces séquences apportent une profondeur humaine à un récit qui n'aurait pu être qu'une aventure spectaculaire premier degré.
S'il a apprécié le Ragnarök de Thor, ou s'il apprécie l'écriture d'Oeming, il y a de forte chance que le lecteur soit tenté par cette minisérie. Il découvre qu'
Andrea di Vito ait beaucoup plus à l'aise dans l'espace, que sur Asgard et qu'il réalise des planches spectaculaires, formidablement complétées par la mise en couleurs. L'aventure est inventive et visuellement impressionnante et elle est complétée par le point de vue d'un habitant ordinaire qui, par comparaison, fait ressortir la dimension quasi mythologique de tels combats.